Discours | Me Pierre Josiard Agnant honoré par l’Association Nationale des Magistrats Haïtiens (ANAMAH)

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Discours de remerciements de Me. Pierre Josiard Agnant

Jeudi 17 février 2022 ((rezonodwes.com))–

Monsieur le Ministre de la Justice et de la Sécurité Publique

Monsieur le Vice-Président de la Cour de Cassation

Monsieur le Commissaire du Gouvernement près la Cour de Cassation et ses Substituts

Monsieur le Président de l’ANAMAH,

Mesdames et Messieurs les Membres du Conseil d’Administration de l’ANAMAH

Mesdames et Messieurs les Anciens dirigeants de l’ANAMAH

Mesdames et Messieurs les Magistrats,

Mesdames et Messieurs les Greffiers,

Mesdames et Messieurs les Huissiers,

Mesdames et Messieurs les Avocats,

Mesdames et Messieurs,

J’ai l’insigne honneur de recevoir cette distinction du Directoire de l’Association Nationale des Magistrats Haïtiens (ANAMAH) dont les membres ne cessent de prendre des initiatives visant à encourager des Magistrats et des dignes serviteurs de la République à œuvrer pour le développement de la justice.  Je reçois cette plaque au nom de tous les Magistrats assis et debout, les Avocats, les Greffiers, les Huissiers, les Membres de la société civile, les Amis et Membres de ma famille qui m’ont supporté dans cette initiative de porter l’ANAMAH sur les fronts baptismaux et qui ne m’ont jamais abandonné quand j’avais besoin de leurs avis.

Je remercie le Conseil d’Administration de l’ANAMAH et particulièrement son Président, le Juge Jean Wilner Morin, qui a pensé à revisiter les archives pour permettre aux Magistrats de revivre des moments palpitants de l’histoire de la Magistrature Haïtienne en honorant les membres du Premier Conseil d’Administration.

Je témoigne publiquement mon estime pour le Magistrat Jean Wilner Morin qui s’est entièrement donné pour tenir allumé le flambeau de la motivation, de la sensibilisation et des réflexions productives au sein de la Magistrature.  J’ai l’avantage d’avoir été témoin de première loge de plusieurs batailles engagées par Juge Morin en vue de faire respecter les droits des Magistrats.  Il a pu tirer ses épingles du jeu dans des circonstances très difficiles grâce à ses dons de stratège et de tacticien.  Les Magistrats peuvent s’enorgueillir d’avoir fait un choix intelligent en élisant Juge Morin comme Président de l’ANAMAH.  Je vous félicite Magistrat Morin pour votre réélection à la tête de cette prestigieuse association.

Je me réjouis de voir que la Magistrature Haïtienne compte aujourd’hui plusieurs associations qui défendent les droits des Magistrats et, de surcroît, ceux des justiciables quand elles œuvrent pour l’avènement d’un système judiciaire plus efficace, respectueux des libertés individuelles et capables de jouer pleinement son rôle de dernier rempart de la démocratie et de l’Etat de droit.  Le mouvement syndical a même gagné la magistrature debout.  Les Greffiers et les Huissiers ont aussi emboité le pas.  C’est une avancée significative dans la lutte pour l’indépendance de la Magistrature et la distribution d’une saine et impartiale justice. 

Aujourd’hui, on peut compter environ une dizaine d’Associations de juges, de greffiers et d’huissiers.  Ils ont toujours bénéficié de mes conseils, surtout dans des conjonctures difficiles. Je dis un Grand Merci à tous les acteurs du système judiciaire qui ont embrassé cette idée, notamment : L’Association Professionnelle des Magistrats (APM), le Réseau National des Magistrats Haïtiens (RENAMAH), le Chapitre Haïtien des Femmes Juges (CHEFEJ), l’Association des Juges Indépendants et Brigade des Huissiers Indépendants (AJI-VIT & BHIEN), l’Association des Juges de Paix Haïtiens (AJUPHA), le Collectif des Magistrats Debout d’Haïti (COMADH), l’Association Nationale des Greffiers Haïtiens (ANAGH) et le Syndicat des Huissiers de justice de la République (SHJRDH)

Cependant, parler de syndicat de Magistrat en Haïti vingt ans de cela paraissait utopique.  On attirait la foudre de toute part.  Il a fallu beaucoup de courage et de détermination à un groupe de Magistrats, issus de la première promotion pilote de l’Ecole de la Magistrature, pour initier les réflexions et engager les discussions pour accoucher la première véritable association des magistrats en Haïti. 

Les menaces fusaient à tous les niveaux.  Les ennemis de cette initiative, jugée révolutionnaire à l’époque, étaient nombreux.  Ils étaient à la fois dans le pouvoir politique, dans le milieu associatif et même dans la Magistrature.  Ils avaient dressé des obstacles sur notre chemin pour nous intimider.  Finalement, l’Association Nationale des Magistrats Haïtiens, ayant pour sigle ANAMAH, a vu le jour.  Et cette nouvelle a eu l’effet d’une bombe. 

Plus d’un se demandait pourquoi un syndicat au sein d’un Pouvoir de l’Etat.  Mais, il fallait travailler pour permettre au Pouvoir judiciaire de remplir efficacement sa mission constitutionnelle à côté des autres pouvoirs de l’Etat.  Car, la réalité du Pouvoir judiciaire est différente de celle des deux autres Pouvoirs de l’Etat.

Une fois créée, les persécutions ont commencé et le Président de l’ANAMAH, en la personne de votre serviteur, était la cible de toutes les flèches des détracteurs.

On avait utilisé un dossier que j’avais traité dans une audience criminelle sans assistance de jury pour attenter à mon honneur et, du même coup, tenter de faire de l’ANAMAH un né-mort et non viable.  Alors qu’ils savent très bien que Magistrat Pierre Josiard AGNANT est HONNETE, INTEGRE ET COMPETENT et ne s’est jamais associé à aucun acte de corruption dans sa vie.  Même en influençant le Conseil Supérieur de la Magistrature à l’époque, ses détracteurs n’arrivaient pas utiliser leur aune pour le mesurer.  Et, quoi qu’ils disent, quoi qu’ils fassent et malgré leur puissance, ces vingt dernières années lui ont donné raison.

On a essayé par tous les moyens d’assassiner mon caractère.  On a orchestré, avec une certaine presse, un lynchage médiatique contre moi.  J’ai résisté et j’ai appris à mieux connaitre les femmes, les hommes et les institutions de ce pays et à développer des stratégies pour faire grandir l’ANAMAH envers et contre tous.

Nous avions consacré des journées entières de réflexions en vue de contourner les tractations de toutes sortes et faire vivre l’ANAMAH en arrosant quotidiennement les germes de l’indépendance de la Magistrature dans l’esprit de chaque magistrat.

Nous avons, avec nos faibles moyens, visité toutes les juridictions.  Nous avons développé l’esprit de corps chez les Magistrats.  Nous avons insisté sur la création d’un véritable organe d’administration et de contrôle du pouvoir Judiciaire.  Nous avons exigé des lois sur le statut des magistrats en vue de garantir l’indépendance du Pouvoir Judiciaire par rapport aux autres pouvoirs de l’Etat et aux groupes de pression.  Beaucoup de recommandations ont été faites en ce sens. Cela a été une lutte difficile, mais, qui méritait d’être menée.

Je me souviens, particulièrement, de cette nuit où nous étions cinq (5) Magistrats à dormir dans une voiture de deux (2) portes à Milot, aux pieds de la citadelle La ferrière, pour pouvoir continuer la visite des juridictions et jeter les bases solides de l’Association dans les départements du Nord et du Nord ’Est.  Je vous assure qu’on n’avait pas vu passer le temps ; et, le soleil paraissait pointer trop vite à l’horizon puisqu’à un certain moment on s’était adonné à débattre de certains problèmes de la justice.  Je sais que cette nuit avait beaucoup marqué Magistrat Jude Baptiste, Magistrat Pérès Paul, Magistrat Jocelyn Rosemberg de regrettée mémoire et votre serviteur Magistrat Pierre Josiard Agnant.

Je suis heureux de constater que la relève est bien assurée et que le Premier Conseil d’Administration de l’ANAMAH, dont j’avais l’honneur de présider, n’avait pas semé dans un sol aride.  Car, la Magistrature Haïtienne n’a jamais été si active au cours de ces vingt dernières années.

Assurément, il nous reste beaucoup à faire pour rendre notre système judiciaire plus efficace et la magistrature plus productive.  Il faut revisiter certaines décisions et certaines lois relatives au Pouvoir judiciaire afin de les parfaire et les adapter à la réalité de cette fin du premier quart du 21ème siècle.  Il faut créer un environnement permettant au Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire de bien s’acquitter de sa mission et aux Magistrats de pouvoir faire carrière et vivre dignement de leur fonction.  Il est urgent de se concentrer davantage sur la formation initiale et continue des Magistrats.  L’ANAMAH doit, avec les autres associations de Magistrats, ouvrir grand ses yeux sur le fonctionnement des Tribunaux et Cours de la République et permettre aux Magistrats de s’approprier du code déontologique de la magistrature promouvant les valeurs d’Indépendance, d’Impartialité, d’Intégrité, de Convenances, d’Egalité, de Compétence et de Diligence.

Chers collègues Magistrats, n’oubliez pas que l’indépendance de la magistrature ne sera jamais une réalité tant que les Magistrats ne seront pas eux-mêmes indépendants.

Vive l’ANAMAH, Vive une Magistrature haïtienne forte et indépendante, avec des femmes et des hommes indépendants, courageux, intègres, honnêtes, compétents et diligents.

Merci.

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