Le ciel: acceptions physique et métaphysique

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Par Camille Loty Malebranche 

Le ciel, sous toutes ses acceptions, renvoie à la catégorie de l’élévation du regard et de l’ascension de l’être. C’est toujours le sommet surélevé, le toit suprême qui, pour être perçu, exige de lever la tête en direction diamétralement opposée au bas et au sol.

Le ciel physique est l’espace hébergeant l’ensemble des corps et de la matière perceptible et imperceptible, visible et invisible, déterminés par les forces cosmiques connues et inconnues. Cette vision de l’univers ou des univers (le multivers) nous amène à cette vérité du relativisme céleste des corps astraux et autres de l’interstellaire. Ainsi, on peut imaginer, que s’il y avait des humains vivant en famille sur la lune, leurs enfants joueraient, quand vient la nuit lunaire, « au clair de la terre »! C’est que la terre est dans le ciel pour qui la regarde depuis la lune. Les composantes de la voûte céleste et le ciel lui-même sont amovibles selon les repères spatiaux d’un observateur. Pour retourner à nos humains luniens (habitants de la lune), lorsqu’ils regarderaient le sol, ce qu’ils verraient, ne serait que le sol lunaire, c’est seulement en levant la tête pour contempler leur ciel qu’ils y verraient la splendide planète bleue, notre terre bien-aimée.  

CE CIEL QUE TU PORTES EN TOI…

Le ciel métaphysique renvoie au milieu divin (le royaume de Dieu) et à l’appel de Dieu qui invite l’homme à l’évolution vers le supraterrestre, par delà la chair et le sang, au bout de son évolution d’esprit incarné, astreint à se réaliser spirituellement dans la matérialité somatique de son étant terrestre.

L’homme charnel, rivé à la poussière minérale du corps animé par l’énergie vitale dite âme, n’a pas accès au ciel, il ne peut même pas le vouloir. Seul l’esprit aspire à sa patrie vocationnelle. Le ciel est espace ontologique, sphère d’habitation pérenne de l’esprit accompli.    

Dans la vérité mythologisée de la révélation des origines, la Genèse oppose la terre au ciel, Jésus fait du ciel « le trône de Dieu » dont la terre est « le marchepied », alors que, par effet de métonymie, la littérature emploie parfois le ciel comme raccourci verbal pour évoquer Dieu… 

Par delà les images et formes langagières qui sont bien au-delà du simple ludique linguistique ou métalinguistique parce que mystique, ésotérique et théologique, il nous faut ici préciser, que le ciel est en l’homme, « le royaume de Dieu est en vous », dit Jésus. Car c’est de l’intériorité où trône l’esprit, hôte et gérant du corps, que l’homme peut pressentir le ciel, la vocation à vivre au-delà de cette absurdité spatiotemporelle des finitudes. 

Les hommes, de leur religion institutionnelle, cérémonielle, rituelle altérant le cultuel qui est en deçà et au-delà de toute structure artificielle et culturelle, ont toujours cherché en haut, au sens physique somatique, la splendeur céleste… Au temps primitif, Dieu réclamait à l’humanité ignorante, des holocaustes pour faire sentir aux hommes le prix du péché, de la violation de leur nature spirituelle. Toutefois, il est essentiel de saisir que les boucs brûlés, voués à faire monter la fumée odorante vers un hypothétique ciel pour atteindre Dieu perçu tout éthéré par la candeur primitive de l’humanité, n’était rien pour Dieu. Dieu n’a jamais eu que faire des volutes du sacrifice en tant que telles, mais il a voulu montrer la mort qui frappe l’esprit indigne de sa nature et donc errant loin de Dieu sa Source. À Babel, l’homme misait sur la technique du bâtiment  pour atteindre Dieu, confondant le ciel physique à l’espace divin inimaginable. 

Au bout de ces quelques considérations sur le concept de ciel métaphysique, je ne peux que constater un paradoxe à l’échelle de l’homme: le ciel, en effet, change de place selon le stade de conscience qui le perçoit. 

Hier, comme aujourd’hui, l’humanité cherche Dieu dans les méandres des cérémonies et rites, en levant les yeux vers les plafonds des temples et lieux de culte attitrés quand ce n’est dans le plein air, une fixation de l’atmosphère transparente pour contempler le firmament et les astres visibles à partir de la terre croyant y trouver Dieu. Mais les esprits conscients d’eux-mêmes – naguère comme maintenant, au cours de leur passage dans la chair, ce tremplin vers les ailleurs célestes indescriptibles – savent qu’ici-bas, le ciel de l’homme est au fond de lui. C’est dans son for intérieur, en plongeant à l’intérieur de soi, que l’homme finit par trouver ce qui en lui, est originaire du Père céleste. La dimension céleste est donc hypostatique cachée au fond de nous. Seule la conscience métaphysique y a accès. Ceux qui parviennent à la vie spirituelle connaissent le ciel par anticipation et courent vers lui, le faisant primer tout le reste. Les hommes de bonne foi qui sont encore de la foule errante qui va vers le dehors pour trouver Dieu, ont encore à évoluer et se trouver pour rencontrer en eux l’empreinte du Père qui les y appelle et dont ils sont émanation.      

Homme, tu connais inconsciemment le ciel mais l’éclipse en tes perceptions enfouies! Le ciel, hélas, comme ta nature dérobée par les apparences, est effacé, voilé derrière les écrans de poussière de la terre et les brouillards épais de tes oublis! Tant que la terre et ta matérialité d’être au monde primeront en tes perceptions, le ciel, ô homme, restera tapi sous le voile de ton humanité perdue, oubliée dans l’immédiateté du tangible et l’illusion du sensible! Les sens et le monde exclusif du présent qu’ils imposent à ta conscience réduite, ténue et déviée, sont effaceurs de ta propre présence à toi, et te voilà présence absente dans ton errance mentale sans destin et sans ciel.

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

Lire l’article sur le blog de l’auteur Intellection

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