Que penser du dossier de pédophilie de Jean Baptiste Anthony Dumont ?
« Mwen fas a yon veritab dilèm. Mwen paka kont frèm. Mwen paka anpeche lajistis fè travay li. Mwen toujou apresye travay RNDDH, ke mwen fè konfyans. Mwen mande pou lajistis bay jistis a ti pitit fi a, si se vre frèm fè zak sa a. Mwen mande bay frèm Anthony yon ankadreman moral. Mwen pa konnen frèm kòm yon moun ki ka fè yon zak konsa ». (Sénateur Patrice Dumont, Conférence de Presse 24 Février 2017).
Charité oblige, on ne peut pas se réjouir dans le malheur d’un prochain. A entendre Patrice Dumont prononcer les mots cités plus haut ce matin, un sentiment de chagrin m’a envahi. « La responsabilité pénale est personnelle, mais l’infamie et le déshonneur sont familiales. » Le dossier de pédophilie de l’ancien député Jean Baptiste Anthony Dumont doit nous interpeller et nous porter à réfléchir sérieusement sur le devenir de notre patrie Haïti. D’ordinaire, j’ai le verbe facile et les mots ne me manquent jamais quand il s’agit de produire une réflexion. Toutefois, ce soir j’ai longuement hésité avant d’écrire.
J’ai contacté deux personnes de confiance qui sont très proches du RNDDH qui m’ont confirmé avoir visionné la vidéo de la scène d’attouchement. J’ai contacté plusieurs amis Léoganais qui sont des amis personnels du député Dumont, ils sont tous sous le choc. L’ancien député de Léogane est un sexagénaire de bonne famille, un professeur de carrière, un homme modèle et un dignitaire de la Cité d’Anacaona. Personne n’aurait imaginé qu’Anthony Dumont pourrait être impliqué dans une telle action avilissante.
Comment doit-on appréhender cette situation ? En tant qu’éducateur et père de famille, cette affaire m’interpelle. Je me garde de tirer à boulets rouges sur le présumé coupable et la mère de la fillette qui l’a exposée volontairement à cette situation déshonorante. Anthony Dumont n’est pas le premier à commettre une telle infamie et ne sera pas le dernier. Une investigatrice de la DCPJ m’a confié récemment que les cas d’inceste et de viol collectif sont si fréquents ces temps-ci qu’elle se demande si le pays n’est pas sous l’influence diabolique.
La société haïtienne est en train de récolter ce qu’elle a semé durant ces trente dernières années où l’Etat est quasiment effondré. Nous devons pointer du doigt les soit disant autorités morales de ce pays. Nous devons remettre en question l’institution de la famille. Nous devons questionner nos choix dans différentes sphères comme peuple.
Un peuple qui a pu élire Michel Joseph Martelly comme président de la République a bien fait choix de la voie de l’autodestruction. L’affaire de pédophilie d’Anthony Dumont devrait nous interpeller sur le comportement amoral des chefs privilégies en Haïti. Avons-nous jamais questionné le comportement des hommes d’Etat (Sénateurs, députés, juges, grands fonctionnaires) qui s’amusent à amadouer de jeunes hommes et de jeunes femmes vivant dans la précarité à la recherche d’un boulot ?
Avons-nous jamais pris le temps de questionner le manque d’emphase sur l’enseignement du civisme et de la morale dans nos écoles ? Le dossier Anthony Dumont ne se résume pas à une question de moralité et de sexualité, c’est la société même qui est en péril. Comment peut-on être choqué du comportement d’Anthony Dumont quand on applaudit le sacre d’un président inculpé par la justice pour blanchiment d’argent ? Avec quel courage peut-on être offusqué du comportement de l’ancien député Anthony Dumont quand nous refusons de mettre au pied du mur nos leaders religieux qui refusent d’assumer leurs responsabilités ?
Comment peut-on oser lapider Anthony Dumont quand on cautionne la corruption et le trafic d’influence qui sapent les bases de notre démocratie naissante ? Au lieu de s’apitoyer sur le sort d’Anthony Dumont ou de la fillette victime, on devrait bien culpabiliser les autorités morales, politiques, civiles, la société civile et la presse qui, durant ces trois décennies ont livré volontiers le pays à la déliquescence et à l’immoralité sous toutes ces formes. Anthony Dumont est le reflet de millions d’Haïtiens qui vivent dans le déni et qui refusent d’accepter qu’ils sont laids et niais.
« Chers compatriotes, ne soyez pas découragés, il existe encore dans ce pays des hommes debout ! Cette déclaration du sénateur Patrice Dumont concernant le dossier de pédophilie de son grand frère est un signal positif envoyé à la jeunesse haïtienne pour lui dire que ce pays se relèvera! Mais il faut apprendre à bannir l’ivraie du bon grain ! » (Jodany Fortune).
Nous avons choisi de faire l’éloge des dévergondés, des assassins, des kidnappeurs, des trafiquants de cocaïne, des blanchisseurs d’argent et des homosexuels, comment peut-on espérer avoir une société viable ? « Pour que nous ayons un état de droit il faut que tous les secteurs et tous les citoyens respectent et suivent les règles du jeu. »(Moise Garçon).
Etre instruit et éduqué dans un pays comme Haïti est un miracle. Chaque miraculeux haïtien devrait se donner pour mission de se positionner en agent de changement. Nous devons affirmer avec force, courage et détermination que nous avons marre des flatteurs, des flagorneurs et des hommes invertébrés. Chrétien évangélique, je suis interpellé par ce crime.
Mais, je veux inviter tout un chacun à réfléchir sur certains non-dits. Est-ce que les Haïtiens sont au courant que nombre de leaders et de politiciens ayant pignon sur rue sont des mordus de l’occultisme qui font des sacrifices humains pour rayonner ? Nous refusons de dire la vérité aux jeunes. Nous avons une société qui est construite sur le bluff et le faire- semblant. Je suis d’avis qu’une société qui fait fi des valeurs morales et spirituelles est condamnée à vivre des scandales à répétition.
Quand on donne carte blanche à un homme comme Michel Martelly qui se comporte comme un fou furieux pou l pa peye dwa, qui tire à boulets rouges sur des femmes modèles au point de les rabaisser au niveau d’un jouet sexuel, comment peut-on espérer être à l’abri de prédateurs sexuels ? Le Ministère de la Condition Féminine, même par hypocrisie devrait faire sortir une note pour dénoncer la meringue carnavalesque fatras de Michel Martelly. Où sont les intellectuels qui s’étaient mis debout pour supporter Michèle Duvivier Pierre Louis, pourquoi sont-ils silencieux aujourd’hui.
Comme le dit le musicien politicien tristement célèbre Gracia Delva, nous avons une société à l’envers. L’Eternel qui est Dieu m’a gratifié d’une capacité cognitive et perceptive merveilleuse, je ne saurais ne pas utiliser ses talents dans l’intérêt des défavorisés, des vilipendés et des délaissés. Je me pose à nouveau la question :eske tout Ayisyen se moun ?
J’encourage ceux et celles qui sont lucides et qui ont une certaine lumière à s’armer de courage pour dénoncer l’inacceptable dans cette société de complaisance qu’est la société haïtienne. Moun pa ka manje, lopital pa ka bay swen, pwofesè lekòl ak doktè pa ka touche, epi gouvènman ap depanse milyon nan fè kanaval sou fatra ak mizè, epi nou sezi lè grandèt ap konpote tèt yo an brennjenn. La justice élève une nation selon les saintes écritures. Nous souhaitons que la justice puisse suivre son cours dans ce dossier de pédophilie.
Que Dieu ait pitié d’Anthony Nazaire. Qu’il donne de la force aux proches de la fillette pour affronter ces moments combien difficiles. J’encourage le Sénateur Patrice Dumont à rejoindre l’ancien commissaire du gouvernement Jean Renel Senatus dans son plaidoyer en faveur de l’agencement de la famille en Haïti. Une pensée spéciale pour tous ces enfants qui subissent des torts et abus de la part de proches parents et d’adultes inconscients et ensorcelés.
Kerlens Tilus 02/24/2017


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