L’éditorial du Haïti-Observateur dénonce l’entêtement du CPT et du Premier ministre de facto, Alix Didier Fils-Aimé, à organiser des élections et un référendum malgré l’insécurité, les irrégularités électorales et les critiques nationales et internationales. Les avertissements de l’OEA, du Barreau de Port-au-Prince et d’experts en matière électorale sont ignorés, tandis que des soupçons de corruption et de manipulation des listes persistent. Le journal appelle à une mobilisation nationale et de la diaspora pour contraindre les tuteurs internationaux à agir contre ces dirigeants illégitimes. Machan’n peyi.

Malgré les nombreuses interventions dénonçant les graves dangers qui mena-cent la tenue des élections générales, à la fin de cette an née, l’équipe au pouvoir, soucieuse de grossir ses comptes en banque que de respecter ses engagements, à l’égard du peuple haïtien, met le cap inexorable-ment sur ce projet. Tant du côté de l’Exécutif multicéphale de neuf mem bres formant le Conseil présidentiel de transition (CPT) que du gouvernement dirigé par le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé, c’est la surdité totale, par rapport aux avertissements plétho-riques lancés dans le débat public et dans la presse en général, mettant en garde l’exécution de ce projet, imposé par la communauté internationale, ins-crit dans la feuille de route devant être exécutée par les autorités intérimaires.
Bien que, constatant la grave erreur commise, dans le choix des personnes formant l’équipe présidentielle, désor-mais trouvée inqualifiable et non quali-fiée pour remplir une telle tâche, les patrons des dirigeants intérimaires haï-tiens affichent un silence de plus en plus retentissant sur leur exigences élec torales, telles que exprimées dans l’or dre de marche original. Pourtant, le CPT et la primature n’arrêtent pas de faire la promotion de l’horaire électoral initialement annoncé, en sus de consa-crer des millions de dollars dans le financement du projet référendaire, étape qui, en théorie, précède le dérou-lement du scrutin.
En dépit des mises en garde venues de nombreux secteurs du pays mettant en relief les nombreuses contradictions relevées dans l’avant-projet constitu-tionnel, publié par le « Comité de pilo-tage de la Conférence nationale », une structure créée par décret présidentiel, le 17 juillet 2024, le pouvoir ne démord pas, continuant ses démarches électo-rales. Si la femme et les hommes au pouvoir, au sein de l’administration inté rimaire, passent outre aux avertisse-ments anti-élections venant de diffé-rentes entités nationales, ils n’affichent pas une meilleure attitude à l’égard des réserves formulées par l’OEA. Puis que, à peine avait-il pris charge, après son élection à la tête de cette organisa-tion, le nouveau secrétaire général, Al bert Ramdin, n’a pas raté l’occasion de sa première intervention publique pour rejeter l’horaire adopté par le CEP concernant l’organisation du prochain scrutin.
En effet, à l’occasion de sa première déclaration publique, immédiatement après son entrée en fonction, M. Ramdin a déclaré : (…) « des élections ne peuvent pas se tenir dans le chaos. Haïti doit d’abord se doter d’un gou-vernement de transition stable et cré-dible ». Aucun doute, le nouveau patron de l’OEA a rejeté la tenue des élections, dans les présentes conditions sécuritaires, en plus de dénoncer l’ab-sence de crédibilité de l’actuel institu-tion présidentielle. Il est opportun de souligner aussi que, aucune autre entité de la communauté internationale n’a formulé son opposition à de telles déclarations. Selon toute vraisemblan-ce, Albert Ramdin ne parle pas isolé-ment, quand il formule des réserves, par rapport au scrutin programmé par l’équipe intérimaire.
Soucieux d’éviter la tenue des élec-tions, sous la houlette des criminels se faisant des alliés des autorités en place, donc susceptibles d’être instrumentali-sés, dans l’orientation du choix de cette poignée d’électeurs, qui pourraient par-ticiper à cette mascarade électorale organisée, dans les présentes condi-tions, s’élèvent des voix patriotiques pour dire non au « scrutin dirigé et piégé ». On peut se faire une idée à quoi s’attendre, si seulement une infirme majorité de votants est en mesure de faire le déplacement vers les bureaux de vote. Quand on sait que moins d’un million de citoyens ont participé aux élections ayant porté Martelly au Palais national, et à peine 500 000 mille ont élu Jovenel Moise, on peut deviner la taille de l’électorat qui participera au scrutin made par le CPT-Alix Didier Fils-Aimé.
C’est donc pour éviter ce grand mal-heur à son pays que l’ingénieur Alex St.-Gardien Jecrois attire l’attention sur deux fléaux qui planent sur les élections projetées par l’équipe intérimaire. En effet, M. Jecrois dénonce, dans plusieurs interventions, les 800 000 « doublons » constatés sur la liste d’élec-teurs inscrits au système de l’Organisa tion nationale d’identité (ONI). Ayant reconnu ce constat, cette organisation avait accepté le principe d’un audit, afin de tirer le faux du vrai, dans cette situa-tion. Mais, souligne Alex St.-Gardien Jecrois, spécialiste en matière électora-le, bien qu’un contrat ait été signé, entre le gouvernement haïtien et une firme étrangère, afin de mener cette enquête, celle-ci n’a jamais été effectuée. Cela veut dire que la liste électorale héberge toujours 800 000 personnes qui n’exis-tent pas réellement.
L’expert des élections dénonce éga-lement une manipulation financière sur le financement des élections. D’une part, la révision de celui-ci à la hausse. L’ingénieur Jecrois y voie une possibi-lité de corruption, surtout que, selon les données qu’il a pu réunir, le coût de la participation de chaque électeur a été majoré, par rapport à celui ayant cours sur le marché international. Au bout du compte, M. Jecrois lève le voile sur cette possibilité de corrup-tion, dans le financement du prochain scrutin, d’une part. Et, d’autre part, il dit prévoir « un coup fourré », au détri-ment du pays, sans une rectification des « doublons », qui existent encore sur la liste électoral de l’ONI.
Un autre cri d’alarme est lancé par Me Magnekell Régulus, Pr Calbas-info 24, se faisant l’écho de la Commission spéciale instituée par le Conseil de dis-cipline du Barreau de l’ordre des avo-cats de Port-au-Prince, dans l’analyse de l’avant-projet de la constitution pré-senté par le Comité de pilotage de la Conférence nationale. Dans son document, M. Régulus qualifie de « rapport d’une rare puis-sance analytique de cette organisation présidée par Dr Bernard Gousse et ayant pour secrétaire rapporteur Dr Josué Pierre-Louis ». Il dit encore que cette « Commission signe un document sans concession qui démonte méthodi-quement l’avant-projet de Constitution produit par le Comité de pilotage de la Conférence nationale », ajoutant que « (…) le travail du comité de pilotage est jugé archaïque, bâclé, et porteur de risques majeurs pour la stabilité démo-cratique ».
Me Régulus cite Dr Gousse en ces termes, sur la Constitution : « (…) « le document ne présente ni rigueur scien-tifique ni harmonie avec les standards établis en matière constitutionnelle ». De son côté Dr Patrick Pierre-Louis, le bâtonnier de l’Ordre des avocats de Port-au-Prince, déclare ce texte « bâclé et porteur d’instabilité politique ». Voilà les points de vue d’experts, chacun dans son domaine, exprimés, dans l’unique objectif d’éviter une catastrophe durable au pays. Pourtant, le CPT, en tandem avec la primature, dans l’imposture confirmée, les ignore souverainement.
À ce tournant, le pays avance, imper turbable, tout droit dans le mur, les diri-geants ne tenant qu’à s’enrichir illéga-lement, par chaque geste posé et toutes décisions prises. Sans aucun mécanis-me constitutionnel pour s’en débarras-ser, il ne reste aux forces vives de la nation qu’à mettre de fortes pressions sur la communauté internationale, afin qu’elle prenne, contre les présents lea-ders fantoches, les mêmes décisions ayant débouché sur l’exil d’Ariel Henry. Cela passe par une vaste cam-pagne de dénonciations, accompagnée d’une mobilisation souveraine, dans les rues d’Haïti et en diaspora, pour porter les soi-disant tuteurs à entendre raison.

