CE QUE JE PENSE
NON AUX IDÉES FOLLES : PAS DE TRIUMVIRAT
Par Pierre Robert Auguste
La longue crise haïtienne fatigue à ce point, accable tant d’ennuis qu’il est tentant de se tourner vers la recherche de solutions faciles, accommodantes, en oubliant l’essentiel. Il s’agit de normaliser un État failli, désaxé de ses bases institutionnelles. Pour cela, il faut plonger dans ses racines historiques. La présidence de l’État tient sa consistance dans l’unicité. Elle en fonde la stabilité. Chaque fois qu’on s’en démarque en faveur d’une pluralité, c’est la pagaille, l’éclatement, l’enfilade de scandales. On le voit bien, la pluralité manifestée par le CPT tangue, dès sa naissance, de divisions en scandales et se retrouve au bord de l’implosion ou, pire, suscite la colère populaire qui commence à gronder.
Pas d’idées folles comme un triumvirat. On doit se débarrasser des fausses idées préconçues, perpétuées jusqu’ici en Haïti, de notions vagues comme société civile ou secteur privé, sans qu’on puisse clairement définir leurs paramètres de représentativité. Qui peut prétendre représenter l’un ou l’autre de ces secteurs dans un triumvirat présidentiel sans risquer des contestations légitimes ? Certes, on aurait pu résoudre ces deux problèmes par l’incarnation. Mais qui l’a déjà fait ? Au lieu de représentants grégaires, il y a toujours eu des commis à gages.
La crise haïtienne, pour amorcer son dénouement, a besoin de femmes et d’hommes d’État animés d’un amour oblatif. Car il ne s’agit pas de jouissance, mais de sacrifice. Le sacrifice immédiat consiste à s’opposer aux cartels des « abolochos », ces prédateurs qui s’en tiennent à la présidence plurielle pour dépecer l’administration en profitant de son budget, et à en appeler à une présidence unique incarnée par un juge de la Cour de cassation. Offrir sa vie en holocauste pour sauver le pays ne doit pas être un serment rhétorique, mais l’acceptation d’une lourde responsabilité et des risques majeurs qui l’accompagnent.
SE METE KRAN
Gonaïves, soir du 9 janvier 2025
Pierre Robert Auguste

