Funérailles de Monseigneur Joseph Willy Romélus à Jérémie
Le diocèse de Jérémie et toute l’Église catholique d’Haïti ont rendu, jeudi matin, un dernier hommage à Monseigneur Joseph Willy Romélus, évêque émérite décédé le 12 août dernier à Arniquet, à l’âge de 94 ans.
La cérémonie funéraire s’est tenue au Sanctuaire Notre-Dame de la Médaille Miraculeuse de Jérémie, en présence d’une importante délégation ecclésiale, de responsables politiques et administratifs, ainsi que de nombreux fidèles venus saluer la mémoire d’un prélat considéré comme l’un des grands témoins de la mission pastorale au service des plus pauvres.
La veille, une veillée de prière avait rassemblé la communauté cathédrale Saint-Louis de Jérémie.
Nommé évêque en 1972, puis confirmé à la tête du diocèse de Jérémie jusqu’à sa démission en 2010 pour raison d’âge, Mgr Romélus fut reconnu comme un pasteur engagé, défenseur inlassable de la dignité humaine et de la justice sociale. Ses prises de position durant les périodes de crise politique, notamment sous la dictature et les transitions démocratiques, lui valurent le respect autant que l’hostilité de certains acteurs. Son épiscopat s’inscrivait dans la tradition d’une Église haïtienne attentive aux défis de pauvreté structurelle, d’exclusion et de gouvernance fragile.
Au-delà de la solennité liturgique, ces funérailles marquent un temps de mémoire collective et de réévaluation critique du rôle de l’Église dans la société haïtienne actuelle. Si l’héritage spirituel de Mgr Romélus inspire une fidélité à l’idéal évangélique de justice et de solidarité, il pose également la question du rapport de l’institution catholique aux crises actuelles marquées par la violence, la corruption et la désagrégation de l’État.
Le témoignage du défunt évêque apparaît alors comme une interpellation adressée à ses successeurs : comment maintenir une voix prophétique dans un espace public dominé par la peur et la perte de repères ?
En lui rendant des funérailles nationales, l’Église d’Haïti a consacré l’image d’un « pasteur au milieu de son peuple », pour reprendre les mots de la Conférence épiscopale. Mais l’écho de ce départ dépasse la sphère religieuse : il rappelle que la figure de l’évêque Romélus, profondément enracinée dans les réalités sociales de Jérémie, s’inscrivait dans une quête plus large de libération et de dignité, une quête encore inachevée dans l’Haïti d’aujourd’hui.

