Daly Valet : le temps présidentiel

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Me Sonet St Louis et le temps présidentiel: entre le clair et l’obscur

Par Daly Valet

Commençons d’emblée par rectifier une erreur fatale dans le texte de Me Sonet Saint Louis titré  » Le temps présidentiel  » . Le candidat Jovenel Moïse, contrairement aux affirmations plutôt surprenantes de Me St Louis, n’a pas été proclamé président en octobre 2016.

L’élection présidentielle a lieu le 20 novembre 2016. En Octobre 2016, nous étions en pleine crise post-Matthew, ce cyclone qui a dévasté le Sud du pays. Mon très cher ami-frère, Sonet St Louis, était-il en état prolongé de méditation intellectuelle léthargique sous ses bambous de la Gonâve durant les mois d’octobre et de novembre 2016 ?

Les résultats définitifs des élections de novembre de 2016 ont eté proclamés par le CEP début janvier 2017. Notre ami de verve et de plume doit savoir que notre droit électoral prévoit une phase contentieuse relativement longue après la publication de résultats électoraux préliminaires. Il est légalement, voire matériellement impossible, pour un élu en Haïti de présenter serment le lendemain de son élection. Jovenel Moïse a prêté serment le 7 février 2017, soit un mois après la proclamation des résultats définitifs. L’analyse savante des réalités légales et constitutionnelles se prête mal aux voltiges fabuleux de la pensée magique.

Cette erreur factuelle majeure dans le texte de Sonet St Louis bousille toute son argumentation sur la question du temps électoral se rapportant au président Jovenel.

Des leaders politiques et autres voix d’influence, militant pour le départ du pouvoir de l’actuel locataire du Palais national en février 2021, citent le texte de Me Sonet St Louis en appui à leur combat. Aucun d’entre eux n’a, cependant, relevé cette faille de taille qui invalide une portion importante de l’argumentation fleuve de l’auteur. Comme si ces pontes de nos podiums médiatiques n’étaient que des « Jakorepèt » inaptes à évaluer un texte pour en extraire le bon grain et en isoler l’ivraie.

C’est un peu forcé et surtout inapproprié le parallèle établi par l’auteur entre le cas du président Jovenel et celui du président Aristide, lequel, nous dit lMe St Louis, n’a jamais pu compléter un mandat ferme de 5 ans. Il n’y a pas vraiment de rapport d’équivalence entre ces 2 cas de figure.

Il nous faut rappeler que le président Aristide jouissait d’un certain nombre de privilèges présidentiels extraordinaires durant son exil forcé de 1991 à 1994. Nous sommes ici dans le cas de figure d’un président en exercice partiel et limité de ses prérogatives. Autement dit, en février 1996, M. Aristide avait bel et bien bouclé son mandat presidentiel de 5 ans. Évidemment, le coup d’État de septembte 1991 avait constitué un facteur limitatif et contraignant dans la jouissance pleine et entière par l’élu du 16 décembre 1990 de ses prérogatives de président. Si le président Aritstide avait en plan de récupérer les 3 ans de son mandat passés en exil, il aurait dû renoncer aux privilèges princiers et somptueux qui étaient les siens à Washington à titre de président légitime et constitutionnel de la République d’Haïti. En 2004, le président Aristide a bel et bien été l’objet d’un « coup d’Etat international « . Sonet St Louis a bien fait de citer le regretté professeur Leslie Manigat qui a eu les mots justes pour qualifier les événements ayant abouti en 2004 à l’interruption brutale d’un mandat présidentielt exercé dans la brutalité par Jean Betrand Aristide.

Le mérite du texte de Me Sonet St Louis n’est pas dans son analyse de la gestion du temps présidentiel par les présidents Jocelerme Privert et Jovenel Moïse. On a vu qu’il a amplement erré dans les temporalités historiques, les rapports de fausse résonance qu’il établit entre des contextes politiques différents, et dans son appréciation du moment électoral de 2016. La pertinence de la démarche de Me St Louis, son utilité politique dans la présente conjoncture, la valeur argumentative de son discours, sont surtout dans la mise en perspective globale et brillante qu’il a faite des temps constitutionnel, législatif et présidentiel.

C’est justement, dans cette mise en relation de ces trois (3 ) temps, que tout esprit lucide et non partisan se voit contraint d’admettre avec Me Sonet st Louis que le mandat du président Jovenel prend fin indubitablement le 7 février de 2021. Au-delà, nous serons dans une autre histoire, en fait la même histoire têtue qui, généralement, nous montre des présidents poussés à la sortie par la rue ou des forces extérieures au lieu de choisir d’eux-mêmes de regagner dignement leur demeure de citoyens modèles et de serviteurs exemplaires de la République par les voies constitutionnelles et légales qui se sont toujours offertes à eux .

DV

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