15 octobre 2025
Martelly et Gilles : portraits croisés d’un pays sans filtre
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Martelly et Gilles : portraits croisés d’un pays sans filtre

L’Edito du Rezo

« Dis-moi qui tu fréquentes, je te dirai qui tu es. »

Il fut un temps — et ce temps hélas persiste — où l’indécence montait sur les estrades, où l’injure au goût, à l’éducation, à la dignité se faisait spectacle. Michel Martelly, chanteur à gestes déplacés, propos orduriers, corps offert à la vulgarité, fut pourtant hissé à la magistrature suprême. Un homme qui insultait les femmes, dégradait les foules, crachait sur toute norme de respect, s’est vu remettre les clefs d’un État. Ce n’est pas une satire, c’est notre Histoire.

Un intellectuel autrefois lucide le résumait ainsi : « Il fut un temps, Martelly était infréquentable. » Était-il moins infréquentable parce qu’élu ? Parce que la misère morale avait élu domicile au palais national ? Il ne s’agit pas ici de morale privée. Il s’agit d’un ordre collectif qui, dans toute démocratie, devrait exclure de ses institutions les djòl sal et les figures de la dérive. Un homme qui se dénude en public, qui vocifère des obscénités devant femmes, enfants, vieillards, n’est pas un artiste : c’est un symptôme.

Mais Martelly n’est pas seul. Il y a le Docteur Gilles, ce médecin au savoir reconnu, mais qui aurait, dit-on, mendié son poste au prix d’une ignominie : un pot-de-vin demandé à un directeur de banque publique pour rester en fonction. Le crime est moral, mais aussi pénal. Et pourtant, on s’assoit encore à ses côtés, on l’invite, on le célèbre. Pourquoi ce silence ? Pourquoi cette amnésie organisée ? Ces deux figures devraient être fuis comme la peste. Mais dans cette Haïti sans repères, les pestiférés siègent en première ligne. Yo gen nanmen yo !

Ils dansent dans les salons,
Ceux qui vendirent leur âme pour un trône.
Ils chantent la honte en notes vulgaires,
Et l’on applaudit leur retour.

Ils ne demandèrent jamais pardon,
Ni pour le corps offert au déshonneur,
Ni pour la main tendue vers l’argent public,
Mais on les reçoit encore,
Comme s’ils étaient intègres.

Un pays où l’on impose tout —
Les routes interdites,
Les quartiers cadenassés,
La vie assignée à résidence —
Mais où l’on impose surtout
Le silence devant les crimes en cravate.

Ces deux hommes, Martelly et Gilles, auraient dû appartenir à la mémoire critique d’un peuple vigilant. Ils sont pourtant toujours là, tolérés, parfois glorifiés. Il est temps d’appeler les fautes par leur nom, et les fauteurs à l’exil symbolique que mérite l’indignité. Car on ne construit pas une nation avec des figures qui la piétinent. Et Gilles n’est pas seul : deux autres braqueurs de la Banque Nationale de Crédit – (Augustin et Vertilaire) -poursuivent le même forcing, osant même apposer leur répugnante signature au bas d’un document référendaire nul, sans valeur juridique ni aveu démocratique. La forfaiture devient manifeste, la honte assumée, l’impunité couronnée.

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