Au Liban, la mobilisation contre le pouvoir ne faiblit pas

0
850

Ce rejet du « système » et de ceux qui l’incarnent se double d’une lassitude face à un pays en déshérence : le chômage des jeunes y avoisine les 30%…Vatican News à propos du Liban.

Malgré l’annonce de mesures économiques exceptionnelles par le Premier ministre Saad Hariri, la mobilisation des Libanais ne donne aucun signe de fléchissement ou de recul. D’autres manifestations sont d’ailleurs prévues ces prochaines heures.

Mercredi 23 octobre 2019 ((rezonodwes.com))– Des années de corruption, de clientélisme, d’incurie auront poussé à bout une population qui tente de se réunir aujourd’hui autour d’un ras-le bol inédit à bien des égards, ainsi que le constate Joseph Bahout, professeur à Sciences Po et chercheur associé à la fondation Carnegie pour la paix internationale (programme Moyen-Orient).

Entretien réalisé par Manuella Affejee – Vatican News

Promesse d’un budget 2020 sans impôts supplémentaires, baisse de 50% des salaires du président, des ministres et des députés, mesures contre la corruption, nouvelles taxes sur les banques, refonte du système de l’électricité: le plan de réformes de Saad Hariri était aussi drastique qu’ambitieux… mais il n’a pas suffi à convaincre les Libanais, qui persistent à réclamer la démission du gouvernement et l’instauration d’une équipe de transition, qui soit composée d’experts… et non de politiques. Preuve, s’il en était besoin, du rejet profond, par la société libanaise, de ses élites dirigeantes, de quelque bord qu’elles soient.

Ce rejet du système et de ceux qui l’incarnent se double d’une lassitude face à un pays en déshérence : le chômage des jeunes y avoisine les 30%, les services publics sont inexistants, les pénuries d’eau et d’électricité rythment depuis longtemps les journées des Libanais, sans parler du coût exorbitant de la vie. Autant de réalités quotidiennes qui détonnent avec l’image traditionnellement admise d’un pays développé et d’apparence opulente.

A l’aune d’un tel contexte, l’on comprend que la décision du gouvernement de taxer les appels effectués sur la messagerie instantanée WhatsApp ait mis le feu aux poudres d’un baril saturé depuis bien longtemps.

Restaurer l’État dans ses prérogatives

Que faire alors pour apaiser la colère et restaurer la légitimité d’un État inexistant ? Selon Joseph Bahout, il faut d’abord travailler la question de la représentativité, repenser un système électoral «piégé», qui n’a jamais véritablement réussi à renouveler sa classe politique ; ensuite, «remettre un semblant d’autorité morale» dans les affaires publiques, marquées du sceau d’une corruption pratiquée au vu et au su de tous ; enfin, rétablir l’État dans ses attributions propres, lesquelles inclut sa capacité d’assurer les services de base, mais surtout de garantir la sécurité du territoire et de la population, ce qu’on appelle en d’autres termes «le monopole de la violence légitime».

Au Liban, cela implique de mettre fin à la «coexistence, devenue insupportable pour beaucoup, entre les forces armées libanaises, légales et légitimes, et la force (…) probablement plus puissante (…) du Hezbollah, de son arsenal militaire et de sa politique étrangère devenue complètement autonome de celle de l’État».

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.