Opération à Grand Ravine : de l’intervention policière à l’exécution sommaire

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Le lundi 13 novembre 2017, au réveil, les habitants de Grand Ravine et de ses environs ont remarqué la présence dans la zone, de plusieurs unités spécialisées de la Police Nationale d’Haïti (PNH) qui menaient une opération. En raison du caractère alarmant des informations qui circulaient autour de cette opération et en vue de s’enquérir de la situation, le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) a, du 15 au 28 novembre 2017, diligenté une enquête. Le RNDDH se propose de partager avec tous ceux que la question intéresse, les résultats de ses recherches…




Jeudi 30 novembre 2017 (rezomontreal.ca).- Des nombreuses versions du déroulement de l’opération du 13 novembre 2017 qui ont été rapportées, le RNDDH a décidé de n’en garder que les informations constantes, corroborées par les différentes personnes rencontrées dans le cadre de cette enquête.

D’entrée de jeu, le RNDDH salue toute initiative de la PNH visant à déloger, à maîtriser et à arrêter les individus armés qui, au sein de la population, sèment la terreur et le deuil. Conséquemment, des opérations policières d’envergure au niveau des zones dites de non droit ont toute leur importance car, souvent ces individus armés prennent des zones entières en otage et y font la loi, constituant ainsi de véritables défis pour l’institution policière.

Le RNDDH note que le 13 novembre 2017, au lancement de l’opération, les policiers ont été accueillis dès cinq heures 30, par des tirs d’armes automatiques, ce qui laisse supposer que les informations relatives à cette intervention avaient déjà circulé et que les bandits les attendaient. Le RNDDH regrette que l’opération de Grand Ravine ait été réalisée au surlendemain de celle de Jalousie. Pour l’organisme de droits humains, l’institution policière aurait dû prendre le temps d’évaluer son intervention à Jalousie et tirer les leçons qui s’imposent pour mieux planifier celle de Grand Ravine. Le RNDDH attire l’attention sur le fait que le Collège Evangélique Maranatha est utilisé depuis longtemps, comme un lieu de refuge par la communauté, ce qui n’exclut aucunement les bandits armés.




Cependant, au début de l’opération, les personnes dont des employés qui se trouvaient au Collège Evangélique Maranatha ne se sont pas inquiétées puisqu’elles y sont restées en dépit de la présence des agents de la PNH. Conséquemment, c’est l’avènement d’un fait nouveau qui a porté les policiers à changer de comportement. Et, vu toutes les informations recueillies à ce sujet, le RNDDH peut confirmer qu’il y a eu des échanges de tirs entre policiers et bandits dans l’enceinte même de l’établissement scolaire.

A ce stade, le RNDDH, tout en questionnant la présence de ces individus armés sur le campus de l’établissement scolaire, confirme que l’opération du 13 novembre 2017 constitue en fait une énorme bévue policière. En effet, au moins cinq (5) des victimes tuées ont reçu des balles à la tête, au cou et à la poitrine, ce qui laisse présumer soit d’une capacité extraordinaire des tireurs soit de l’exécution sommaire de celles-ci. De plus, aucune arme n’a été récupérée par la PNH. Par conséquent, les personnes tuées n’étaient pas des combattants.

Par ailleurs, l’enseignant Ludes LUGAINE avait été invité à faire le mort par l’un des policiers, ce qui démontre clairement qu’à un certain moment, ils s’adonnaient à des exécutions sommaires.

Le RNDDH estime que si l’information rapportée aux agents de la PNH relative à la présence sur les lieux de bandits armés, avait été mieux traitée, le décès de ces deux (2) policiers et des neuf (9) autres membres de la population, aurait été évité. Les bandits armés qui avaient en leur possession des armes lourdes et sophistiquées, auraient été capturés.




Fort de ce qui précède, le RNDDH recommande aux autorités concernées de :
• Enquêter sérieusement et objectivement sur l’opération du 13 novembre 2017, en vue d’identifier les responsables des exactions commises et de les sanctionner ;
• Trouver d’où proviennent les armes sophistiquées qui sont en possession des bandits de Grand Ravine et de Tibwa ;
• Traduire par devant les autorités concernées, les auteurs et complices de ceux qui arment la population ;
• Déconstruire le problème de l’insécurité généralisée dans le pays et dans les zones de non-droit en particulier, en vue d’identifier les causes principales et d’agir sur elles, pour une solution durable;
• Prendre toutes les mesures en vue d’accompagner les parents des policiers et des membres de la population, tués le 13 novembre 2017 ;
• Traiter sereinement les dossiers des personnes arrêtées dans le cadre de cette opération.

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