par cba,
témoin d’un temps qui s’en alla
Il y a des dates gravées dans la mémoire collective, des instants où l’histoire d’un peuple paraît s’écrire avec la promesse d’un renouveau. Le 16 décembre 1990 demeure l’un de ces moments rares, une parenthèse où les Haïtiens ont osé, pour la première fois, croire en la force de leur vote. Ce jour-là, les urnes, souvent synonymes de mascarade en Haiti, ont pour une fois reflété la volonté sincère d’un peuple en quête de dignité. Jean-Bertrand Aristide, porté par une marée populaire, devenait le symbole d’un rêve commun : celui d’une nation enfin libérée de l’arbitraire et des intrigues des puissants.
Je m’en souviens encore comme si c’était hier. Ce n’était pas qu’un scrutin, mais une éruption de ferveur démocratique, un appel vibrant à la justice, une lutte silencieuse contre des décennies de dictature et d’humiliation. Ces élections, uniques dans notre histoire, avaient des allures de miracle. Pour une fois, la voix des opprimés a résonné plus fort que les tambours des clans politiques et les murmures des puissances étrangères.
Aujourd’hui, à l’approche des élections de 2025, il est difficile de raviver cet espoir. Le Conseil Électoral Provisoire (CEP), synonyme de transparence, n’est plus qu’un théâtre de marionnettes manipulées par des mains invisibles, mais bien identifiables. Ses membres, désignés non pour leur compétence, mais pour leur loyauté aveugle, ne suscitent que méfiance et désillusion. Comment penser à un scrutin crédible lorsque le simple mécanisme de consultation populaire est corrompu à la racine ?
En vérité, parler d’élections dans le contexte actuel revient à danser sur les ruines d’un temple. Ce peuple meurtri, qui a déjà goûté au poison des promesses non tenues, mérite mieux que cette farce annoncée. Les élections de 2025, si elles ont lieu, ne seront qu’un énième chapitre d’une tragédie nationale où l’espoir se meurt sous le poids des ambitions personnelles et des agendas internationaux.
Face à ce décor désolant, il est légitime de se demander : que reste-t-il à espérer ? Peut-être une révolution des consciences, un sursaut d’intégrité parmi ceux qui aspirent au pouvoir. Mais en attendant, souvenons-nous du 16 décembre 1990, ce jour où l’histoire nous a prouvé que, parfois, la démocratie peut naître même au milieu des cendres. Ce souvenir, aussi douloureux qu’il soit, hélas, demeure une lumière vacillante dans la nuit profonde de notre désillusion.
cba



