Le Parlement dans la tourmente de ses attributions

0
1140

par Elco Saint-Amand

Port-au-Prince, mercredi 12 avril 2017 ((rezonodwes.com)).- Inutile de mentionner, au terme d’une interminable période d’échecs notés dans les actions accumulées, d’une législature à une autre, le dégoût éprouvé par plus d’un et ce, quand on veut parler du corps législatif. Par ailleurs, durant cette longue transition démocratique qui n’en finit pas, nous avons malheureusement eu des législatures qui justifient carrément le mal du peuple dans le choix et le vote de ses représentants.




Au grand besoin des critiques et ce, dans une constance dérangeante, nous allons, malgré la mauvaise métamorphose de notre société à l’esprit critique non partisan, aborder tour à tour divers dossiers, dont particulièrement ceux qui concernent les problèmes d’adaptation des « rôles législatifs» dans notre système de gouvernance.

Les réflexions se divergent sur le système parlementaire

La question sur le régime politique implémenté dans la constitution haïtienne de 1987 fait encore aujourd’hui débat et mériterait, selon plus d’un, une coalition interventionniste de la nation, afin de redéfinir et de trancher, une fois pour toute, sur les attributions constitutionnelles du pouvoir législatif.

Peut-on parler d’imperfections de régime? Parler de régimes politiques, on doit se référer à l’ensemble des règles juridiques relatives à l’organisation et au fonctionnement de l’État. On parle ici du droit constitutionnel. C’est l’ensemble de ces règles constituant le droit de l’État. C’est la loi fondamentale représentant l’épine-dorsale des pouvoirs publics.




Dans une démocratie aussi fragile comme la nôtre, le régime politique instauré devrait être une source de consolidation et de développement normatif du pays, en lieu et place de ce régime de désordre public où les attributions constitutionnelles des pouvoirs publics n’occupent plus le sommet de la hiérarchie des normes de
gouvernance de la barque nationale.

Dans quel régime politique sommes nous?

Au constat, le Parlement haïtien définit les limites des pouvoirs tout en les fusionnant au sien. Confusion étatique. Ainsi, par son avarice existentiel et personnel le pouvoir législatif ne s’oppose en rien à l’arbitraire juridique, une absence d’attributions n’étant plus conformes aux normes et aux règles d’un État de droit.

Le Parlement représente-il l’équilibre des pouvoirs ?

Non ! Les constituants de 1987, dans leur souci exclusif d‘opérer à la fois une rupture avec les dérives des trente années de la dictature des Duvalier, ont attribué trop de rôles aux deux Chambres qui constituent le pouvoir législatif et, en contre partie, n’ont pas su adopter une constitution qui aurait été une projection vers l’avenir dans une croisade d’interdépendance des rôles… de chaque pouvoir de l’État.

Pourquoi dit-on que le Parlement est l’émanation des attributs du peuple ?

Si la Constitution de 1987 comporte, en effet, des règles nouvelles destinées à la protection individuelle des citoyens/ citoyennes et à la limitation des attributions de l’Exécutif, elle donne en revanche trop de pouvoirs au Législatif et relègue au pouvoir judiciaire le rôle de constat… un moyen, sans doute involontaire, de compromettre les véritables rôles de chacun des pouvoirs dans une démocratie.

Une série de faits et d’actes accomplis et posés par le Parle ment montre clairement que ses attributions disposent d’énormes pouvoirs d’action et de contrôle du gouvernement, toutefois de viennent aussi une source utilisée par certains parlementaires mal intentionnés comme un instrument de corruption institutionnelle. Le Parlement constitue une faute de pouvoir parlementer.




Quelles sont les priorités de la 50 Législature ?

Dans l’inutilité d’une nouvelle commune, les sénateurs ont approuvé un projet de loi devant consacrer les « Îles Cayemites », dans la Grand’Anse, comme étant une nouvelle subdivision dans la République des comédiens de la politique. L’on se demande comment et pourquoi les parlementaires, en accord avec les présidences (versions 1 et 2 du PHTK), veulent morceler le pays en petites communes ?

Sans aucun débat sur la nécessité géostratégique d’un tel morcellement, les parlementaires foncent et votent… tout en faisant fi du coût financier que l’État aura à faire face, si d’aventure ces zones seraient élevées au rang de communes.

La réalité du pouvoir judiciaire face à celle du Législatif

Dans la hiérarchie des normes, «faire des lois » intervient dans tous les domaines… Et, l’article 111 de la Constitution de 1987 amendée prévoit cette conformité de gestion dans les attributions du Parlement.

De quel droit le Parlement haïtien peut-il donc chercher à questionner le rapport de l’UCREF ?

En dépit des pouvoirs conférés au Parlement, la Constitution de 1987 amendée n’autorise pas à ces membres de ré-enquêter ou de ré-questionner le contenu d’un rapport d’une institution indépendante comme UCREF aurait soumis à la diligence du pouvoir judiciaire.

Ce faisant, le Parlement évolue dans une confusion de compétence tout en se donnant le droit de vouloir re-traiter le dossier UCREF/Jovenel Moïse, un dossier qui est pendant au Cabinet d’instruction dont deux réquisitoires supplétifs en sont déjà rédigés par le Parquet du Tribunal de première instance de Port au Prince face au comportement non-compris du juge Fabien. Et, qu’en est-il de l’arrivée du nouveau commissaire? Aussi bien l’action en récusation du juge Fabien intentée par la partie civile dans ce dossier de blanchiment d’argent ?

Comment devrait-on interpréter le silence du Parlement dans le conflit opposant les citoyens de la commune de l’Arcahaïe Montrouis et la présidence haïtienne ?

Depuis ce fameux décret pris par le président Martels, à la fin de son mandat, sur sa volonté de faire de Montrouis une commune, au même titre que l’Arcahaïe, les tensions montent… et rien n‘est fait pour stopper le naufrage annoncé d’un navire dont le capitaine est en état d’ébriété.

Malheureusement, nous sommes de plus en plus dans l’ embarras étatique où le droit fonctionne dans l’illégalité, au mépris du bon fonctionnement des institutions du pays.

Le Parlement, un bien mal orienté

A regret, nous avons regardé sauter en fumée les intérêts et les élans de changement des constituants de 1987, qui voudraient, en dépit des faiblesses généralement constatées, doter Haïti d’un Code légal de conduite démocratique. En touchant le Parlement, nous nous confinons dans une logique désarmante où l’idéal constitutionnel devrait servir de boussole pour ces aveugles qui veulent à tout prix, toucher la terre ferme, en dépit de la mauvaise direction du vent des intérêts de la nation toute entière.

Ne serait-il pas préférable de demander au peuple ce qu’il pense du rôle ces « parlementaires» ? Ah ! Nous oublions, la Constitution interdit le referendum, mais pas les multiples gouvernements et Premiers ministres de fait, de Jean-Jacques Honorat à Enex Jean-Charles, et un CEP provisoire de vendeurs de conscience, de 1987 à nos jours.

Elco Saint Amand, av.

[« Le Parlement dans la tourmente de ses attributions« , texte original publié dans l’édition du 12 au 19 avril de www.Haiti-Observateur.ca ]

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.