Selon Tom Fletcher, l’absence de nouveaux engagements financiers risque d’interrompre les programmes vitaux d’alimentation, de santé et de protection pour des centaines de milliers d’Haïtiens. L’ONU appelle ainsi la communauté internationale à agir rapidement pour éviter une aggravation de la catastrophe humanitaire déjà marquée par l’insécurité généralisée et les déplacements massifs de population.
Le Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires humanitaires, Tom Fletcher, a averti mardi qu’Haïti fait face à un effondrement imminent de l’aide humanitaire faute de financements. En visite dans le pays, où il a échangé avec des enfants victimes du conflit armé et de la crise alimentaire, Fletcher a rappelé que moins d’un tiers des besoins fixés par le plan humanitaire 2025 ont été couverts à ce jour.
À Port-au-Prince, il s’est rendu dans un site de déplacés internes installé dans les locaux du ministère des Travaux publics (MTPTC), qui accueille près de 5 000 personnes, dont 39 % d’enfants, ayant fui les violences armées qui ont ravagé la capitale en février dernier. Les conditions d’hébergement précaires, aggravées par l’exiguïté et l’absence d’infrastructures adaptées, y traduisent la vulnérabilité extrême des familles.
Les témoignages recueillis reflètent une détresse profonde. Roudy Jean, déplacé, a exprimé le besoin de « vivre normalement, comme dans le reste du monde ». Pour Cashmina Jean-Michel, ancienne propriétaire d’un salon de beauté, la fuite sous les tirs à l’aube s’est soldée par la perte totale de ses biens et la séparation d’avec une partie de ses enfants. L’angoisse de survivre dans un espace exigu, sans perspective de rétablir un cadre de vie digne, illustre la gravité de la situation. Innocent Fagneau, vice-président du site, a souligné la rareté des vivres, rappelant que les rations s’épuisent dès la mi-journée, laissant des centaines de personnes sans repas.
Face à ces réalités, Tom Fletcher a livré des propos empreints de colère et de consternation. Déplorant que des familles aient été déplacées à plusieurs reprises par les violences, il a insisté sur leur aspiration à l’éducation, à la santé, à l’accès à l’eau potable et, plus largement, à l’espérance. « Ce n’est pas suffisant. Je suis furieux et même honteux, au nom du monde, que nous n’ayons pas trouvé les ressources pour leur venir en aide », a-t-il affirmé, appelant à une mobilisation internationale immédiate pour combler l’écart de financement qui menace d’interrompre les programmes vitaux d’ici la fin septembre.
La visite s’est également poursuivie au centre de formation OCCED’H, destiné aux jeunes issus de quartiers affectés par la violence ou vivant dans des camps de déplacés. Ce centre, qui accueille actuellement près de 370 enfants et adolescents, dispense des formations pratiques en artisanat, coiffure, mécanique et d’autres métiers. Pour Phanie Sagesse, élève, l’apprentissage du travail du cuir offre une chance réelle d’émancipation économique. Le président du centre, Luca Chrislie, a rappelé l’importance de fournir aux jeunes les moyens de se reconstruire, malgré les conditions d’extrême précarité.
En clôture de sa mission, Fletcher a souligné que l’avenir d’Haïti repose non seulement sur l’aide immédiate, mais aussi sur la capacité des communautés à rebâtir un tissu social. Pour lui, l’investissement dans la jeunesse et les services de base constitue un rempart contre le désespoir et un point d’appui pour la reconstruction nationale. Cette visite, tout en illustrant les besoins urgents, a réaffirmé l’engagement des Nations Unies et de leurs partenaires à soutenir la population haïtienne dans un contexte d’insécurité croissante et d’accès limité aux services essentiels.