Un référendum constitutionnel façonné sur mesure et projeté en dehors de tout cadre légal : est-ce vraiment ce que mérite le peuple haïtien ?
minute de la rédaction
En visite en Jamaïque pour participer au sommet de la CARICOM, le secrétaire d’État américain Marco Rubio a placé la sécurité régionale au cœur de son agenda diplomatique. Sur son compte X, Rubio a affirmé son ambition : « renforcer la sécurité de notre hémisphère et lutter contre la criminalité transnationale ».
Ce déplacement, selon lui, vise à « travailler avec nos partenaires caribéens pour enrayer l’immigration illégale, la violence et la contrebande ». Mais derrière ce langage musclé, les attentes concrètes à l’égard d’Haïti s’inscrivent dans une stratégie encore floue.
Rubio entend consolider le soutien à la mission internationale déployée en Haïti, sous direction kenyane, censée épauler la Police nationale haïtienne. Jusqu’ici, cette intervention n’a pourtant pas réussi à contenir la flambée de violences, notamment à Port-au-Prince, où plus de 60 000 personnes ont été déplacées en un mois. Pour Rubio, « la mission doit être élargie si l’on veut éliminer ces gangs », tout en ajoutant que « l’avenir d’Haïti » devra être discuté en lien avec des mécanismes incitatifs, comme la relance de la production locale.
Dans ce contexte, la position des autorités haïtiennes, accusées d’improviser un référendum-bidon en pleine crise, complique toute initiative de stabilisation. Le pouvoir de facto parait imposer une réforme politique sans consensus, dans un climat de défiance généralisée. Une telle manœuvre, dénoncée comme un simulacre démocratique, fragilise encore davantage les efforts internationaux. Rubio, tout en affirmant être à l’écoute des partenaires régionaux, n’a pas encore formulé de position explicite sur cette dérive institutionnelle.
Au-delà des déclarations, la visite de Marco Rubio marque un moment de vérité pour la diplomatie américaine dans la région. L’idée d’un plan coordonné pour Haïti reste en gestation, et les réponses sécuritaires demeurent insuffisantes face à une crise profondément politique. À trop vouloir prioriser les intérêts stratégiques américains — « always focused on what’s best for Americans first », comme il le rappelle — la politique haïtienne de Washington risque de s’enliser dans des logiques d’urgence sans transformation durable.
