11 octobre 2025
Député Célestin. CPT : Conseil de Protection des Truands ; les mafieux se jugent et s’auto-amnistient
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Député Célestin. CPT : Conseil de Protection des Truands ; les mafieux se jugent et s’auto-amnistient

Par Hugue CÉLESTIN
Membre de FEMODEK et ESKANP
Grand Pré, 23 février 2025

Le théâtre de l’impunité haïtienne : un système d’auto-protection mafieuse

Dans le dernier acte de la comédie de l’impunité haïtienne, la Cour d’Appel de Port-au-Prince a, le 19 février 2025, promptement annulé les mandats de comparution visant Emmanuel Vertilaire, Smith Augustin et Louis Gérald Gilles. Les trois présidents du Conseil Présidentiel de Transition, ci-après désigné le Conseil de Protection des Truands (CPT), artisans d’une structure politique préfabriquée, étaient pourtant directement impliqués dans un scandale de corruption. Ils auraient tenté d’extorquer 100 millions de gourdes à Raoul Pierre-Louis, ex-président de la Banque Nationale de Crédit (BNC), en échange de son maintien en poste. Une manœuvre grossièrement dissimulée qui soulève l’indignation.

Mais que dire des autres protagonistes éclaboussés par cette affaire ? Seront-ils jugés pour la forme, ou épargnés par un système judiciaire où l’innocence des uns se construit sur l’impunité des autres ?

La Cour, fidèle à son rôle dans ce théâtre d’ombres, a estimé que le juge d’instruction Benjamin Félismé n’avait pas compétence pour traiter cette affaire. Le prétexte ? Le statut des conseillers présidentiels leur conférerait une immunité inébranlable, leur permettant de se soustraire à toute poursuite judiciaire. Protégés par l’opacité de leurs fonctions, ces trois « braqueurs institutionnels » échappent à toute sanction, quittant la scène sous les applaudissements de leurs complices.

le CPT, une mafia déguisée

L’histoire politique haïtienne l’enseigne : l’impunité n’est pas une anomalie, mais la pierre angulaire du système. Le verdict rendu par la Cour d’Appel n’est pas un simple échec judiciaire. Il révèle l’existence d’un pacte d’auto-préservation au sein du CPT. Chaque membre protège l’autre, formant une alliance tacite où la solidarité mafieuse supplante toute notion de justice.

L’affaire de la BNC ne fait qu’effleurer la surface d’un système profondément corrompu. Derrière les figures emblématiques du scandale – Vertilaire, Augustin et Gilles – se cachent d’autres acteurs tout aussi compromis, dont les pratiques douteuses restent invisibles aux yeux du public. Ce verdict confirme l’assujettissement de la justice aux intérêts d’une élite politique et économique qui régente Haïti. Loin d’être indépendante, l’institution judiciaire est devenue l’outil d’une minorité mafieuse, garantissant son impunité tout en piétinant les droits du peuple.

Ainsi, la corruption devient la norme, et non l’exception. Les institutions, au lieu de servir le bien commun, se transforment en arènes où se négocient des intérêts privés au détriment du collectif. Dans ce marécage institutionnel, les criminels en col blanc prospèrent, enchaînant manœuvres politiques et opérations financières opaques, tout en enfermant le pays dans un cycle infernal de déclin.

Smith Augustin et Louis Gérald Gilles : vers la présidence par effraction ?

La mascarade ne s’arrête pas là. Les trois membres du CPT, blanchis par un système dévoyé, continuent leur ascension. Parmi eux, Smith Augustin et Louis Gérald Gilles se positionnent déjà comme des candidats potentiels à la présidence tournante. Sous le vernis d’une légitimité fabriquée, ils se préparent à endosser la fonction suprême, parés de leur immunité judiciaire et confortés par un système qui récompense la duplicité.

Depuis le 19 février, les deux hommes orchestrent leur retour sur le devant de la scène, peaufinant leur image dans des interviews convenues sur TV5 Monde et les plateaux des Mardis de la Nation. La farce continue, et ils se présentent en figures incontournables d’un pouvoir qui confond leadership et prédation. Qui pourrait les détrôner dans cette comédie grotesque ? Tout est déjà écrit : le prochain président du CPT prêtera serment le 7 mars.

Le cartel des fossoyeurs de la nation

La stratégie du CPT ne se limite pas à la consolidation de son pouvoir. Derrière les rideaux, les membres de ce Conseil Présidentiel poursuivent un projet méthodique d’affaiblissement de l’État. Les institutions sécuritaires sont délibérément sabotées, offrant un terrain libre aux gangs qui prennent possession des rues et des quartiers. Pendant ce temps, les dignitaires du CPT multiplient les placements financiers et assurent leur avenir personnel, loin du chaos qu’ils orchestrent.

Mais il serait réducteur de qualifier ces hommes d’incompétents ou de simples corrompus. Ils sont, en réalité, les architectes du désastre. Chaque décision prise par le CPT creuse un peu plus la tombe d’Haïti, condamnant le pays à la stagnation et au chaos. Leurs actions ne visent pas la gouvernance, mais la destruction méthodique de toute perspective de stabilité et de progrès.

La situation actuelle bloque toute tentative de redressement national. Les élections et les réformes sont systématiquement sabotées, et le pays s’enlise dans un cycle de décomposition institutionnelle. Seule une mesure radicale pourrait briser cette spirale : la dissolution immédiate et irrévocable du Conseil Présidentiel de Transition.

L’alternative : un sursaut citoyen porté par l’UEH

Face à cette dérive, la société civile ne peut plus rester spectatrice. Il est impératif de proposer une alternative crédible et inclusive. L’Université d’État d’Haïti (UEH), en tant qu’institution de savoir et de responsabilité sociale, doit assumer un rôle central dans la refondation nationale.

Nous appelons donc l’UEH à organiser, dans un délai maximal d’un mois, des consultations nationales réunissant les forces vives de la nation. Cette instance, indépendante de toute ingérence politique ou économique, devra :

  1. Désigner un(e) président(e) de transition sur la base d’un consensus national, libre de toute influence partisane et étrangère.
  2. Mettre en place un gouvernement de salut public restreint, composé de personnalités intègres et compétentes, chargé de rétablir l’ordre, amorcer les réformes institutionnelles et initier le redressement économique et social.
  3. Élaborer une feuille de route claire pour organiser des élections véritablement démocratiques, libérées des logiques clientélistes et des manipulations extérieures.

Chaque jour qui passe plonge davantage le pays dans le chaos. Rester inerte face à cette réalité serait un acte de complicité silencieuse. Il est temps que le peuple haïtien s’empare de son destin et refuse la logique de destruction imposée par une élite corrompue.

Haïti mérite mieux. Haïti mérite la justice. Haïti mérite la paix, mais pas avec ces truands.

Hugue CÉLESTIN

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