21 novembre 2025
Parution à Port-au-Prince en juin 2025 du livre « L’aménagement linguistique en Haïti / Textes choisis »
Actualités Culture Société

Parution à Port-au-Prince en juin 2025 du livre « L’aménagement linguistique en Haïti / Textes choisis »

Par Robert Berrouët-Oriol

Linguiste-terminologue

Conseiller spécial

Conseil national d’administration du Réseau des professeurs d’universités d’Haïti (REPUH)

Montréal, le 2 juin 2025

Le huitième livre du linguiste-terminologue Robert Berrouët-Oriol paraîtra en Haïti le 19 juin 2025 à l’édition annuelle de « Livres en folie ». Cet ouvrage a pour titre « L’aménagement linguistique en Haïti / Textes choisis » et il est édité par les Éditions Zémès, qui avaient auparavant publié ses précédents livres de linguistique, notamment « La didactisation du créole au cœur de l’aménagement linguistique en Haïti » paru en 2023. Pour mémoire il est utile de rappeler que le livre « La didactisation du créole au cœur de l’aménagement linguistique en Haïti » est un ouvrage collectif de référence de 381 pages également publié au Canada par les Éditions du Cidihca. Cet ouvrage pionnier sur la didactisation du créole –dirigé et co-écrit par Robert Berrouët-Oriol et auquel ont contribué 15 spécialistes d’horizons divers–, comprend des contributions de grande qualité scientifique élaborées par des universitaires réputés pour la rigueur de leurs travaux de recherche (Renauld Govain, Lemète Zéphyr, Pierre-Michel Laguerre, Bartholy Pierre-Louis, Alain guillaume, Charles Tardieu, etc.). Il comprend en outre deux études de premier plan : « Sur la diffusion du créole haïtien standard » d’Albert Valdman, réputé linguiste-lexicographe de l’Université d’Indiana et auteur de plusieurs dictionnaires anglais-créole, ainsi que « Créolisation et créoles » de Georges Daniel Véronique, émérite linguiste créoliste de l’Université d’Aix-en-Provence, Président du Comité international des études créoles (CIEC) et de l’Association pour la promotion et la diffusion des études créoles (APRODEC) depuis 2012. 

Le livre « L’aménagement linguistique en Haïti / Textes choisis » rassemble principalement les articles suivants :

–« Le bilinguisme de l’équité des droits linguistiques en Haïti : fondements constitutionnels et politique linguistique d’État ».

–« L’aménagement du créole en Haïti aux côtés du français et en conformité avec la Constitution de 1987 : promouvoir un débat rigoureux et rassembleur ».

–« Le ‘’Dictionnaire scolaire bilingue kreyòl-français / français-kreyòl’’, un outil d’apprentissage de haute qualité scientifique pour l’École haïtienne ».

–« Konprann sa leksikografi kreyòl la ye, kote l, sòti kote l prale, ki misyon li dwe akonpli ».

–« La lexicographie créole en Haïti : retour-synthèse sur ses origines historiques, sa méthodologie et ses défis contemporains ».

–« La problématique de l’aménagement et de la didactisation du créole dans l’École haïtienne : promouvoir une vision rassembleuse ».

–« De la simultanéité de l’aménagement du créole et du français en Haïti : un choix de société conforme à la Constitution de 1987 ».

–« Le partenariat créole-français, l’unique voie constitutionnelle et rassembleuse en Haïti ».

Le livre expose de manière amplement documentée deux volets constitutifs essentiels et liés de la vision de l’aménagement linguistique que propose Robert Berrouët-Oriol depuis la parution en 2011 de son premier livre, « L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions » (Éditions de l’Université d’État d’Haïti, Port-au-Prince, et Éditions du Cidihca, Montréal). 

Le premier volet est que l’aménagement linguistique en Haïti doit rigoureusement être pensé et mis en œuvre en conformité avec les articles 5, 32 et 40 de la Constitution de 1987. Il s’agit donc D’UNE VISION CONSTITUTIONNELLE DE L’AMÉNAGEMENT DE NOS DEUX LANGUES OFFICIELLES, LE CRÉOLE ET LE FRANÇAIS, dans leurs différentes articulations. D’une part le « Bilinguisme de l’équité des droits linguistiques » en tant que politique d’État et le « Partenariat linguistique entre nos deux langues officielles », qui doivent figurer dans un futur « Énoncé de politique linguistique nationale ». Cet énoncé servira de charpente à la future première « Loi d’aménagement linguistique des deux langues officielles d’Haïti ». D’autre part, l’édifice aménagement linguistique en Haïti doit reposer sur la formulation et la mise en œuvre juridiquement encadrée des « Droits linguistiques » de l’ensemble des locuteurs haïtiens. Sur ce registre, l’on prendra en compte que la problématique des « Droits linguistiques » de l’ensemble des locuteurs haïtiens, exposée dans le nouvel ouvrage du linguiste-terminologue Robert Berrouët-Oriol, a été explicitée pour la première fois en Haïti, en 2011, dans son livre de référence « L’aménagement linguistique en Haïti : enjeux, défis et propositions ».  

Le deuxième volet de la vision de l’aménagement linguistique que propose Robert Berrouët-Oriol dans plusieurs articles de son nouveau livre met en lumière LA PROBLÉMATIQUE CONJOINTE DE LA DIDACTIQUE ET DE LA DIDACTISATION DU CRÉOLE. Les articles traitant de ce champ disciplinaire, qui a partie liée avec l’indispensable enseignement en langue maternelle créole à tous les niveaux dans l’École haïtienne, exposent les acquis, la méthodologie et les défis de la lexicographie haïtienne contemporaine sur ses versants français-créole, anglais-créole et unilingue créole. Ces articles consignent un parcours sur l’historicité de la lexicographie créole depuis les travaux pionniers du linguiste Pradel Pompilus en 1958 jusqu’au récent « Dictionnaire du droit du travail » du juriste Philippe Volmar Volmar (Éditions Charesso, 2024), (voir l’article « Une œuvre de grande qualité lexicographique : le « Dictionnaire de droit du travail » de Me Philippe Junior Volmar », Rezonòdwès, 1er octobre 2025.

RAPPEL — L’œuvre pionnière de la lexicographie haïtienne a été élaborée par le linguiste Pradel Pompilus. Datée de 1958, elle a pour titre « Lexique créole-français » (Université de Paris). Pradel Pompilus est également l’auteur du « Lexique du patois créole d’Haïti » publié en France en 1961 par le SNE, le Syndicat national de l’édition. Tel que nous l’avons établi au terme d’une ample recherche documentaire ayant précédé la rédaction de notre « Essai de typologie de la lexicographie créole de 1958 à 2022 » (deuxième version, Rezonòdwès, 27 octobre 2024), la lexicographie haïtienne comprend 64 dictionnaires et 11 lexiques, soit un total de 75 ouvrages édités pour la plupart au format livre imprimé ; quelques titres sont offerts au format électronique. À ce premier décompte il convient d’ajouter quelques ouvrages de lexicographie juridique publiés aux États-Unis entre 1998 et 2023, à savoir le « New Jersey Judiciary Glossary of Legal (and Related) Terms – English/Haitian Creole » (New Jersey Courts, Administrative Office of the Courts, version de juillet 2023) ; le « Haitian-Creole Glossary of Legal and Related Terms » (The University of Arizona Press, 1998) ; le « English Haitian Creole Legal Glossary » de Jean-Robert Cadely et Joelle Haspil (EducaVision, 1999).  

Plusieurs articles publiés dans le prolongement de notre « Essai de typologie de la lexicographie créole de 1958 à 2022 » ont complété cet inédit travail de recherche. Nous avons démontré que sur un total de 75 ouvrages, seuls 11 ont été élaborés selon la méthodologie de la lexicographie professionnelle telle qu’elle est enseignée dans les universités à travers le monde et telle qu’elle est mise en œuvre dans la confection des lexiques et des dictionnaires de la langue usuelle (Le Robert, Le Larousse, USITO, Le Littré, le Dictionnaire de l’Académie française, le Oxford English Dictionary, le Oxford Advanced American Dictionary, El Diccionario de la lengua española de la Real academia española, etc.).

EXTRAITS DE L’ARTICLE « Le bilinguisme de l’équité des droits linguistiques en Haïti : fondements constitutionnels et politique linguistique d’État »  

« À contre-courant des différentes variantes idéologiques et identitaires du « populisme linguistique », nous offrons en partage UNE VISION POLITIQUE ET CONSTITUTIONNELLE de l’aménagement linguistique en Haïti au creux d’un projet de société où les droits linguistiques s’apparient aux droits citoyens. Cette vision centrale se caractérise comme suit : l’aménagement des deux langues de notre patrimoine linguistique historique, le créole et le français, est une obligation à la fois politique et constitutionnelle découlant de la Constitution de 1987. La vision constitutionnelle de l’aménagement des deux langues officielles d’Haïti dont nous faisons le plaidoyer est fondée sur le « Préambule » ainsi que sur les articles 5, 32 et 40 de la Constitution haïtienne de 1987. Cette vision ne se limite pas à la simple et très partielle défense/promotion du créole : elle privilégie la mise en oeuvre des droits linguistiques au titre d’un droit essentiel compris dans le grand ensemble des droits citoyens consignés dans notre charte fondamentale (voir la Constitution de 1987, Titre III, article 16 : « La réunion des droits civils et politiques constitue la qualité du citoyen ». Chapitre II : « Des droits fondamentaux » / « Droit à la vie et à la santé », article 19 : « L’État a l’impérieuse obligation de garantir le droit à la vie, à la santé, au respect de la personne humaine, à tous les citoyens sans distinction, conformément à la Déclaration universelle des droits de l’homme ». Ce qu’il faut donc rigoureusement promouvoir c’est une vision de l’aménagement linguistique dans sa dimension politique : l’État haïtien doit prendre le leadership politique de l’aménagement de nos deux langues officielles dans l’espace public et dans le système éducatif national, en lien avec la dimension constitutionnelle de ses obligations découlant des articles 5, 32 et 40 de la Constitution de 1987. »

« L’articulation de la dimension politique et de la dimension constitutionnelle confère à notre Charte fondamentale une grande cohérence et elle situe les obligations de l’État sur le terrain du Droit et des droits du citoyen. La Constitution de 1987 dispose en effet, dans son « Préambule », que « Le peuple haïtien proclame la présente Constitution » (…) « Pour garantir ses droits inaliénables et imprescriptibles à la vie, à la liberté et à la poursuite du bonheur ; conformément à son Acte d’indépendance de 1804 et à la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 (…) « Pour fortifier l’unité nationale, en éliminant toutes discriminations entre les populations des villes et des campagnes, par l’acceptation de la communauté de langues et de culture et par la reconnaissance du droit au progrès, à l’information, à l’éducation, à la santé, au travail et au loisir pour tous les citoyens » (…) Pour instaurer un régime gouvernemental basé sur les libertés fondamentales et le respect des droits humains, la paix sociale, l’équité économique, la concertation et la participation de toute la population aux grandes décisions engageant la vie nationale, par une décentralisation effective. » [Le souligné en italiques et gras est de RBO.]

« Le caractère bilingue du patrimoine linguistique historique d’Haïti est attesté dès les premières phrases du « Préambule » de la Constitution de 1987 qui se lit comme suit : « Pour fortifier l’unité nationale, en éliminant toutes discriminations entre les populations des villes et des campagnes, par l’acceptation de la communauté de langues et de culture (…) ». L’inscription dans le texte constitutionnel de « la communauté de langues et de culture », –qui renvoie à la notion centrale de communauté nationale–, est précédée de la solennelle proclamation préambulaire dans ces termes : « Préambule » — « Le peuple haïtien proclame la présente Constitution / Pour garantir ses droits inaliénables et imprescriptibles à la vie, à la liberté et la poursuite du bonheur ; conformément à son Acte d’indépendance de 1804 et à la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 ». Il y a donc dans le texte constitutionnel de 1987 un appariement juridique, un lien/liant juridique commun entre la communauté nationale comprenant l’ensemble des locuteurs, unilingues créoles et bilingues français-créole d’une part ; et, d’autre part, il existe un lien juridique référentiel majeur entre « l’acceptation de la communauté de langues et de culture » (le terme langues est consigné au pluriel) et les « droits inaliénables et imprescriptibles » en conformité avec l’Acte d’indépendance de 1804 et avec la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. Sur le registre d’une jurilinguistique haïtienne qu’Haïti aura à élaborer, l’on peut déjà noter la référence constante au Droit, à la personnalité juridique de l’Acte d’indépendance de 1804 qui consacre l’institution d’une nation souveraine ayant vaincu le colonialisme. Et cette référence constante au Droit apparie l’Acte d’indépendance de 1804 au texte fondateur consacrant au sortir de la Seconde Guerre mondiale l’universalité des droits humains, à savoir la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948.

La « dimension Droit » est l’une des caractéristiques majeures de la Constitution de 1987, et cela s’explique en grande partie du fait que l’Assemblée constituante a voulu prémunir Haïti d’un retour du fascisme duvaliérien. Tel que précisé plus haut, les droits citoyens fondamentaux sont identifiés dès le « Préambule » de la Constitution de 1987 : « Le peuple haïtien proclame la présente Constitution / Pour garantir ses droits inaliénables et imprescriptibles à la vie, à la liberté et la poursuite du bonheur (…). Cette proclamation préambulaire est explicitement renforcée (1) par le dernier segment du « Préambule » du texte constitutionnel dans les termes suivants : « Pour instaurer un régime gouvernemental basé sur les libertés fondamentales et le respect des droits humains, la paix sociale, l’équité économique, la concertation et la participation de toute la population aux grandes décisions engageant la vie nationale, par une décentralisation effective », d’une part. Et, d’autre part, elle est explicitement renforcée (2) au Titre III – Chapitre II qui consigne explicitement « Des droits fondamentaux » : la liberté individuelle, la liberté d’expression, la liberté de réunion et d’association, etc. ». 

EXTRAITS DE L’ARTICLE « La lexicographie créole en Haïti : retour-synthèse sur ses origines historiques, sa méthodologie et ses défis contemporains »

« Sur la base des critères de la méthodologie de la lexicographie professionnelle, notre évaluation des dictionnaires élaborés par Albert Valdman et par le lexicographe haïtien André Vilaire Chery permet d’exposer que ces ouvrages constituent LE MODÈLE NORMATIF STANDARD dont doit s’inspirer toute la lexicographie haïtienne contemporaine (voir nos articles « Lexicographie créole : revisiter le « Haitian Creole-English Bilingual Dictionnary » d’Albert Valdman » (Le National, 30 janvier 2023), « Le « Dictionnaire de l’écolier haïtien », un modèle de rigueur pour la lexicographie en Haïti » (Le National, 3 septembre 2022), et « Toute la lexicographie haïtienne doit être arrimée au socle méthodologique de la lexicographie professionnelle » (Le National, 29 décembre 2022).

D’autre part, il faut prendre toute la mesure que la créolistique –depuis la co-officialisation du créole et du français dans la Constitution haïtienne de 1987–, a produit très peu d’études de référence sur la lexicographie créole, ses enjeux, sa dimension institutionnelle et, surtout, sur la méthodologie de la lexicographie professionnelle. Elle s’est toutefois enrichie de deux études de premier plan d’Albert Valdman, qui témoignent d’une haute réflexion théorique sur la lexicographie en tant qu’objet d’étude : « L’évolution du lexique dans les créoles à base lexicale française » » (revue L’information grammaticale », 2000 / 85) et « Vers un dictionnaire scolaire bilingue pour le créole haïtien ? » (revue La linguistique 2005/1, vol.41). Sur le plan de l’analyse de l’histoire et de l’évolution de la lexicographie créole, la linguiste Annegret Bollée a élaboré elle aussi une étude de grande amplitude analytique, « Lexicographie créole : problèmes et perspectives » (Revue française de linguistique appliquée, 2005/1 (vol.X) (…) ».

« Les défis contemporains de la lexicographie créole sont également de l’ordre de la formation académique des lexicographes et la Faculté de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti a un rôle de premier plan à jouer dans un environnement délétère où l’État haïtien –démissionnaire en ce qui a trait à l’aménagement simultané des deux langues de notre patrimoine linguistique historique–, n’accorde aucune véritable priorité à l’éducation en Haïti. La dimension institutionnelle de la lexicographie créole s’avère donc être une exigence de premier plan : la professionnalisation du métier de lexicographe (comme d’ailleurs la professionnalisation du métier de traducteur généraliste ou de traducteur technique et scientifique) passe obligatoirement par une formation adéquate à l’Université. En ce qui a trait à la formation en lexicographie, il est tout indiqué le « Programme de formation en techniques de traduction » mis en route en 2017 à la Faculté de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti, en partenariat avec l’Association LEVE, soit renforcé par l’introduction de cours spécifiques de lexicographie. L’une des options programmatiques à explorer serait que dès la deuxième année de licence en linguistique la Faculté de linguistique appliquée offre une double spécialisation en traduction/lexicographie créole. Cette double spécialisation en traduction/lexicographie créole pourrait être enrichie par l’adjonction de cours en didactique/didactisation du créole. Comme nous l’avons exemplifié plus haut dans cet article, l’un des plus grands défis de la lexicographie créole est la rupture avec l’amateurisme afin de parvenir à une réflexion analytique et à une production scientifique solidement ancrée sur le socle de la méthodologie de la lexicographie professionnelle. C’est incontestablement la seule voie conduisant à la professionnalisation de lalexicographie et à la production d’outils lexicographiques conformes à la méthodologie de la lexicographie professionnelle. La production d’outils lexicographiques créoles de haute qualité scientifique –notamment un dictionnaire unilingue créole et un dictionnaire scolaire bilingue français-créole–, sera d’un apport majeur dans l’enseignement DE la langue créole et dans l’enseignement EN langue maternelle créole des savoirs et des connaissances dans l’École haïtienne. »

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