Le corps de Charlot Jeudy, militant des droits des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenre (LGBT), a été découvert, le 25 novembre 2019, mutilé et étranglé. Deux ans plus tard, l’enquête est toujours au point mort, au grand dam de son entourage.
Par : Vitalème ACCÉUS
Lundi 29 novembre 2021 ((rezonodwes.com))–
C’est dans un quartier modeste de Delmas, ce 25 novembre 2021, à deux pas du Bureau de Kouraj, que nous rencontrons un collègue de Charlot Jeudy sous couvert de l’anonymat, retrouvé assassiné le 25 novembre 2019.
Des enfants se baladent dans une allée défoncée, entre les maisons. À l’intérieur de l’une d’elles, dans la pénombre, quelques amis de Charlot, militants de la cause LGBT (Lesbiennes, gays, bisexuels et transgenre), sont venus discuter sur les activités à entreprendre lors de la commémoration de la deuxième année de son assassinat.
L’émotion est palpable. Enfoncée dans une chaise, face à la galerie qui donne sur la rue, le collègue de combat de Charlot Jeudy s’interroge sur l’utilité de revenir, une nouvelle fois, sur des faits qui n’intéressent personne, et surtout pas la justice haïtienne. Ce qui le rend moins malheureux, c’est de voir Charlot Jeudy survivre un peu, à travers ses amis. Pour le reste, il n’a plus aucun espoir.
Deux ans après la mort de son ami, malgré l’assurance du président d’alors, Jovenel Moïse, de faire la lumière sur cette affaire, malgré la pression internationale, particulièrement celle des ambassades, l’enquête, sur laquelle la DCPJ fait le point, n’a apporté aucune réponse.
Personne ne semble aujourd’hui espérer voir éclater la vérité sur l’assassinat de Charlot Jeudy.
Deux ans après les faits, trop de pistes restent inexplorées. Où est passé l’ordinateur du militant et les conversations téléphoniques étant difficilement exploitables, les menaces reçues restent un mystère. D’autant que la victime elle-même, habituée au climat hostile envers les militants LGBTI, n’y prêtait pas attention. « Il les a toujours prises à la légère, il était très jovial à cette période », se souviennent ses amis.
»Mystère également en ce qui concerne le lieu du meurtre. La chambre n’ayant pas été endommagée, et aucune trace de sang n’étant visible sur les photos, que nous avons à notre possession, le corps aurait pu être déplacé. De plus, une jeune voisine aurait déclaré, dans un témoignage à un ami de la victime : « Ça m’étonne Charlot soit mort là, je l’aurais entendu. »
Surtout, la piste de l’entourage LGBTI, et du potentiel crime passionnel, paraît bien mince. D’un autre côté, « Les marques sur son corps témoignent d’un acharnement réel », souligne encore l’un de ses proches. « Il était une cible, peut-être d’un point de vue personnel, mais aussi d’un point de vue plus large, c’est un signal fort que ses assassins ont envoyé aux activistes LGBTI en Haïti”, ajoute-t-il.
Stéphane et d’autres militants de Port-au-Prince, énoncent ce que beaucoup ont pensé à la vue du cadavre : « Au regard des mutilations, ça peut difficilement être un crime passionnel ». Et conclurent-ils : « ’Ils n’aimaient pas le corps. »
Enfin ses collègues se souviennent toujours de sa philosophie en matière de protection des droits humains et de la communauté LGBTI en général: “Les droits humains, ce n’est pas une table garnie d’un buffet où chacun vient sélectionner la nourriture qui lui plait en laissant de côté le reste ».
Un défenseur des droits a l’obligation de s’intéresser aux droits de tous les êtres humains, indépendamment de leurs conditions”.
Par contre deux ans après cette question reste un mystère : Qui a assassiné Charlot Jeudy , leader des LGBTI en Haïti?
Vitalème ACCÉUS
acceus2009@gmail.com