PRA | CE QUE JE PENSE : L’ORDRE INTERNATIONAL S’EFFONDRE EN HAÏTI

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L’ORDRE INTERNATIONAL S’EFFONDRE EN HAÏTI

Par Pierre Robert Auguste

Une solution politique dépourvue de fondement juridique demeure une aventure volatile soumise à tous les aléas. L’exemple le plus récent en est celui proposé par la Caricom sous l’égide du CORE Group, une structure présidentielle septipartite affligée d’une malformation congénitale : le conseil présidentiel. Il s’agit d’une assemblée dépourvue de noblesse morale et institutionnelle.

Si cette solution peut satisfaire certains en apaisant leur « présidentialite », elle ravivera certainement les luttes intestines féroces pour le pouvoir. Aucun des acteurs cooptés pour siéger au conseil présidentiel ne dispose d’une structure hiérarchique solide. Il est donc possible de voir émerger, de leur base, des groupes signataires monnayés désignant d’autres chefs comme leaders de leur faction. Il est scandaleux et inacceptable que les provinces continuent d’être marginalisées. Elles revendiqueront inévitablement leur place prépondérante, contestant une discrimination démocratique révoltante. Leurs voix, méprisées ou ignorées depuis trop longtemps, doivent désormais être entendues. Il ne s’agit plus seulement d’une promesse fallacieuse de décentralisation, mais fondamentalement du respect de la dignité humaine et de la mise en place de mécanismes permettant une libre expression et un plein épanouissement.

Tout ce chaos découle d’une fatigue émotionnelle, engendrant une paresse intellectuelle et une précipitation incontrôlée, ainsi que d’une volonté déterminée d’anéantir la constitution actuelle d’Haïti, source d’une inflation électorale et de dépenses budgétaires insoutenables. Cette situation psychologiquement perturbante conduit à des décisions malencontreuses qui visent davantage à satisfaire les bas instincts des politiciens avares de pouvoir qu’à garantir la protection de l’État de droit et la préservation de l’une de ses institutions emblématiques, la Cour de Cassation. La réaction de la Caricom a été trop politicienne et pas assez juridique.

Si la Caricom et le CORE Group ont cru ainsi anéantir la Constitution haïtienne de 1987 pour ouvrir la voie à une autre, plus simplifiée, qu’ils ont inspirée ou commanditée, c’est en réalité l’ordre international lui-même, reposant sur le principe du fondement juridique librement consenti, qui s’effondre en Haïti. Cela laisse place au règne de la coercition de la force et au retour de la supercherie du « petit peuple, petite nation », contraints de tout subir, contrairement au rejet de ces qualifications discriminatoires dans la société internationale civilisée. Sommes-nous en train d’assister au retour de la barbarie, ou à la fin du règne du Droit, qui ne veut pas dire son nom ?

A moins que ce soit, par un cynisme génocidaire calculé, une bougie d’allumage de la guerre civile!

Gonaïves, le 14 mars 2024
Pierre Robert Auguste

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