8 octobre 2025
Parquet de Port-au-Prince sous tension : L’OCNH demande une enquête urgente
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Parquet de Port-au-Prince sous tension : L’OCNH demande une enquête urgente

NOTE DE PRÉOCCUPATION DE L’OCNH CONCERNANT LES CONFLITS AU PARQUET DE PORT-AU-PRINCE

En sa qualité d’institution de défense des droits humains et soucieuse de la bonne gouvernance judiciaire, l’Organisation des Citoyens pour une Nouvelle Haïti-OCNH exprime ses vives préoccupations face au dysfonctionnement du parquet de Port-au-Prince. Cette situation, qui perdure depuis plusieurs semaines, fait suite à de nombreuses dénonciations d’avocats du barreau de Port-au-Prince à l’encontre du chef du parquet, Me Frantz Monclaire.

L’OCNH tient à rappeler au Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique (MJSP) que cette crise a un impact considérable sur les justiciables et le fonctionnement de l’ensemble du système judiciaire dans cette juridiction, désignée comme « juridiction modèle » pour la création de pôles judiciaires.

Au cours de leurs mouvements de protestation, les avocats ont formulé de nombreuses allégations et émis des soupçons de corruption visant le chef du parquet. De son côté, le commissaire du gouvernement, Me Frantz Monclaire, réfute ces dénonciations. Les tensions entre les deux parties ne cessent de croître, alimentées par des déclarations publiques et des confrontations médiatisées. Soutenus par une partie de l’opinion publique, les avocats réclament le départ du commissaire du gouvernement, tandis que Me Monclaire, sous pression, tente de défendre son intégrité et se montre déterminé à rester à la tête du parquet.

Au nom du principe de vérité et conformément aux dispositions des articles 65 et 66 de la loi portant statut de la magistrature, du décret du 30 mars 1984 visant à renforcer l’État de droit en Haïti en promouvant une justice efficace et transparente, ainsi qu’au décret du 4 mai 2016 portant réorganisation du ministère de la Justice et de la Sécurité publique, l’OCNH attire l’attention du ministre de la Justice et de la sécurité publique, le Dr Patrick Pélissier, sur la nécessité d’agir.

La lecture combinée des articles 65 et 66 de la loi sur le statut de la magistrature confère au ministre de la Justice et de la sécurité publique le pouvoir explicite de prendre des sanctions appropriées en cas de manquement d’un officier du ministère public à ses obligations, y compris en matière de probité et d’éthique. Dans une situation aussi grave que celle affectant actuellement le parquet de Port-au-Prince, où des accusations de corruption visant le Commissaire du gouvernement paralysent le fonctionnement du tribunal et sapent la confiance du public, le silence ou l’inaction du ministre constituerait non seulement une abstention politique, mais aussi une carence administrative engageant la responsabilité de l’État. 

En pareil circonstance, l’existence de dénonciations publiques constitue un élément déclencheur suffisant pour engager une procédure disciplinaire formelle ou, à tout le moins, une suspension administrative à titre conservatoire, dans l’attente d’une enquête complète. Le ministre, garant de l’ordre hiérarchique structurel du parquet, ne saurait rester passif sans contrevenir à ses obligations de supervision, telles que redéfinies et renforcées par le décret du 4 mai 2016 portant réorganisation du ministère de la Justice et de la sécurité publique (MJSP), qui insiste sur les responsabilités du ministère en matière de bonne gouvernance judiciaire. 

Le devoir d’agir du ministre découle directement d’un mandat légal en tant que garant de la continuité, de la crédibilité et de la moralité du service public de la justice. Il est donc impératif qu’il ordonne à l’inspection judiciaire du ministère, conformément au décret du 4 mai 2016 et à la loi portant statut de la magistrature, d’instruire ce dossier. Pour rappel, l’inspection judiciaire a pour rôle de vérifier la conformité des actes et des décisions avec la loi, de détecter les irrégularités et les dysfonctionnements, et de formuler des recommandations pour améliorer le fonctionnement du système judiciaire.

Dans le cas présent, l’inspection judiciaire du MJSP pourrait procéder à une enquête administrative sur les faits dénoncés afin d’établir s’il existe des éléments tangibles de mauvaise conduite ou de pratiques illicites. Cette instruction permettrait non seulement de documenter objectivement les soupçons de corruption ou de pratiques illicites, mais aussi de garantir le respect des droits de la défense du commissaire du gouvernement. L’enquête de l’Inspection judiciaire est ainsi un levier essentiel pour prendre une décision ministérielle motivée et légitime, conforme à l’exigence de transparence prévue par l’article 66 de la loi portant statut de la magistrature.

Au-delà de la légalité formelle, l’intervention du ministre dans ce contexte est un impératif démocratique et institutionnel visant à restaurer la confiance dans le système judiciaire. Il ne s’agit pas seulement de sanctionner ou de réaffirmer une autorité hiérarchique, mais de démontrer que l’État haïtien est capable, par le biais de ses institutions, de se prémunir contre les abus et d’assurer la reddition des comptes, y compris au sein de ses propres structures. Une action claire, motivée et transparente de la part du ministre permettrait non seulement de désamorcer la crise judiciaire persistante, mais également d’envoyer un signal fort en faveur de la lutte contre l’impunité et du respect de l’intérêt général.

L’OCNH exhorte le ministère de la Justice à faire tout son possible pour restaurer la confiance du public dans le système judiciaire haïtien en intervenant dans ce dossier.

Fait à Port-au-Prince, le 04 août 2025.

Me. Camille OCCIUS

Directeur ExécutifMe Camille OCCIUS:

Directeur Exécutif de l’OCNH ;

Défenseur des Droits Humains ;Email : camilleoccius0@gmail.com ;

#4, Delmas 60, Musseau, Port-au-Prince, Haïti ;

Tel : +509 2943 23 23 / 3628 81 42

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