31 décembre 2025
7 février : le Conseil présidentiel de transition ou l’art haïtien de rester après avoir juré de partir
Actualités Politique

7 février : le Conseil présidentiel de transition ou l’art haïtien de rester après avoir juré de partir

Par Reynoldson Mompoint 

Port-au-Prince, le le 31 décembre 2025

Ils l’avaient juré la main sur le micro, regard grave et voix solennelle : le 7 février, nous partirons. Ils l’ont répété sur les plateaux, martelé dans les communiqués, servi à une opinion publique épuisée comme une promesse de décence minimale. Mais en Haïti, la parole officielle a une durée de vie plus courte qu’un communiqué d’urgence.

À l’approche de l’échéance, le Conseil présidentiel de transition (CPT) change de disque, baisse la lumière et manœuvre en catimini. Coup de théâtre. Ceux qui annonçaient leur départ préparent désormais leur maintien. Pas tous, certes — hypocrisie oblige — mais une fraction “sélectionnée” du pouvoir, comme on choisit qui aura droit à la continuité de l’État et qui retournera à l’anonymat.

Deux scénarios ont déjà été couchés sur la table :

– cinq conseillers qui resteraient,

– ou, plus sobrement, trois. Le

pouvoir se négocie désormais en chiffres, comme un marché de gros.

Quand l’inculpation n’empêche plus l’ambition

Plus grave encore : les trois conseillers présidentiels inculpés pour corruption — oui, inculpés — affichent sans gêne leur volonté de rester au pouvoir après le 7 février.

En Haïti, l’inculpation n’est plus un obstacle politique, mais une simple ligne biographique. Elle ne disqualifie pas, elle n’embarrasse plus. Elle s’intègre. Ce n’est plus l’État de droit qui chancelle, c’est la notion même de honte publique.

L’accord du 3 avril : violé, puis invoqué à moitié

Un diplomate confie à Métronome que le CPT a soumis ces scénarios à la communauté internationale. Traduction : on teste jusqu’où l’impunité peut aller. Pour l’instant, la réponse est nette. Les partenaires internationaux se disent fermes : au regard de l’accord du 3 avril, que le CPT a lui-même piétiné, le Conseil doit partir le 7 février.

Ironie cruelle : ceux qui ont violé l’accord tentent aujourd’hui d’en réinterpréter les ruines pour rester aux commandes. C’est la politique haïtienne dans sa version la plus cynique : on détruit la règle, puis on négocie les décombres.

Un séisme politique, pas une transition

Jean Corvington ne mâche pas ses mots : « Le CPT est un véritable séisme pour le pays. » Un séisme, oui, mais sans reconstruction. Un tremblement qui fissure la légitimité, affaiblit l’État et normalise l’idée que le pouvoir est une propriété privée, négociable entre initiés, inaccessible au peuple.

Le CPT devait être une transition. Il est devenu une tentation de confiscation. Il devait préparer la sortie de crise. Il organise l’enlisement. Il devait rassurer. Il inquiète, divise et discrédite.

7 février : une date, un test

Le 7 février n’est pas qu’une date symbolique. C’est un test de crédibilité nationale et internationale. Soit la parole donnée a encore un sens, soit elle n’est plus qu’un décor sonore pour accompagner la survie d’un pouvoir sans mandat populaire.

À force de rester après avoir promis de partir, le CPT ne gouverne plus : il s’accroche. Et l’histoire haïtienne est formelle sur ce point : les pouvoirs qui s’accrochent finissent toujours par tomber, mais jamais sans dégâts.

La question n’est donc plus qui restera, mais combien le pays devra encore payer pour ce refus obstiné de respecter une date, un accord, et un minimum de dignité politique.

Reynoldson MOMPOINT 

mompointreynoldson@gmail.com

WhatsApp +50937186284

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.