Les États-Unis désignent les gangs haïtiens comme terroristes transnationaux, mais des critiques dénoncent un prétexte pour intensifier les expulsions, titre le journal Latin Times.
L’administration Trump a officiellement désigné vendredi plusieurs groupes armés haïtiens comme organisations terroristes, dans un contexte où ces groupes continuent de gagner du terrain et de renforcer leur emprise sur un pays en détresse. Toutefois, plusieurs voix critiques mettent en garde contre l’utilisation de cette décision comme un levier pour accroître les expulsions de ressortissants haïtiens vivant sur le sol américain.
Concrètement, le secrétaire d’État Marco Rubio a classé la coalition Viv Ansanm ainsi que le gang Gran Grif comme Organisations terroristes étrangères et Terroristes mondiaux spécialement désignés. Ces groupes rejoignent ainsi huit autres organisations d’Amérique latine inscrites sur la même liste en février, notamment le Tren de Aragua vénézuélien et plusieurs cartels mexicains.
« Sous l’impulsion du secrétaire Rubio, nous tenons pour responsables les groupes violents qui ont saccagé Haïti et opprimé sa population. C’est dans l’intérêt de la sécurité nationale des États-Unis de demander des comptes à ces gangs brutaux », a déclaré un responsable du Département d’État au Miami Herald après l’annonce.
Cette désignation permettrait aux autorités américaines de transférer les membres présumés de ces groupes vers les tristement célèbres prisons salvadoriennes, une pratique déjà en cours pour les membres supposés du Tren de Aragua. Elle entraîne également des conséquences juridiques et financières pour toute personne considérée comme fournissant un « soutien matériel » ou des « ressources » à ces organisations, incluant l’expulsion et l’interdiction d’entrée sur le territoire américain.
Avant même l’annonce officielle, certains analystes régionaux alertaient sur les véritables motivations de cette désignation. « L’objectif est moins de mettre en œuvre une stratégie de sécurité pour Haïti que de créer une justification politique et juridique pour expulser des Haïtiens vers le Salvador », a estimé James Bosworth, auteur de la Latin America Risk Report. Il ajoute que « si la politique immédiate semble davantage orientée vers l’agenda des expulsions que vers la sécurité, elle ouvre néanmoins la voie à une stratégie sécuritaire plus agressive à moyen terme ».
Cette décision intervient peu de temps après que Dorothy Camille Shea, cheffe de mission par intérim des États-Unis auprès des Nations Unies, a laissé entendre que Washington envisageait de suspendre son aide à Haïti, alors que le pays est au bord de l’effondrement.
« L’Amérique ne peut continuer à porter seule un fardeau aussi lourd », a-t-elle déclaré, appelant la communauté internationale à accroître son soutien envers cette nation caribéenne plongée dans une crise profonde et sans issue apparente.
Par ailleurs, le Miami Herald rapportait jeudi que, près d’un an après le déploiement des 200 policiers kényans censés renforcer les forces locales, la Mission multinationale d’appui à la sécurité est menacée de désintégration. Elle fait face à une pénurie critique de financements et de contingents, la majorité des pays initialement engagés ayant réduit leurs promesses, retiré leurs troupes ou tout simplement omis de les envoyer.

