Le menteur et l’hypocrite, de la fausseté à la facticité de soi

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Par Camille Loty Malebranche

La Vérité métaphysique se définit selon les spiritualités et le mensonge en métaphysique peut être considéré comme toute déviance ontologique qui fait choir l’humain loin du sens de son propre être. Par contre, en société, l’ignominie du mensonge, cet interdit de toutes les morales sociales, si souvent évoquée selon la décence prescrite aux individus, est le fait des menteurs professionnels qui profitent indécemment et criminellement de tous, derrière les structures du pouvoir qui, le plus souvent, ne tient que par le mensonge. Déjà, nous l’avons tant et tant dit, montré et démontré: l’idéologie dominante dans un monde d’inégalités irrationnelles est essentiellement mensonge. On ne mène pas les hommes en en faisant des instruments de sa propre puissance personnelle ou de classe, sans leur mentir sans leur inventer une essence servile par les arguties idéologiques du devoir, de l’identité, de l’appartenance, de la religion, tout ce qui sacralise la condition d’esclave ou de soumis.

Le pouvoir oligarchique, celui de quelques-uns de disposer de toutes les structures pour dominer quasiment tous tout en imprimant le modèle qu’ils veulent à l’État et leurs voies de classe à la société entière, est toujours essentialiste dans son fondement, son édifice idéologique. Mais en plus de ce mensonge global du social, il est une multitude de manipulations que le pouvoir social opère en jouant du dualisme mensonge-vérité. On fait basculer le peuple dans des truismes vils et on l’incite à soupçonner l’individu sans menace ni danger d’aucune sorte envers quiconque, dont il doit dénoncer par principe, les moindres dérogations à la loi.

Mine de rien, en plus de faire des individus des instruments de leur règne, les puissants les rendent complices de leur tyrannie, indics de leur dictature. On incite beaucoup les légions d’ignares de la société à dénoncer leurs semblables non conformes à toutes les stupidités des lois, comme au temps des dictatures sanguinaires telles le nazisme où la vérité sur un violateur des lois abjectes, sur la cachette d’un recherché par la police, signifiait la torture, la prison ou la mort du dénoncé. Que son zèle toxique et lugubre soit par haine viscérale, par religiosité extrême ou par strict respect des lois de l’État sacralisé, la mouchardise par souci de vérité, transforme son monstre de dénonciateur, refusant d’être coupable du mensonge de répondre qu’il ignore où est le recherché par l’injustice officielle des oligarchies pourries qui dirigent généralement les peuples, en complice des criminels et des répressifs immondes!

L’absolutisme moral – qui s’attache aveuglément aux principes sans nuancer leur conséquence en oubliant qu’en morale véritable, la justice de l’acte prime la loi – peut, en certaines circonstances, friser la méchanceté, appuyer le crime et coucher avec le diable.

Le mensonge, une fois qu’il ne revêt aucune mécréance ontologique par le refus de la Vérité divine au profit de l’illusion du monde ni ne se pose en termes de faux témoignages, est de loin préférable aux dénonciations destructrices que certains font à un système menteur et voyou contre leurs semblables prétendument non respectueux de quelques banales lois étatiques sans conséquence. D’ailleurs, des mensonges saints ont sauvé des vies comme le personnage biblique, Raab la prostituée, louée allègrement par l’apôtre Paul pour son action juste, son mensonge par la foi, qui permit à des juifs poursuivis et fugitifs d’échapper à leurs poursuivants potentiellement assassins!  

Le pire est que les défenseurs extrémistes et absolutistes de « vérités » bêtes et de « lois » insensées, sont souvent des hypocrites. Car leur passion irrépressible pour la vérité, est à application variable. Leur folie dévouée à la vérité tient de leur tendance à affliger autrui de fardeaux moraux pour se faire passer comme plus saints que les saints dans les apparences, tout en s’attirant les bonnes grâces du pouvoir des inquisiteurs de ce monde inhumain! Pour décrire l’hypocrisie, elle n’est pas la non énumération (ce qui serait de toute façon stupide) de ses propres faiblesses qu’on accepte en reconnaissant que soi-même comme tous est passible de graves fautes et que c’est par le dépassement permanent que l’homme minimise les risques de chutes ou se relève de celles qu’il a subies. Non, l’hypocrisie est la facticité de la prestation même de l’Homme tel qu’il se présente pour tromper sur sa personne dans la représentation de l’autre afin de le manipuler. C’est le stade de production de soi comme fausseté délibérément assumée en personnage jouant dans le monde comme sur une scène de théâtre masqué! Le point extrême de la dénégation rusée de soi aux fins de manipuler l’opinion d’autrui pour mieux l’exploiter.

L’hypocrisie au pouvoir est l’art sordide et monstrueux des crapules de la politique et des mystificateurs de la religion qui érigent truisme et contrevérités en Vérité immuable et chose sacrée dont la violation à leurs yeux macabres, est péché mortel, crime irrémissible dont ils accusent tous pour faire oublier leur salissure! 

L’hypocrisie est l’intégrisme des apparences qui accoutrent la vérité de l’hypocrite perçu comme autre selon l’image altérée savamment peaufinée qu’il extériorise pour piéger ou culpabiliser autrui en cachant ses motivations abjectes, ses ignobles desseins et sa propre méphitique pourriture.

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE
https://intellection.over-blog.com/article-le-menteur-et-l-hypocrite

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