Par Reynoldson MOMPOINT
Port-au-Prince, le 14 juillet 2025
Il n’aura fallu que quelques semaines pour que les illusions s’effondrent. L’espoir populaire a été caviardé par un spectacle indigeste où la confusion règne en maître et où chaque geste du Conseil Présidentiel de Transition semble dicté par une volonté sourde de se tirer une balle dans le pied. Si l’Haïtien cherche un navire en perdition, qu’il regarde au sommet de l’État.
D’abord, parlons de l’amateurisme méticuleusement orchestré qui entoure les délibérations du CPT. On se croirait dans un théâtre d’ombres où les acteurs improvisent sans texte, sans conviction, sans vision. Les réunions sont bavardes, les communiqués fuyants, les décisions, quand elles arrivent, tiennent plus du réflexe de panique que d’un quelconque calcul politique. On administre le provisoire comme si c’était un héritage royal.
La politique de vitrine du CPT, tout en apparats et en tournures langagières, masque mal une réalité brutale : les membres de ce conseil semblent ignorer les fondamentaux du pays qu’ils prétendent piloter. La sécurité est une abstraction, la justice est une rumeur, et l’économie, une carcasse qu’on promène sous le soleil comme pour la faire oublier. Pendant ce temps, des décisions absurdes sont prises à croire que le chaos est devenu doctrine.
Prenons exemple sur leur dernière manœuvre : la nomination d’exécutants sans légitimité réelle, choisis non pour leur compétence mais pour leur compatibilité docile. Le mérite est jeté par la fenêtre pour mieux laisser entrer l’allégeance. Résultat : un exécutif composite, dissonant, où les portefeuilles ministériels deviennent des lots de consolation.
Et que dire de la posture internationale du CPT ? Une diplomatie du genou fléchi, qui donne la parole à tout le monde sauf au peuple haïtien. On quémande des faveurs, on quémande des armes, on quémande même des conseils pour comprendre les problèmes qu’on devrait pourtant connaître. Pendant que la population s’enlise dans l’insécurité, les membres du conseil défilent dans les salons climatisés à l’étranger, incapables de parler d’une voix claire ou de défendre une stratégie nationale cohérente.
Ce conseil, censé préparer le terrain à un retour à l’ordre démocratique, s’enlise dans l’improvisation constante. Au lieu d’être un levier de redressement, il est devenu un cercle clos où s’échangent des promesses qu’on ne tient pas, des visions qu’on ne partage pas, et des responsabilités qu’on refuse d’assumer.
Le peuple haïtien n’a pas besoin de sentinelles endormies ni de notables en quête de réhabilitation historique. Il a besoin de clarté, de compétence et de courage politique. Or, le CPT donne l’impression d’être un mirage institutionnel, un gouvernement de transition qui se cherche une raison d’être.
Au lieu de tracer un chemin, ils marchent sur place avec une assurance tragique. Chaque jour qui passe est une démonstration que l’incapacité peut se déguiser en protocole, que le verbe peut remplacer l’action, et que la confusion peut être promue comme mode de gouvernance.
Si le silence du peuple n’est pas encore devenu un cri, ce n’est pas parce qu’il est apaisé, c’est parce qu’il est épuisé.
Reynoldson Mompoint

