Les États-Unis semblent jongler avec la situation en Haïti, cherchant à éviter toute forme de responsabilité directe, tout en manipulant la scène politique et diplomatique. Le soutien initial à la Mission Multinationale de Sécurité et de Stabilisation (#MMSS), sous l’égide des Nations Unies, révèle une stratégie subtile : permettre à d’autres acteurs de prendre la charge apparente de la gestion d’une crise qui semble interminable. Cette initiative, bien que parrainée par Washington et ses alliés, a rapidement vu un nouveau protagoniste, le Kenya, être désigné à la tête de la mission. Dr Ariel Henry, chef du gouvernement haïtien, après avoir attendu plus d’un an pour l’arrivée de cette mission, a été piégé dans un jeu diplomatique habile orchestré par les États-Unis.
Le voyage d’Ariel Henry au Kenya pour signer les documents finaux visant à officialiser cette mission marque un tournant dans sa carrière politique. Ironie du sort, ce qui devait être son dernier acte officiel a été précipité par une décision déjà prise en coulisses par Washington et la Caricom. Ariel Henry, perçu par beaucoup comme un pantin entre les mains des grandes puissances, a été brusquement exilé après son départ du Kenya, remplacé par un Conseil de 9 Présidents, une structure politique aux contours encore flous.
La mission kenyane, censée ramener la stabilité en Haïti, s’avère rapidement inadéquate face à l’ampleur des défis sur le terrain. Confrontés à cette réalité, les États-Unis modifient leur discours, évoquant la possibilité de transformer la mission en une opération de maintien de la paix sous l’égide des Nations Unies, rappelant étrangement l’ère de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (Minustha). Or, cette dernière mission, qui s’est achevée il y a quelques années, a laissé derrière elle un bilan controversé, marqué par des abus et une gestion inefficace de la situation sécuritaire et humanitaire.
Alors que le spectre d’un nouvel échec plane, il est légitime de se demander si les Nations Unies et les États-Unis ont une vision claire de ce qu’ils souhaitent réellement accomplir en Haïti. L’histoire récente a montré que ces interventions, souvent mal préparées et mal adaptées au contexte local, n’ont fait qu’aggraver la crise. Les populations haïtiennes, fatiguées de servir de terrain d’expérimentation pour des stratégies internationales mal conçues, méritent mieux que des promesses vides et des solutions à court terme.
L’ambiguïté de la position américaine, oscillant entre soutien et retrait, manipulation et désengagement, révèle une approche cynique de la politique étrangère en Haïti. En refusant d’assumer une responsabilité directe tout en orchestrant des jeux de pouvoir à distance, Washington ne fait que prolonger l’instabilité d’un pays déjà à genoux. Quant aux Nations Unies, la possibilité d’un retour à une mission de maintien de la paix comme la Minustha ne peut que soulever des doutes quant à leur capacité à tirer les leçons du passé.
Les États-Unis et les Nations Unies savent-ils vraiment ce qu’ils font en Haïti ? L’avenir de la nation dépendra de leur capacité à agir avec transparence, responsabilité et, surtout, à écouter les aspirations des Haïtiens eux-mêmes.