La Conférence des Pasteurs écrit aux Sénateurs haïtiens

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Jeudi 12 septembre 2019 ((rezonodwes.com))–

De : La Conférence Des Pasteurs Haïtiens. (COPAH)

Aux : Honorables Sénateurs de la République.

        Honorables Sénateurs

        Pères conscrits de la Nation.

La Conférence des Pasteurs Haïtiens (COPAH) vous adresse cette correspondance à ce moment important dans l’histoire du Pays ou l’avenir de la nation est entre vos mains, juste pour vous rappeler qu’il est grand temps de comprendre que la constitution haïtienne vous confie le destin du peuple, malheureusement vous avez souvent passé outre de vos obligations constitutionnelles en répétant incessamment que le parlement est une assemblée éminemment politique.

Chers Sénateurs, où est cette honorabilité que vous êtes toujours fiers de jouir? N’est-ce pas maintenant un moment extrêmement important pour vous en tant que Pères Circonscrits de la Nation de poser un acte patriotique et salutaire dans le souci de rejoindre les multiples efforts entrepris par le peuple Haïtien pour résoudre la crise dans laquelle le pays se trouve confronté il y a plus de 14 mois. Depuis l’arrivée de la 50ème législature, le peuple haïtien a assisté à des spectacles horribles et de mauvais goûts mettant en phase des législateurs (Députés et Sénateurs) liés à l’exécutif sous le couvert de partage et de séparation de postes et de biens de l’état au détriment de la population vulnérable, d’où l’appauvrissement de la classe moyenne et l’émergence d’une nouvelle classe de riche.

C’est le moment de dire Non à ce régime corrompu et sanguinaire dont les hauts fonctionnaires de l’État et certains parlementaires proches et même très proches de l’exécutif sont éclaboussés soient dans des rapports administratifs contre la corruption, soient dans des actes de kidnapping ou de massacres orchestrés au sein de la population de certains bidonvilles. C’est le moment plus que jamais d’avoir au moins une pensée positive pour celles et ceux qui vous ont délégués leur pouvoir pour l’exercer en leur nom et pour eux. C’est une exigence morale et constitutionnelle à laquelle vous ne devez pas vous dérober.

En effet, certains d’entre vous, dont le mandat constitutionnel arrive à terme le 2ème lundi de Janvier 2020, Pourtant ces honorables sénateurs pour continuer à jouir de certains privilèges attachés à la fonction parlementaire, sont en train de négocier avec le pouvoir exécutif corrompu la prolongation de leur mandat. Vous n’êtes pas sans savoir que cette législature est très mal vue par la population, elle est très décriée, et ne jouit pas de la sympathie populaire. Le bilan des actions des deux (2) chambres est très maigre et très faible mis à part vos avantages, vos per diem, vos privilèges…

Cette législature a passé outre sa mission de contrôle de l’exécutif, ils sont considérés comme des gibiers attachés à la table du pouvoir et qui se taisent quand les miettes tombent. Il est inutile de souligner qu’au cours de cette législature, vous avez été très peu productifs et que les rares lois votées à la chambre haute ne visaient pas nécessairement l’amélioration substantielle des conditions de vie de vos mandants. Cela n’a vraisemblablement pas été la priorité des gens sans chromosomes, sans grandeur d’âme, sans valeur morale, sans conscience nationale qui ne faisaient que de comploter pour des miettes. Et le pouvoir en a bien compris et en a profité pour le malheur de notre pays.

Après les évènements violents des 6 et 7 Juillet 2018, cela fait exactement 14 mois, l’exécutif se montre incompétent et ne fait que de Monnayer des parlementaires, des sbires, des mercenaires, des diplomates des organisations régionales et des pays dit amis d’Haïti afin de rester au pouvoir pendant que la population dans une voix crie : JUSTICE! Halte! C’en est assez! Les dirigeants de l’état sont considérés par plus d’un comme étant des jouisseurs et des prédateurs qui ne font qu’appauvrir les masses défavorisées des bidonvilles et de la paysannerie. À l’approche de la réouverture des classes, les familles sont appauvries et sans secours pendant que le gaspillage et le fraude s’étalent même au niveau du chef de l’État et de ses entourages. Ils n’ont tiré aucune leçon des scandales d’hier et d’aujourd’hui. Ils veulent en finir complètement avec le pays. Cependant le peuple Haïtien ne continuera pas toujours à vivre enroulé dans la farine comme des imbéciles zombis.  

La situation socio-économique du pays se détériore considérablement. L’inflation atteint déjà aujourd’hui la barre de 19%  et tend à grimper d’avantage. Le niveau de vie de la population se dégrade dangereusement. Le pouvoir d’achat des Haïtiens est en baisse constante. Déjà 3,6 millions d’Haïtiens vivent en situation d’insécurité alimentaire, selon la Coordination Nationale pour la Sécurité Alimentaire (CNSA). La gourde continue de se déprécier par rapport au dollar américain alors que la production nationale est en chute libre. Nous importons pour plus de 5 milliards de dollars Américain par an et nous exportons pour moins d’un milliard. La situation est exceptionnellement difficile. La majorité de nos compatriotes se résigne à vivre de la débrouille.

La situation sécuritaire du pays ne cesse de se détériorer. Les gangs armés prolifèrent à travers le pays. Dans les grandes villes aussi bien que dans l’arrière-pays, ils tuent, volent, violent en toute impunité. L’émergence de ces gangs armés, l’impunité et la protection dont ils jouissent au plus haut niveau de l’état semblent participer d’une stratégie globale visant à réprimer la population pour qu’elle ne se révolte pas contre cette entreprise criminelle et d’injustice dont elle est victime.

Dans la plus grande indifférence de la plupart d’entre vous, Honorables Sénateurs, plusieurs massacres qualifiés d’ailleurs de  « massacres d’État » tant par des organismes de défense des droits humains nationaux que par les Nations Unies ont été commis à La Saline, à Carrefour Feuilles, à Nan Tokyo, à Cité Soleil et à Trou du Nord. La responsabilité de ces massacres est imputée aux gangs œuvrant à la solde du pouvoir exécutif et à certains dignitaires du régime. Les gangs armés qui opèrent dans  le pays ne bénéficient pas seulement du soutien exclusif de l’exécutif. Ils ont des alliés dans le milieu d’affaires, au niveau du pouvoir exécutif, au niveau du pouvoir législatif et au sein de l’institution policière.

Il est vrai que certains d’entre vous, ont dès le début de cette législature, pris position en faveur de la population, d’autres: au contraire, se sont toujours associés au pouvoir exécutif qu’ils sont appelés à contrôler pour, dit-on, satisfaire certains intérêts personnels. L’intérêt de vos mandants n’a donc pas été pris en compte. C’est dommage! Et nous notons que par ce comportement, vous n’avez guère attiré la sympathie de la population, puisque vous vous êtes surtout comportés en Sénateurs présidentiels au service de l’exécutif que des Sénateurs de la République au service du peuple.

Depuis plus d’un an, le pays est à l’arrêt. Il n’est ni dirigé, ni gouverné. Les institutions républicaines ne jouent pas véritablement leur rôle constitutionnel. L’État ne fournit pas les services de base dont la population à immensément besoin pour assurer son quotidien. Les droits socio-économiques des Haïtiens, les lois de la République et la constitution du pays, sont violés constamment sans que vous parlementaires qui les représentez directement, n’interveniez pour redresser la situation. Le président de la république dont l’article 136 de la constitution fait le garant du bon fonctionnement des institutions du pays, a failli à sa mission. En plus de s’être isolé, il s’est révélé incompétent et incapable à diriger le pays. Il en résulte que, la majorité de la population souffre énormément de cette absence prononcée de leadership avisé et capable de satisfaire à ses besoins primaires.

En outre son administration et lui-même sont éclaboussés par des scandales de corruption. Le rapport d’audit de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) sur la gestion du fond Petrocaribe qui indexe le président de la république, l’affaire des 7 mercenaires venus des États-Unis, arrêtés par la police puis libérés dans des conditions obscures avec la complicité de son ministre de la justice et d’autres collaborateurs, l’usurpation du titre d’ingénieur, sont autant d’éléments accablants qui font que le président ne peut plus exercer la fonction présidentielle. En fait, un chef d’État doit être au-dessus de tout soupçon. Au-delà de la crise politique qu’il s’est révélé incompétent à juguler, le président fait face aujourd’hui, à un problème d’ordre moral et éthique. Quelqu’un qui est accusé par le plus grand tribunal administratif de son pays ne doit prétendre pouvoir diriger. Il doit inévitablement se mettre disponible pour être entendu par la justice. Il y va de votre avenir et de votre carrière politique.

En réalité, Vous pouvez encore sauver l’honneur et le prestige du Sénat, considérer à raison comme un des remparts de la démocratie. En votre qualité de parlementaires, vous êtes les Co-dépositaires de la souveraineté nationale. Sachez aussi que la vraie souveraineté réside dans le peuple qui vous a délégué une partie de ses pouvoirs pour le représenter. (Article 58 de la Constitution). Et le peuple souverain a déjà exprimé de manière claire son rejet et sa désapprobation du président Jovenel Moïse à travers de nombreux mouvements de protestations (grèves, sit-in et manifestations) pour l’avoir trahi. Le souverain a tout essayé. Et malgré toutes les manœuvres du pouvoir, le peuple n’a pas baissé les bras.

Pour toutes ces raisons, au lieu de vous engager dans un processus incertain de ratification de premier ministre qui n’a pas obtenu décharge comme comptable de denier publique, qui n’a pas fait sa déclaration de patrimoine et arrive avec un gouvernement anti-procès Petrocaribe pour plaire au président et à une frange puissante de la communauté internationale, ce qui va sans doute aggraver davantage la crise. Puisque le gouvernement ne réponde pas aux prescrits de la loi et le président Jovenel Moise s’entête à aller de l’avant dans le but de s’enrichir. Face à la tentation, La chambre des Députés vient de ratifier la politique générale du gouvernement de Fritz William Michel sans surprise, les hommes qui ont reçu le vote du peuple s’en fichent complètement de la revendication populaire, ils ont raté 2 belles opportunités qui pourraient redorer leurs blasons, celle de mise en accusation du Président, et aussi celle d’accorder un vote de censure à la politique générale du gouvernement. Ils ont reçu leur part du gâteau, au diable le peuple. Cet inconnu de la politique, s’il arrive à la primature s’unira au président J.M pour plonger le pays dans l’abîme.

Nous: Ministres de Dieu, mais citoyens Haïtiens avant tout, vous exhortons au nom de Dieu et au nom de la patrie à profiter de cette opportunité pour dire non aux dérives du Président. Honorables Sénateurs, vous êtes le dernier espoir du peuple, vous pouvez éviter un éclatement sauvage, barbare et sans précédent à la nation. Saisissez l’occasion de faire valoir vos droits de Sénateurs de la République, le pays en a besoin de ce dernier effort aujourd’hui même. Renvoyez un premier ministre inconstitutionnel c’est dire au Président Jovenel Moise et qu’il est grand temps de démissionner et de se mettre au service de la justice. C’est le temps pour vous de choisir d’accompagner le peuple dans ses revendications légitimes au lieu de se ranger au côté d’une administration gangrenée par la corruption. Renvoyer le gouvernement malgré les promesses d’argent, de sacs de riz, de motocyclettes et de pressions d’ambassades étrangères. Pas de chantage, pas de marchandage. Le pays avant tout messieurs les Sénateurs.

Ce sera votre contribution à un dénouement heureux de la grave crise politique qui perdure depuis déjà plus d’un an et de 2 mois dans le pays. C’est aussi votre dernière chance de poser un acte utile qui pourrait vous attirer, non la foudre da la population, mais un peu de sympathie et de respect. Vous jouerez ainsi votre rôle constitutionnel dans ce contexte historique particulier et vous vous assurerez d’entrer la tête haute dans l’histoire.

Recevez honorables Sénateurs de la République, nos salutations patriotiques en Jésus-Christ.

CC : Organisations de la Société Civile.

    Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire. (CSPJ)

    Office de Protection des Citoyens. (OPC)

    Organisations des Droits Humains.

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Rév Abraham Loreston                                                             Rév Dorvila Normil

Coordonnateur National.                                                               Secrétaire Exécutif Adj.

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