par Bidler Nelson
Dimanche 8 janvier 2023 ((rezonodwes.com))–
Les rues de Port-au-Prince ne font aucun signe de vie. De ma fenêtre, j’aperçois le soleil se coucher sur la ville. Il y pleut de petites gouttes fines.
Un maigre chien aboie dans les hauteurs de la rue Capois. Certains étudiants érigent des barricades et d’autres discutent autour d’un plat de Marinade. Quelques rares habitants curieux de la zone et des journalistes assistent à ce qui se passe.
Parallèlement, des détonations se font entendre dans les périmètres du palais national. Coup d’État !! Coup d’État !! Coup d’État !!
Un militant en direction de la rue Chavannes se dirige vers la faculté de l’IERAH-ISERS. « Brûler !! Égorger !! Koupe tèt boule kay !! « Pa gen rans la, fòk revolisyon an fèt !! Le pays est asphyxié !! L’État nous asphyxie tous !! « Le pays est au plus bas niveau de son INVIVABILITÉ », déplore-t-il.
Et moi j’écoute en toute tranquillité, cette poésie révolutionnaire sortant de la bouche d’un marginalisé. Ce dernier porte un discours d’altérité, un discours populaire dans lequel je peux me voir, je peux vous voir également. Ce discours pointe du doigt nos malheurs et nos souffrances.
Ça commence à résonner dans ma tête : « Le pays est asphyxié !! L’État nous asphyxie tous !! », et des questions y viennent aussi. Ici, combien de gens meurent asphyxiés ? Soit par la misère soit par la solitude. Combien de gens meurent, mais ont peur de le faire savoir ? Soit par désespoir soit par honte.
Ici, la mort est un fait divers. Il y a d’ailleurs, plus de pompes funèbres que d’hôpitaux. Nécrophiles !! Psychopathes !! Les criminels se promènent dans la ville en toute quiétude. Ils pillent, ils tuent. Ils violent, ils tuent. Mais qui sont ces assassins qui tuent en série ? Qui les nourrit, donc ?
Vous savez quoi ? On ne naît pas bandit, on le devient par l’absence de l’État. Ces assassins tuent pour de l’argent, terrorisent la population et espérent avoir de la reconnaissance pour quelques butins partagés ou distribués.
Ils sont les bras droits des hommes politiques et économiques du pays.
Le militant qui hurlait « Coup d’État !! » entre dans la faculté de l’IERAH-ISERS. Il crie haut et fort : « La bombe est parmi nous ! ». « Si nous ne faisons rien, personne ne sera épargné ». Cette bombe est un anacondas assoiffé de sang et de chair.
Le contrat du serpent arrive à sa fin, dirait-on. Le serpent veut avaler son nourrisseur. Le serpent veut aussi avaler les membres de la famille du nourrisseur. Le serpent marche dans toutes les rues du pays. Il veut avaler les voisins du nourrisseur.
Il se répand dans toute la ville, comme s’il était devenu trop gros pour sa petite pièce. Armes à la main, le serpent gagne les villes. Donc, il cherche à manger tous les poussins du nourrisseur.
Mais qui sont ces nourrisseurs qui nourrissent le serpent ? Quels sont leurs intérêts ?
Bidler Nelson
Bidlernelson@gmail.com
