Gonaïves, 29 juin 2024
Lettre ouverte à M. Normil Rameau, Directeur Général de la Police Nationale
Objet : Attirer l’attention du Directeur Général sur la nécessité d’agir d’urgence concernant le problème d’insécurité grave dans le département de l’Artibonite.
Monsieur Normil Rameau,
Nous, citoyens engagés et organisations du département de l’Artibonite signataires de cette lettre, saluons votre retour en tant que nouveau directeur général de la police nationale. Nous prenons la responsabilité d’attirer votre attention sur la nécessité de prendre rapidement des mesures pour aborder le problème de sécurité dans le département de l’Artibonite, une situation qui paralyse le département à tous les niveaux.
Il est important de vous rappeler que depuis environ huit ans, une situation d’insécurité généralisée règne dans tout le pays, qui s’est transformée en une véritable terreur ces cinq dernières années. Des gangs criminels ont pris en otage les deux plus grands départements du pays : l’Ouest et l’Artibonite. Dans l’Artibonite en particulier, les gangs détruisent des vies dans plusieurs communes. Ils tuent, kidnappent, violent, détruisent les biens des citoyens et forcent les gens à abandonner leurs maisons, comme c’est le cas dans le département de l’Ouest. Depuis que le gang d’Anel Joseph s’est installé dans la commune de Dessalines en 2018, on peut dire que c’est une contagion qui s’est propagée dans le département de l’Artibonite, notamment dans la vallée.
Dans le département, parmi les gangs les plus féroces, connus de tous, on peut citer : le Gang Savyen situé dans la commune de Petite Rivière de l’Artibonite, Kokorat San Ras situé à La Croix Périsse à L’Estère avec une ramification du gang 5 Étoiles à Mapou Lagon et Ti Bwadòm dans la commune de Gros-Morne, le Gang Delije dans la commune de Montrouis. Ces groupes criminels, et d’autres encore que nous n’avons pas mentionnés, encerclent le département et ont établi des relations entre eux sans oublier les liens étroits qu’ils ont développés avec les gangs du département de l’Ouest.
Les actions de ces gangs sont inimaginables. Ces groupes criminels kidnappent toutes sortes de personnes. Ils exigent de grosses sommes d’argent que les familles ne possèdent pas et les soumettent à des sévices que l’on ne voit que chez les groupes terroristes les plus dangereux de certains pays. Certains otages sont brûlés avec du plastique, laissés à souffrir sans nourriture jusqu’à ce qu’ils meurent de faim. Les criminels font parfois payer plusieurs rançons puis tuent les otages ensuite. Les atrocités commises par les gangs appellent une réponse musclée.
Même les policiers, censés traquer ces groupes criminels, ne sont pas épargnés. Nous nous souvenons comment les gangs ont tué et humilié les cadavres de plusieurs policiers. Le 25 janvier 2023, six policiers ont été tués par le gang Savyen à Liancourt. Ils ont saisi leurs corps et tout le matériel qu’ils avaient. Depuis cet événement, les commissariats de Liancourt et de Petite Rivière sont abandonnés, il n’y a plus de présence policière dans ces zones, donnant ainsi libre cours aux gangs pour opérer comme ils le souhaitent.
Ces activités criminelles ont mis le département de l’Artibonite à genoux. Un département qui est le grenier d’Haïti. Aujourd’hui, les paysans de la vallée ne peuvent plus mener leurs activités habituelles. Là où les gangs n’ont pas encore chassé les habitants, ils ont pris le contrôle des eaux et des canaux d’irrigation nécessaires pour leurs cultures, augmentant ainsi la misère sociale et économique déjà existante. Toute la route nationale numéro 1 est sous le contrôle des gangs, de Canaan, en passant par Delije, Carrefour Péï et Kokorat San Ras à La Croix Périsse sur L’Estère. Écoles, hôpitaux, marchés publics… ne fonctionnent plus dans plusieurs communes de l’Artibonite telles que Petite Rivière, Liancourt, L’Estère, Montrouis. Les gangs semblent déterminés à anéantir la vie dans le département, plongeant les paisibles citoyens dans une situation insupportable.
Nous, citoyens engagés et organisations du département de l’Artibonite, qui avons pris l’initiative d’écrire cette lettre ouverte, Monsieur le Directeur Général, comptons beaucoup sur les mesures rapides que vous allez prendre pour permettre à la vie de reprendre son cours normal en Haïti et dans l’Artibonite en particulier. Il est clair que les dirigeants précédents de la PNH et de la DDA de l’Artibonite n’ont jamais fait grand-chose pour soulager la souffrance des citoyens. Leurs cris n’ont jamais atteint leurs oreilles. Il est vrai que des efforts ont été faits sous certaines DDA pour limiter l’action des gangs dans le département.
En collaboration avec la population de la vallée, la police a éliminé le principal chef du gang Savyen, Odma. Deux autres lieutenants, Lodè et Goliath, ont également été éliminés. Ces efforts n’ont pas été poursuivis car la direction à un plus haut niveau de la police préférait retirer ces directeurs départementaux au lieu de leur donner les moyens de traquer les gangs. Le directeur départemental de la police actuel, M. Paul Menard, n’a jamais fait d’effort pour aborder réellement le problème de l’insécurité. Au contraire, la situation a empiré sous sa direction.
C’est pourquoi nous vous écrivons cette lettre ouverte pour attirer votre attention sur l’urgence de la situation dans l’Artibonite. Nous tenons également à vous dire que le travail est immense. Le chantier de la sécurité est le premier domaine où les gens attendent un signal. Ce signal doit venir avec les premières mesures que vous prendrez pour apporter des changements au niveau de la DDA de l’Artibonite. Nous ne pouvons pas compter sur ceux qui sont en place et qui n’ont jamais montré de sensibilité à la souffrance des gens, encore moins pris des mesures pour résoudre le problème. Nous croyons qu’il n’y a aucun problème que la police ne puisse résoudre avec la volonté au plus haut niveau.
Par conséquent, nous comptons sur votre dévouement, votre volonté et votre responsabilité pour sortir l’Artibonite des griffes de ces criminels qui l’étouffent depuis trop longtemps.
En espérant que notre démarche retiendra votre attention et que vous donnerez suite à nos demandes, Monsieur le Directeur Général, nous vous saluons patriotiquement au nom de nos ancêtres !
Personnes et organisations signataires de cette lettre :
Ravel NORGAISSE : Citoyen engagé
Luc Wans DUVALSAINT : Citoyen engagé
André SAINT-LOUIS, Tech-Agr, Coordinateur Général du Comité d’Initiative pour la Paix dans l’Artibonite (KILBA)
Reynald EXANTUS : Citoyen engagé, Professeur d’université
Paul André GARÇONNET : Membre de la direction de l’Artibonite Debout pour Haïti (LAKAY)
Dorvensley DORMÉUS : Membre du Bloc Politique Chemin Clair (BPCKL)
Prévilmond MONT-FLEURY : Bloc Politique Chemin Clair (BPCKL)
Serge DESROCHES : Mouvement des Jeunes de l’Artibonite (MJL)
Junior Boisrond EMMANUEL : Association des Jeunes pour le Développement de la Basse-Artibonite (AJDPB)
Nouvolib AYIBOHIO : Artiste engagé
Nelio PETIT-HOMME : Mouvement Révolutionnaire pour la Libération des Masses (MORELIM)
Myrtholet ACCIDE : CHACHOM
Rigaud VELUMAT : Artibonite Debout pour Haïti (LAKAY)
Wilguens SAINT-JEAN : Citoyen engagé, Enseignant
Chesny SÉNAT : Citoyen engagé, Enseignant
Cauvin PLAISIR : Citoyen engagé, Écrivain
Donald NOELSAINT : Citoyen engagé, Écrivain
Max André MERTIL : Citoyen engagé, Enseignant
Gaby CHARLES : Membre du Bloc Politique Chemin Clair (BPCKL)
Jean Noé DESTRA : Konbit Tanbou Pale
James DUPERVAL : Président Lestère D’abord
Max Leventaire SAINT LOUIS : Konbit Citoyen pour la Sécurité Communautaire (KOSEK)
Marc Tilus ESTIMÉ : Konbit Citoyen pour la Sécurité Communautaire (KOSEK)
Combite solidarité pour le développement de Mont-Rouis (CSDM) : Jean Pierre FRITZ
Anuel Fortuné : Force réelle Saint-Marc
Regroupement des travailleurs pour le développement inclusif (RTDI) : Prospeline JOSEPH MARC
