Holly Jean-Philippe et la vocation d’enseigner

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La Gonâve / Journée nationale des enseignants : Holly Jean-Philippe, et la vocation d’enseigner

Par Idson Saint-Fleur

Holly Jean-Philippe couramment appelé « Maître Holly » est de ceux qui croient dur comme fer dans le pouvoir de l’éducation de transformer l’Homme et la communauté. Toute sa vie, il demeure un homme du livre ; un homme qui encourage les jeunes à s’adonner à leur éducation. Du haut de ses 86 ans, il les encourage toujours – et même de jeunes adultes -, à se former davantage, à apprendre un métier, à s’investir dans une activité financière dans le but de gagner dignement leur vie.

Les soubresauts d’un parcours académique

Enfant, Holly Jean-Philippe est initié aux premières notions de lecture et d’écriture, à l’instar de quelques marmots de son âge, à l’école baptiste de Mare-Sucrin (La Gonâve) dirigée à l’époque par Necker Pierre. Cette école rurale est en réalité un centre de lecture et d’écriture, car à l’exception de la grammaire et du calcul, les autres disciplines sont peu ou ne sont pas enseignées.

Constatant très peu de progrès scolaire de la part du garçon âgé de 14 ans (les enseignants travaillent le plus souvent avec les grands élèves délaissant les plus petits), ses parents l’envoient, en 1951, au bourg de Pointe-à-Raquettes où il est reçu en première classe enfantine à l’école baptiste dirigée par Joseph Laurore assisté de deux ses garçons, Michel et Joël , et de la demoiselle Ida Erasme. Parmi ses camarades de classe, l’on retrouve Josué Laurore, son frère de baptême, un autre fils du respectable directeur.

Durant sa résidence scolaire à Pointe-à-Raquettes, Holly Jean-Philippe est hébergé chez sa marraine, Mme Alcius Angervil, habitant dans la localité de « Pèlen-Jènjan ». C’est dans cette maison que le jeune élève fera la connaissance de la demoiselle Sylianie Georges qui deviendra plus tard la dame Lenès Veillard.  

Le séjour à Pointe-à-Raquettes dure deux ans. L’adolescent fait des progrès appréciables en lecture et écriture. Par contre, il est peu initié aux notions mathématiques.  

En 1953, encouragés par le retour de Michel Laurore à l’école baptiste de Mare-Sucrin, ses parents le font regagner le toit familial. Il passera une seule année dans cette institution scolaire de sa communauté natale.  

L’année académique 1954-1955, l’écolier est admis en classe d’élémentaire I au lycée Alexandre Pétion. Il y passe avec succès, en 1958, ses examens de fin d’études primaires. Il ne change pas d’institution scolaire durant les deux premières années du secondaire. Admis en classe de brevet, alors il décide de traverser, en 1960, au lycée Toussaint Louverture. Malheureusement, il ne parvient pas à boucler l’année scolaire étant contraint en 1961 de retourner à La Gonâve.

Le dévouement infrangible d’un enseignant

Vivement animé du désir d’initier quelques enfants de la communauté rurale de Mare-Sucrin (La Gonâve) à la vie scolaire, durant les vacances d’été, Holly Jean-Philippe donne des cours particuliers aux frais de 50 centimes ou d’une gourde par apprenant. Entretemps, pour un salaire mensuel de 125 gourdes, il enseigne durant  quelques mois à l’école baptiste de la localité où il retrouve Josué St.-Vil, l’un de ses anciens maîtres. L’expérience ne dure pas en raison d’une brouille avec le pasteur Reynold Jean-Baptiste faisant aussi office d’économe de toutes les écoles baptistes de l’île.

En 1967, Holly Jean-Philippe va avoir l’opportunité de s’adonner complètement à sa passion de toujours : l’enseignement. Cette année-là, il est nommé directeur-maître à l’école nationale de Nan-Café. Il y est resté durant deux années (1969). Sur recommandation de l’inspecteur scolaire Walter Souverain, il est transféré à l’école nationale de Palma. Après deux mois, il regagne son poste à Nan-Café.

 En 1970, Obrane Lindor affecté l’année précédente à l’école nationale de Boucan-Lamarre (section communale de Petite-Anse) s’invente tous les prétextes pour ne pas y rester. En partie, sur influence du pasteur Féodor Lindor, l’inspecteur Walter Souverain opère une permutation : Holly Jean-Philippe est envoyé à Boucan-Lamarre tandis qu’Obrane Lindor est installé à Nan-Café. Durant deux années (1970-1972), Holly Jean-Philippe s’occupe chaque jour – comme maître unique de l‘école -, des marmots des classes enfantines jusqu’aux plus grands qui sont en Moyen I et Moyen II.

En 1972, tombe un autre ordre de transfert pour l’école nationale de Bois-Brûlé, dans les environs de Nan-Café. A cause de ses attachements de cœur, maître Lys Denis, muté à Palma, refuse d’abandonner son poste. D’où cet arrangement qui conduit pour la deuxième fois Holly Jean-Philippe à la direction de l’école nationale de Palma. Il y passe trois ans, soit de 1972 à 1975.

En 1975, l’inspecteur Walter Souverain, une fois de plus, l’appelle aux fins de redresser la situation à l’école nationale de Mare-Sucrin dont la destinée était confiée à Merilhomme Charles. Cette affectation dure cinq ans (1975-1980) au cours desquels il obtient la collaboration de Mme Edner Joseph (née Lorette Dessaint), puis de sa sœur Suzie Dessaint. Comme directeur-maître, il perçoit un salaire mensuel de 500 gourdes.

A cause de ses ennuis de santé, Holly Jean-Philippe sollicite et obtient sa retraite anticipée. En 1980, après 13 années de service dans le secteur public de l’éducation, il a droit à une allocation mensuelle de 275 gourdes.

Ne pouvant pas contenir sa passion de l’enseignement, il accepte de reprendre du service à l’école wesleyenne de Platon-Balai(Picmy). Cette expérience dans le privé dure cinq ans (1981-1986). Dans l’intervalle, comme leader évangélique, il fonde une petite école, attachée à la station Du Nazaréen de Picmy, dont la performance a eu des échos lointains. C’est dans cette école, en 2010, qu’il dépose définitivement la craie au terme d’une carrière enseignante longue de 33 ans.  Pourtant, âgé de 86 ans – en 2023 -, il reste toujours un « maître d’école pour ses petits-enfants » avec de la passion dans le dire et dans les gestes pédagogiques.  

Petite-Source (Zèb-Ginen), La Gonâve

Idson Saint-Fleur

saintfleuri14@yahoo.fr

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