9 octobre 2024
L’intelligence artificielle, une menace pour l’université en Haïti ?
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L’intelligence artificielle, une menace pour l’université en Haïti ?

L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE : UNE MENACE POUR LES UNIVERSITÉS EN HAÏTI ?

Le XXème et le XXIème siècles sont marqués par les grandes avancées technologiques d’où « la révolution numérique « . Caractérisée par le développement de l’intelligence artificielle, cette révolution est actuellement ancrée dans tous les domaines de la vie économique, sociale et académique. Nonobstant cela, l’intelligence artificielle, vue comme une technologie d’automatisation du travail intellectuel, n’est-elle pas une menace pour les universités en Haïti?

En effet, l’intelligence artificielle avec plus de 60 ans d’évolution est une branche de l’informatique qui se définit comme :  » un ensemble de théories et de techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de stimuler l’intelligence humaine »(Dictionnaire Larousse, consulté le 2 juin 2023). Au niveau de l’enseignement supérieur, cette définition permet de comprendre que l’intelligence artificielle sert à personnaliser les apprentissages selon les besoins et les capacités d’assimilation de chacun. En d’autres termes, l’usage de l’intelligence artificielle offre des outils qui permettent de bien mener et approfondir les recherches scientifiques à l’ université. Ces outils se révèlent d’une importance capitale en termes de support électronique dans toutes les universités à travers le monde y compris celles qui sont Haïti faisant face à des manques de ressources technologiques depuis des lustres. Cette situation contribue à affaiblir la qualité des recherches scientifiques réalisées dans les universités haïtiennes.

Face aux manques de ressources technologiques que traversent les universités haïtiennes, il est certain que l’intelligence artificielle est un atout majeur. Pour illustrer ce point, on peut citer Frederick Wilfrid Lancaster, un spécialiste américain en bibliothéconomie et en science de l’information. Dans son ouvrage Toward a Paperless Information System publié en 1978, Lancaster soutient que le papier, en tant que support d’information et de connaissance, est désormais obsolète. Il affirme ainsi que les livres, les journaux et les documents administratifs doivent être remplacés à l’échelle mondiale par des supports électroniques, qui sont eux-mêmes intégrés dans les technologies d’intelligence artificielle.

Dans ce contexte, il est clair qu’une restructuration de la technologie à l’université en Haïti va permettre aux différents embranchements de la structure universitaire de bien faire leur travail. Une telle démarche permet de simplifier des tâches complexes, telles que l’automatisation des processus administratifs, l’analyse systématique des données, l’utilisation de dispositifs de projection électronique par les enseignants lors de leurs présentations, et l’accès à des documents numériques comme les audiobooks et les e-books.

En dépit de tout cela, les universitaires portent un regard critique sur les » chatbots » de l’intelligence artificielle précisément celui lancé par OpenAl, intitulé ChatGPT, qui est même capable de répondre à des questions avec beaucoup de profondeur à la place d’une personne( BDM, 2022). Face à ce manque de ressources technologiques et à la nécessité de développer les compétences critiques et de réflexion des étudiants, quel impact l’intelligence artificielle aura-t-elle sur les universités haïtiennes ? Peut-elle représenter un danger pour leur avenir académique ?

L’intelligence artificielle: un enjeu pour l’université haïtienne.

Dans un interview accordé à la Revue internationale et stratégique , Bruno Latour mentionne que :  » l’ on veut toujours autonomiser la technologie et lui donner ensuite un maître, ou à l’inverse regretter que personne ne la dirige. Mais l’autonomie de la technique qui serait à la recherche d’un maître constitue une position classique.  » En tenant compte à la base de l’implication de ces types d’outils, Bruno Latour nous montre l’enjeu principal de la réalité de la technique en termes d’autonomisation.

En soulignant ces points, Bruno Latour met en avant une problématique cruciale : la technologie, y compris l’intelligence artificielle, est souvent vue comme une entité autonome nécessitant un contrôle ou une régulation. Cette perspective peut ignorer que l’autonomisation technologique montre la complexité de notre relation avec la technologie, plutôt que d’être une solution en soi. Pour les universités haïtiennes, c’est une question cruciale. L’intelligence artificielle pourrait moderniser l’enseignement et améliorer les ressources, mais elle pourrait aussi aggraver les problèmes existants, comme le manque de moyens et la dépendance à des outils sans stratégie claire. Il ne suffit pas de se demander si l’intelligence artificielle est une menace ; il faut aussi comprendre comment elle pourrait changer les pratiques académiques et comment les institutions peuvent tirer parti de ses avantages tout en gérant les défis.

De ce fait, en Haïti les universitaires doivent comprendre que l’intelligence artificielle ouvre une porte de réflexions sur nos manières de penser l’enseignement et de l’acquisition du savoir. Ainsi, L’intelligence artificielle doit inciter les universités haïtiennes à revoir leur approche éducative en analysant attentivement l’impact des avancées technologiques sur la réalité sociale. Elles doivent s’efforcer d’obtenir les moyens nécessaires pour se structurer efficacement et former les étudiants.es avec un esprit critique, en leur permettant de comprendre à la fois les limites et les opportunités offertes par l’intelligence artificielle. De plus, il est crucial d’accompagner les enseignants dans l’intégration de ces outils dans leurs pratiques pédagogiques pour maximiser leur potentiel dans l’enseignement.

Transformer l’intelligence artificielle en opportunité

En aucun cas, l’intelligence artificielle ne doit être une menace pour les universités en Haïti. L’université est intrinsèquement un lieu de savoir. Et ce savoir véhiculé à l’université doit faire l’objet de résolution des problèmes pratiques et techniques. Dans cette dynamique, les universités haïtiennes doivent se constituer en lieu de débat sur les technologies sur ces diverses formes en matière d’éthique des usages numériques en se questionnant et mettre en pratique des mesures rigoureuses pour éviter les exercices de plagiat et d’assurer l’honnêteté intellectuel à tout prix aux différentes activités universitaires qui prennent en compte les outils de l’intelligence artificielle.

Pour que l’intelligence artificielle devienne un atout plutôt qu’une menace pour les universités haïtiennes, des politiques claires et rigoureuses sont nécessaires. Michael M. Crow, dans Designing the New American University (2015), insiste sur l’importance d’intégrer les technologies de manière éthique et réfléchie. Cela inclut la formation des étudiants à l’utilisation responsable de l’intelligence artificielle et l’instauration de mécanismes pour éviter le plagiat et garantir l’intégrité académique. Selon Shoshana Zuboff dans The Age of Surveillance Capitalism (2019), un débat constant sur les enjeux éthiques des technologies numériques est crucial. En adoptant ces mesures, les universités haïtiennes peuvent non seulement éviter les risques liés à l’intelligence artificielle, mais aussi en tirer parti pour enrichir leur mission éducative et scientifique.

En fin de compte, l’utilisation de la technologie principalement l’intelligence artificielle au niveau mondial constitue une force majeure et ceci même à l’université. En effet, une utilisation de l’intelligence artificielle à l’université en Haïti paraît être une évidence pourtant ces outils peuvent être en termes d’enjeu une arme à double tranchante. C’est pour cela que malgré les manques de ressources technologiques, toutes les entités qui composent l’université haïtienne doivent s’unir pour prendre en compte du danger que présente l’utilisation sans contrôle de l’intelligence artificielle. De ce fait, ils doivent réfléchir sur une restructuration de l’université en Haïti dans la perspective d’apporter une approche critique vis-à-vis de l’usage des outils numériques par les enseignants et les étudiants.es, tout en tenant compte des enjeux socio-techniques de ces derniers afin de diminuer les risques d’une mauvaise utilisation qui peut nuire à la réflexion personnelle et l’esprit critique. En cela, l’intelligence artificielle ne peut pas être une menace pour les universités haïtiennes si elles font preuve d’autonomie sur l’autonomisation du travail intellectuel de l’intelligence artificielle elle-même.

Fred-Pascal BIEN-AIMÉ, Étudiant finissant en Communication Sociale (ECS).

Références Bibliographiques

BDM. (5 décembre 2022). « ChatGPT, le nouveau chatbot IA qui dialogue avec vous : comment le tester ». Blog du Modérateur. Consulté le 3 juin 2023 à 2 h 00. Disponible sur : https://www.blogdumoderateur.com/chatgpt-chatbot-intelligence-artificielle/.

CROW, Michael M. et DABARS, William B.(2015). Designing the New American University. Johns Hopkins University Press. ISBN 978-1-4214-1723-3. 360 p.

DE FRANCE, Olivier et HUYGHE, François-Bernard. (2018). « La technique, c’est la civilisation elle-même ». Entretien avec Bruno Latour. Revue Internationale et Stratégique, 2018/2 (n° 110), p. 163-171. [En ligne] Disponible sur :
https://www.cairn.info/revue-internationale-et-strategique-2018-2-page-163.htm

Dictionnaire Larousse. (consulté le 2 juin 2023). Dictionnaire en ligne. Disponible sur : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais
LANCASTER, Frederick Wilfrid. (1978). Toward a Paperless Information System. Édition illustrée. Academic Press.

ZUBOFF, Shoshana. (2019). The Age of Surveillance Capitalism. PublicAffairs. ISBN 978-1-250-27247-9. 368 p.

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