24 anciens planteurs de canne-à sucre révèlent les causes principales de la fermeture de l’Usine Sucrière Jean-Léopold Dominique de Darbonne

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Voici ce que l’équipe de recherche de la Diaspora Université a apprise à la suite d’interviews à réponses ouvertes qu’elle a conduites entre le 12 Juillet 2019 et 12 Août 2019 auprès de 24 anciens planteurs de canne-à-sucre de la commune de Léogâne, plus spécifiquement des sections communales de Dessources, de Petite-Rivière, et de Grande-Rivière

Vendredi 16 août 2019 ((rezonodwes.com))– « Lorsque l’Usine Sucrière Jean-Léopold Dominique de Darbonne était en train de fonctionner à Léogâne, il y avait plus de 250 moulins qui, eux-aussi, recevaient la canne-à-sucre pour la broyer en sirop qui plus tard serait transformé en clairin par les guildives, » a rapporté un ancien planteur de canne-à-sucre. « La canne a fait plus (m pa di mie non) que la canne ; nous pouvions la transformer et la vendre sous forme ‘vin kann, sirop et clairin » a avancé l’un deux.

« Quand j’ai vendu toute ma canne à l’usine, j’ai perdu près de 35% de ma recette habituelle, car le clairin était plus rentable que le sucre et que la canne n’était pas exploitée pour sa capacité totale. » Un autre fermier a rapporté que l’usine lui a encouragé à planter plus de cannes, mais la terre ne pouvait pas répondre aux exigences de l’usine à cause des saisons de pluies et de récoltes qui étaient trop écartées.  

Les planteurs, lesquels ont été choisis par convenance, ont dit qu’il y avait beaucoup plus d’argent à faire dans la production du clairin qu’il y avait à faire dans la production du sucre. Ceci a été aussi que les fermiers vendaient leur vin kann, sirop et leur clairin à travers le pays durant toute l’année ; ce qui leur a permis de renter de l’argent à n’importe quel moment de cette même année. Cependant, une fois qu’ils aient vendu leur canne-à-sucre à l’usine, ils n’avaient aucune autre source de revenus ; les laissant ainsi sans espoir et sans emplois entre les saisons sèches et les saisons des prochaines récoltes.

Les fermiers interviewés ont tous avoué, sans peur d’être cloués au pilori, que la faible production de la canne et la compétition entre l’usine et les distilleries locales n’étaient pas la cause de la fermeture de l’usine, mais plutôt l’arrivée de l’éthanol sur le marché local qui « mete n sou bouda nèt»  Selon les fermiers, l’éthanol était du faux clairin obtenu en mélangeant un poison chimique avec de l’eau et du bon clairin. « Galon éthanol la tap vann 20 goud pandan ke galon klere pa nou an (kann kif è l) tap vann 50 goud.

La vente de l’éthanol était une compétition déloyale qui a démotivé le planteur et du même coup affecté la capacité de la production de l’usine qui ne comptait que sur la canne léogânaise pour produire son sucre. « Si moun pa achte kleren pa n lan e se kleren kontrebann lan yap achete paske l pi bon mache, se sèl foli ki pou ta fè n ap kontinye ap plante kann toujou » a déclaré Frè Milò qui a vendu deux carreaux de terres à une organisation internationale pour l’édification d’un orphelinat et d’une église protestante.

Les planteurs veulent replanter la canne, car l’éthanol n’est plus une menace pour la production du clairin local. Ils sont pour la réouverture de l’usine puisque les moulins et les guildives n’existent presque plus à Léogâne pour compéter contre l’usine.  Onze propriétaires de moulins et de guildives, qui n’étaient pas part de cette recherche, ont dit que l’usine a beaucoup plus de chances pour réussir aujourd’hui qu’il en avait 20 ans de cela puisque Léogâne ne peut plus reconstruire sa distillerie.

La majorité des terres existent encore, sauf qu’aujourd’hui, elles sont plantées en autres denrées agricoles. Si l’usine est rouverte, Léogâne ne plantera que pour l’usine et l’usine pourrait recevoir de la canne d’autres communes au cas où le gouvernement aurait décidé à financer la production de la canne sur tout le territoire du pays. « Fòk leta bay kann lan mem enpòtans li bay banann lan » a fait ressotir Lahens qui aujourd’hui est un propriétaire de boissons gazeuses. « Se tap pi gwo byen yo tap fè peyi a si yo ta rebann izinn lan» a crié avec joie un ancien planteur qui aujourd’hui est un houngan et un fier propriétaire d’une gaguère. M jete manchèt mwen, men m pa jete metie m, depi izinn lan reouvè, m ap kraze demanbre a ak gagè a pou m al replante kann » il a continué.

Les interviews ont démontré que, contrairement aux croyances populaires, les causes principales de la fermeture de l’usine étaient les mauvaises prévisions de l’Etat ou la croyance de l’Etat que Léogânaise à elle seule pouvait alimenter l’usine ainsi que la vente incontrôlée de l’éthanol sur le marché ; une vente pour laquelle les anciens planteurs blâment les ministères de la Santé Publique et de la Population et du Commerce et de l’Industrie qui n’ont pas intervenu pour protéger la production nationale.  

Les résultats ont exposé la ligne d’en bas nécessaire pour assurer la rentabilité et la profitabilité de l’usine au cas où elle serait rouverte ; planter la canne à travers le pays et protéger le marché national contre la contrebande ou l’invasion future de l’éthanol ou tout autre forme de clairin artificiel.

Bobb RJJF Rousseau, PhD
Public Policy and Administration
Diaspora UniversiteThe Blog of Bobb RJJF Rousseau

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