25 octobre 2025
Haïti face à une deuxième dette de l’indépendance
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Haïti face à une deuxième dette de l’indépendance

L’histoire bégaie, et elle le fait toujours aux dépens des faibles. En 1825, Haïti s’est vue imposer par la France une « dette de l’indépendance » qui a saigné le pays pendant plus d’un siècle. En 2025, un siècle plus tard, un autre contrat — signé dans l’ombre — menace notre souveraineté : un accord de 10 ans avec Erik Prince, fondateur controversé de Blackwater, pour « rétablir la sécurité » et… collecter nos impôts aux frontières.

La comparaison n’est pas exagérée. Confier la collecte fiscale et la protection des frontières à une entreprise militaire privée étrangère, c’est abdiquer deux piliers fondamentaux de l’État : sa sécurité et sa capacité à lever l’impôt. C’est remettre la clé de notre maison à un locataire armé jusqu’aux dents, qui décidera lui-même du prix du loyer.

Un contrat d’asservissement déguisé
Signé par neuf conseillers présidentiels, ce contrat engage Haïti pour une décennie sans qu’aucune évaluation publique, débat parlementaire ou consultation citoyenne n’ait eu lieu. Tout y est flou : les montants, les modalités de contrôle, les conditions de sortie. Mais une chose est claire : en prolongeant l’insécurité, on prolonge aussi la nécessité de la présence de Vectus Global, la société d’Erik Prince.
Ce qui devrait être temporaire risque de devenir structurel : dix ans de dépendance sécuritaire et fiscale, dix ans de privation d’initiative nationale, dix ans où chaque gourde collectée aux frontières pourrait passer par les mains d’intérêts étrangers avant d’atteindre notre budget.

Une élite silencieuse, une société endormie
Où sont passées nos universités ?
Où est la voix du secteur évangélique ?
Où est la classe intellectuelle ?
La réponse glace : le silence. Comme si nous avions collectivement accepté que notre pays ne puisse plus se sauver par lui-même. Ce mutisme est plus dangereux encore que le contrat lui-même, car il ouvre la porte à toutes les capitulations futures.
Résister avant qu’il ne soit trop tard
La sécurité d’un peuple ne se privatise pas, elle se construit par la formation, le renforcement et l’équipement de ses propres forces nationales. La fiscalité ne se délègue pas, elle se modernise et s’assainit par des réformes courageuses et une lutte contre la corruption.
Signer avec Erik Prince, c’est inscrire noir sur blanc que nous avons cessé de croire en nous-mêmes.
Refuser ce contrat, c’est dire que, malgré la misère et la violence, nous croyons encore à un État haïtien debout, souverain, maître de ses frontières et de ses impôts.

En 1825, nous n’avions pas le choix. En 2025, nous l’avons encore. Pour combien de temps ?

Alceus Dilson : Communicologue, Juriste.
Email :Alceusdominique@gmail.com

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