23 septembre 2025
Haïti : Washington, Nairobi et Port-au-Prince réclament une nouvelle force internationale
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Haïti : Washington, Nairobi et Port-au-Prince réclament une nouvelle force internationale

Le message est clair : sans un engagement international accru, Haïti risque de continuer sa plongée dans l’abîme. Lundi à New York, le Kenya, les États-Unis et les autorités haïtiennes ont uni leurs voix pour réclamer la création d’une force internationale plus « robuste » que la mission actuelle, incapable, faute de moyens, de briser l’emprise des gangs sur le pays.

« Lorsque nous sommes arrivés en Haïti, l’aéroport était entouré par les gangs. Aujourd’hui, il fonctionne parfaitement », a affirmé William Ruto, le président du Kenya, qui dirige la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMS) en Haïti.

Invité à une réunion sur la situation dans le pays, M. Ruto a toutefois présenté un bilan contrasté de cette force non-onusienne déployée il y a 15 mois avec l’aval du Conseil de sécurité des Nations Unies. Ce dernier devrait décider très prochainement de la suite à donner à l’engagement international dans cette nations des Caraïbes ravagée par la faim, les déplacements forcés et la violence sexuelle, alors que le mandat de la MMS arrive à expiration dans les prochains jours.

Au nombre des succès de la force, M. Ruto a également mentionné la sécurisation du palais présidentiel de Port-au-Prince et la réouverture des voies d’accès à la capitale haïtienne auparavant bloquées par les gangs. Mais ces derniers occupent toujours 85 % de la ville et mettent régulièrement à feu et à sang d’autres parties du pays.

Le chef de l’État kényan a reconnu que l’action de MMS avait été minée par le manque de moyens matériels, logistiques et financiers. « Nous n’opérons qu’à 40 % de nos capacités », a-t-il indiqué.

Sur les 2.500 policiers dont la force devait initialement être dotée, moins de 1.000 sont aujourd’hui déployés. A cela s’ajoutent les véhicules défectueux et le manque de soutien international. « On ne peut pas dépendre de la charité. Les financements doivent être prévisibles », a insisté M. Ruto. Pour lui, seule une mission dotée d’objectifs clairs, de ressources garanties et d’un appui logistique solide permettrait de combler ces carences structurelles.

En Haïti, des personnes transportant leurs biens fuient les violences dans la quasi-obscurité.

© UNFPA

En Haïti, des personnes transportant leurs biens fuient les violences dans la quasi-obscurité.

Washington veut une nouvelle force

Ce constat est partagé par les États-Unis, qui appellent désormais à franchir un cap. « Haïti est à la croisée des chemins », a averti Christopher Landau, sous-secrétaire d’État américain, lors de la réunion. 

Washington plaide pour transformer la MSS en une Force de répression des gangs (FRG) de 5.500 membres, mandatée par l’ONU au titre du Chapitre VII de la charte de l’organisation, qui permet au Conseil de sécurité d’autoriser le recours à la force militaire en cas de menace contre la paix.

Cette force, cinq fois « plus robuste » que l’actuelle, serait épaulée par la création d’un Bureau d’appui des Nations Unies en Haïti et aurait pour mandat, selon M.Landau, de « cibler les gangs, restaurer la sécurité et sécuriser les infrastructures essentielles ».

« C’est maintenant qu’il faut agir. Le peuple haïtien ne peut pas attendre », a-t-il insisté, demandant à tous les États membres de soutenir un projet de résolution allant en ce sens, soumis au Conseil par son pays et le Panama.

Port-au-Prince sonne l’alarme

Pour les autorités haïtiennes, le déploiement d’une nouvelle force va dans le bon sens, alors que la police nationale et les forces armées du pays, sous-équipées et en sous-effectifs, ne peuvent rétablir l’ordre à elles seules.

« Haïti ne peut et ne pourra faire face seule à cette crise sécuritaire alimentée par des réseaux criminels transnationaux », a affirmé durant la réunion Laurent Saint-Cyr, président du Conseil présidentiel de transition du pays. Il a lancé un appel « solennel » pour que la fin du mandat de la MSS, le 2 octobre, ne se traduise pas par un vide sécuritaire. « Une interruption serait fatale pour Haïti », a-t-il averti.

Derrière ces déclarations concordantes, une même exigence : éviter que les avancées fragiles ne soient réduites à néant et donner à Haïti les moyens de se libérer de l’étau des gangs. Le compte à rebours est enclenché, et l’heure, préviennent Washington, Nairobi et Port-au-Prince, « n’est plus aux promesses mais à l’action ».

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