Trente-neuf ans après la chute de Jean-Claude Duvalier, une question s’impose : que reste-t-il réellement du mouvement de 1986 ?
La réponse est brutale. Ce mouvement, qui se voulait porteur d’espérance et de renouveau démocratique, n’a laissé derrière lui que douleur et désolation. Le pays est aujourd’hui à genoux, déchiré par les divisions et pris en otage par des gangs armés qui contrôlent la vie quotidienne. L’État, réduit à une simple façade, n’exerce plus son autorité. Ses institutions ne subsistent que par le nom, vidées de leur substance.
La démobilisation de l’armée, jadis présentée comme une avancée démocratique, a ouvert un boulevard à l’insécurité. La privatisation des grandes entreprises publiques, elle, a enrichi quelques privilégiés tout en affaiblissant la nation. Ainsi, ce qui devait être une libération s’est transformé en dépossession.
Au bout du compte, qui a réellement bénéficié du mouvement de 1986 ? Quelques politiciens, certains journalistes, une frange de l’oligarchie économique. Le peuple, lui, a été laissé sur le bas-côté de l’histoire.
C’est ce peuple qui, aujourd’hui, en vient à regretter la dictature. Car à quoi sert une démocratie où l’on ne peut même pas marcher librement dans son propre pays ? À quoi sert une liberté d’expression qui expose les journalistes à l’exil, au silence forcé, parfois même à la mort ?
La démocratie qu’on nous a offerte n’a été qu’un leurre. Une illusion entretenue par de beaux discours, mais qui n’a jamais nourri ni protégé la majorité. Trente-neuf ans après, la promesse de 1986 ressemble moins à une conquête qu’à une trahison.
Alors, posons la question sans détour : de quelle démocratie nous parle-t-on encore ?
Alceus Dilson
Communicologue, juriste