Dr. Garry Conille pourrait-il, s’il échoue à organiser les élections à la date prévue, déclarer à l’instar de Dr. Ariel Henry qu’un élu succède simplement à un autre élu, arguant qu’il ne saurait y avoir une autre transition au sein de la transition, justifiant ainsi toute dérogation?
Dans le cadre de sa présentation des perspectives de développement des départements du Nord et du Nord-Est, le Premier ministre du gouvernement de transition, le Dr Garry Conille, a présenté plusieurs initiatives, dont celles visant, selon lui, à améliorer les infrastructures routières et la signalisation dans ces régions cruciales pour le pays. Il a notamment insisté sur le profilage des routes entre Ouanaminthe et Capotille, une zone qui a depuis longtemps besoin d’être réhabilitée pour faciliter le transport et dynamiser l’économie locale. Cependant, à la lecture de ses déclarations, on constate des lacunes et des interrogations sur la viabilité à long terme de ces projets pour un gouvernement qui a moins de 17 mois à passer au pouvoir.
Profilage routier : définition
Le « profilage routier » est une technique utilisée pour améliorer les routes en redressant, nivelant et compactant la surface existante sans ajouter de nouvelles couches d’asphalte. Ce processus est courant sur les routes de terre ou de gravier où l’usure, l’érosion ou le trafic intense ont créé des irrégularités.
Dans le cadre des travaux annoncés par le Dr Conille, l’objectif semble être de rendre les routes entre Ouanaminthe et Capotille plus praticables grâce à un profilage intensif. Mais la question reste posée : s’agit-il de simples routes de terre « wout tè kap disparèt vit apre de twa gwo lapli », ou envisage-t-on une réhabilitation complète avec un revêtement en asphalte, ce qui serait une solution plus durable ?
Routes non goudronnées ou asphalte ?
Le manque de précision dans le discours du Premier ministre quant à la nature exacte des travaux entre Ouanaminthe et Capotille soulève des questions. Si ces routes sont seulement profilées et non asphaltées, leur durabilité pourrait être compromise, notamment face aux conditions climatiques et au trafic intense. Les chemins de terre ainsi profilés, bien qu’améliorés temporairement, nécessitent un entretien régulier pour rester en bon état. Sans un plan d’entretien rigoureux, il existe un risque de détérioration rapide qui ramènerait la zone à son état initial de désuétude.
Panneaux de signalisation sur le boulevard du Bord de Mer au Cap-Haïtien
Le Dr Conille a également évoqué l’emplacement des panneaux de signalisation sur le front de mer du Cap-Haïtien. À première vue, l’utilisation de l’énergie solaire pour ces panneaux peut sembler innovante, surtout dans un contexte de pénurie chronique d’électricité. Cependant, l’expérience montre que de telles installations, bien qu’efficaces à court terme, manquent souvent de durabilité en Haïti.
L’échec des feux de signalisation installés par l’administration Tèt Kale 1 Martelly-Lamothe, qui n’ont pas survécu en raison du manque d’entretien et de l’absence d’un plan de soutien à long terme, en est la preuve tangible. Sans un plan d’entretien adéquat, incluant des inspections et des réparations régulières, ces infrastructures risquent de devenir inopérantes après seulement quelques mois de service, rendant l’investissement initial inutile.
Un oubli remarquable : la route Cap-Haïtien-Gonaïves de 120 km
Malgré les initiatives annoncées, l’absence de mention de la route Cap-Haïtien-Gonaïves dans le discours du Dr Conille est frappante. Cette artère essentielle pour les échanges et les déplacements dans le pays est dans un état de délabrement avancé. La détérioration de cette route reflète une négligence persistante dans la gestion des infrastructures clés en Haïti, soulignant un réel manque de vision à long terme pour le développement national.
Les mots du Dr Monferrier Dorval, assassiné en août 2020, résonnent encore aujourd’hui : Haïti n’est ni gérée ni administrée de manière efficace. Ce constat est renforcé par l’absence de réhabilitation de cette route stratégique, suggérant que les efforts du gouvernement restent superficiels, visant des projets à court terme plutôt que des solutions durables et globales.
Les perspectives de développement des départements du Nord et du Nord-Est présentées par Garry Conille, bien qu’ambitieuses, soulèvent d’importantes questions sur la durabilité et l’efficacité des initiatives proposées pour un gouvernement dont la mission essentielle est de rétablir la sécurité et de lutter efficacement contre les bandes armées.
Le profilage des routes sans asphalte et la signalisation solaire sans plan d’entretien risquent de devenir des projets éphémères, sans impact durable sur la région. De plus, l’omission de projets vitaux comme la réhabilitation de la route Cap-Haïtien-Gonaïves révèle une vision limitée du développement, risquant de condamner les efforts actuels à n’être qu’une vaine tentative de plus dans l’histoire des infrastructures haïtiennes mal gérées.
