Par Reynoldson MOMPOINT
Port-au-Prince, le 07 août 2025
Dans ce théâtre d’illusions qu’est devenue la politique haïtienne, le nom de Fritz Alphonse Jean trône désormais parmi ceux qui ont troqué le savoir pour la servilité, l’expertise pour l’excuse, et la vision pour l’ambition molle. Celui qui, autrefois, vendait la rigueur économique comme un produit d’élite, s’est transformé en figurant d’un Conseil Présidentiel au rabais, incapable de tenir une boussole même sous un ciel dégagé.
Un économiste ou un illusionniste de la monnaie ? Ancien gouverneur de la Banque de la République d’Haïti, Fritz Jean aimait à se faire passer pour le sage monétaire, le technicien au-dessus de la mêlée. Mais dans les faits, son passage fut un échec camouflé sous des discours creux et des rapports verbeux. La gourde, ce symbole de notre souveraineté économique, a continué de s’éroder sous son règne silencieux, comme un drapeau qu’on laisse faner sous le soleil. Il a prêché la stabilité, mais a récolté l’instabilité. Il a promis des fondations, mais n’a bâti que du vent.
Un politicien sans colonne vertébrale. Ce qui choque, ce n’est pas tant son incompétence, après tout, nul n’est à l’abri du ridicule, mais bien sa facilité à s’accommoder de toutes les compromissions. De la posture de technocrate rigoureux, il a glissé sans remords vers le rôle de marionnette politique. Avec l’élégance d’un caméléon de caniveau, il s’est agrippé au pouvoir de transition comme un naufragé à une planche pourrie, négociant des deals souterrains avec des clans qui, hier encore, incarnaient à ses yeux la déchéance de la République.
La classe, chez Fritz Alphonse Jean, ne se mesure plus qu’à son absence. Il parade dans des assemblées de façade, multiplie les phrases creuses et fuit toute confrontation directe avec les véritables défis du pays. L’élégance qu’on lui prêtait n’était qu’un vernis ; la stature, une illusion. L’homme n’a pas grandi avec les responsabilités, il s’est rétréci avec elles.
Une transition diluée dans l’opacité et les petits calculs. Nommé coordonnateur d’un Conseil Présidentiel de Transition qui ressemble plus à un buffet d’intérêts qu’à un organe de gouvernance, Fritz Jean a préféré l’immobilisme prudent à l’audace politique. Sous sa direction, rien ne bouge, sinon les ambitions personnelles. Le pays s’enlise, les citoyens désespèrent, mais lui, stoïque, continue à réciter des platitudes comme un automate perdu dans ses fiches.
Il n’y a ni cap, ni calendrier, ni courage. Juste des conciliabules de salon et des luttes de coulisses pour savoir qui héritera de la prochaine gamelle. Le peuple ? Oublié. L’État ? Désossé. La République ? En lambeaux.
Quand le silence devient une trahison.
Fritz Alphonse Jean restera dans l’histoire comme l’illustration parfaite de l’homme qui savait, mais n’a rien fait ; qui pouvait, mais n’a pas voulu ; qui prêchait l’éthique, mais a pactisé avec la décadence. Son nom ne rime ni avec grandeur ni avec audace, mais avec ce goût amer d’une transition perdue entre la peur d’agir et l’obsession de plaire.
Quand l’intelligence ne sert plus la nation, mais devient complice de sa ruine, alors il ne reste plus qu’à écrire : Fritz Jean, le dernier illusionniste d’un pays à genoux.
Reynoldson Mompoint

