La description factuelle des attaques armées perpétrées dans le département de l’Artibonite de janvier à septembre 2025 prouve que la violence s’y est indubitablement installée. En effet, huit (8) des dix-sept (17) communes du département en question ont subi, pour la période considérée, vingt-quatre (24) massacres et attaques armées. Certains de ces épisodes de violence ont été perpétrés dans des villes alors que d’autres ont été enregistrés dans des localités. Les communes affectées par cette violence armée sont celles de Gros – Morne, La Chapelle, L’Estère, Liancourt, Marchand-Dessalines, Montrouis, Petite – Rivière de l’Artibonite et Verrettes. Il s’agit, pour le RNDDH, d’une situation alarmante contre laquelle des actions doivent être rapidement entreprises, en vue d’éviter l’aggravation de la situation, et l’extension de la violence armée dans les neuf (9) communes restantes du département.
Au cours de ces épisodes de violence, des dizaines de personnes ont été assassinées, parmi lesquelles le RNDDH a recensé quatre-vingt-quatre (84) dont quatre (4) agents de la PNH et deux (2) agents de la MMAS. Ce bilan est loin d’être exhaustif.
Au moins six (6) institutions étatiques, dont trois (3) commissariats, un (1) sous – commissariat, deux (2) tribunaux de paix, ont été vandalisées et/ou incendiées. Des centaines de maisons ont été pillées et/ou incendiées. Plusieurs véhicules dont quatre (4) blindés et une (1) voiture de l’institution policière ont été incendiés, en plus des dizaines de motocyclettes qui ont été volées ou carbonisées et dont plusieurs appartenaient aussi à l’institution policière ou encore à des policiers. Trois (3) prévenus qui se trouvaient au commissariat de Marchand-Dessalines se sont évadés à la faveur de l’attaque de cette commune.
Avec huit (8) attaques armées enregistrées de janvier à septembre 2025, Petite-Rivière de l’Artibonite est la commune la plus exposée aux actes attentatoires aux vies et aux biens, et fait figure de la commune la plus convoitée par les bandits armés. Toutefois, il convient de souligner que l’attaque armée du 24 mai 2025 à Préval, une localité de ladite commune, a été orchestrée et perpétrée par des membres de La Coalition, une brigade d’autodéfense elle-même composée de brigades des localités de Canaux, Chandelle, Labady, Liancourt et de Jean-Denis.
Une autre situation atypique est celle de la commune de Montrouis où deux (2) localités de la deuxième section communale, à savoir Piatre et Délugé s’affrontent depuis 1990, dans un conflit terrien qui n’en finit pas et dans lequel l’Etat n’a jamais pensé à intervenir. Et, depuis quelque temps, ce conflit terrien s’est transformé en une guerre des gangs au détriment de la population de ces deux (2) localités.
Les impacts de cette violence armée sur la population de l’Artibonite sont énormes : des milliers de personnes ont dû abandonner leur foyer. Des champs entiers ont été abandonnés par les agriculteurs ou dévastés par les bandits armés. Des moulins comme ceux de Bèlanje, une localité de L’Estère, ont été incendiés. Les activités financières et commerciales ont drastiquement baissé. La peur s’est installée au sein de la population car les bandits ainsi que certains membres de brigades d’autodéfense rançonnent les cultivateurs et exigent que leurs produits soient partagés avec eux.
Les différentes autorités locales, judiciaires et policières avec lesquelles le RNDDH s’est entretenu dans le cadre de ce travail d’investigation, ont toutes reconnu que la situation sécuritaire de l’Artibonite est déjà très alarmante et qu’elle a tendance à s’aggraver. Si la vice – délégation avance que des mesures ont été adoptées en vue du contrôle de la situation, les agents intérimaires de l’Exécutif regrettent de leur côté la facilité avec laquelle les attaques sont menées par les bandits armés contre la population, sans résistance effective des agents de l’institution policière.
En écho, plusieurs riverains estiment qu’aucune mesure n’a effectivement été adoptée par la PNH en vue de prévenir la perpétration des actes de violence dans le département de l’Artibonite. Et, pour corroborer cette affirmation, l’institution policière elle-même reconnait et déplore son état de dénuement total qui oblige ses agents à se cantonner dans les postes de police du département, et à se défendre des attaques armées des bandits contre les fiefs desquels ils ne peuvent ni préparer ni lancer des offensives.
Les différents tribunaux de paix des localités en proie à la violence armée n’ont à date, rien pu faire de concret pour aider à la manifestation de la vérité et au jugement des bandits armés qui sèment le deuil et la terreur dans le département de l’Artibonite. Les parquets près les tribunaux de première instance des Gonaïves et de Saint-Marc de leur côté, n’ont encore rien entrepris, qui pourrait donner à croire que l’action publique a été mise en mouvement contre tous les bandits armés impliqués dans les crimes de masse et les violations des Droits Humains enregistrés dans le département.
Fort de ce qui précède, le RNDDH exige des autorités étatiques l’adoption de mesures immédiates visant à protéger la population de l’Artibonite ; et leur recommande de : • Fournir à l’institution policière, les ressources nécessaires en vue de reprendre le contrôle de tout le territoire du département de l’Artibonite ;
• Rétablir les conditions minimales de sécurité dans le département de l’Artibonite, en vue de faciliter le retour des personnes déplacées et de leur permettre de vaquer à leurs occupations ;
• Fournir, selon leurs besoins médicaux, financiers, psychologiques, assistance aux victimes et proches de victimes des actes attentatoires aux vies et aux biens enregistrés dans le département de l’Artibonite de janvier à septembre 2025 ;
• Mettre à la disposition des forces de l’ordre, le montant total des frais d’intelligence pour qu’elles puissent s’enquérir des activités des gangs armés sur le territoire national et éviter que tout le pays ne tombe sous le joug des bandits armés.