8 juillet 2024
Me Wilfort Pasquet|7 Février 2022 : Haïti vit exceptionnellement une situation en dehors de la légalité
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Me Wilfort Pasquet|7 Février 2022 : Haïti vit exceptionnellement une situation en dehors de la légalité

CONVENTION CITOYENNE POUR L’UNITÉ ET LA GOUVERNANCE


7 Février, une date qui a beaucoup de sens dans le vécu haïtien et dans notre
histoire de peuple. 7 Février, une date porteuse de mille et une espérances, une
date pour laquelle beaucoup se sont sacrifiés dans l’objectif de voir une Haïti
meilleure.

Après 1986, 7 Février reste une date qui hante notre histoire, car après chaque
quinquennat le peuple se prépare à recevoir son nouveau président. Qu’en est-il du
7 Février 2022 ?

Aujourd’hui le pays se lève avec une inquiétude concernant son avenir incertain par
rapport à une situation qui devrait être normalement un exercice démocratique
habituel. L’assassinat brutal du Président Jovenel Moise laisse une vacance
présidentielle qui fait planer un doute majeur sur le paysage politique haïtien. Ce
vide devient de plus en plus profond en raison du mal que l’on se donne afin de
doter le Palais National d’un locataire même provisoire.

Cette situation exceptionnelle a permis au Dr Ariel Henry d’être le détenteur
unilatéral du pouvoir exécutif ; ce qui ne laisse plus d’un indifférent face à l’avenir
du pays et surtout face au désir de voir le pays recouvrer les normes démocratiques
prescrites à travers la Constitution. Le fait est simple, Dr Ariel Henry est notre
Premier Ministre, mais qu’en est-il des attributs de la fonction présidentielle ? Ontils cessé d’exister ? Le Conseil des Ministres au regard de l’article 149 de notre
Constitution peut-il nous dissuader du vide présidentiel ?

Politiquement Haïti se trouve devant une situation d’effectivité, notion utilisée en
droit international pour définir une situation qui en fait et réellement. Cette
effectivité-la n’est point celle du droit lui-même ; elle désigne cependant une
situation de fait dont la règle de droit va tenir compte.

Selon cet article 149 : « le Conseil National sous la présidence du Premier Ministre exerce le Pouvoir Exécutif jusqu’à l’élection d’un autre Président.

Dans ce cas, le scrutin pour l’élection du nouveau Président de la République pour le temps qui reste a courir a lieu soixante (60) jours au moins et cent vingt (120) jours au plus après l’ouverture de la vacances, conformément a la Constitution et la loi électorale.

Dans le cas ou la vacances se produit a partir de la quatrième année du mandat présidentiel, l’Assemblée Nationale se réunit d’office dans les soixante (60) jours qui suivent la vacance pour élire un nouveau Président Provisoire de la République pour le temps qui reste à courir ».

Aujourd’hui 7 Février 2022, Haïti vit exceptionnellement une situation en dehors
de la légalité mais de fait le pouvoir exécutif est sous le contrôle du Premier
Ministre Ariel Henry qui détient la Primature depuis 20 Juillet 2021 en raison
d’une base consensuelle tant nationale qu’internationale. Près de sept mois plus
tard la vacance présidentielle n’est encore pas comblée, et aucune formule
constitutionnelle n’est applicable pour remédier à ce problème. Si pour certains Dr
Ariel Henry est le problème, cependant pour rattraper le cycle constitutionnel il
n’est pas à écarter de la solution.

Aujourd’hui 7 Février 2022, le peuple attend bon gré mal gré un président
provisoire ou transitoire, quelque soit son épithète. Depuis l’élection d’Alexandre
Pétion en 1807, le pays vit dans l’ombre de son président, bon ou mauvais le terme
Président de la République est dans l’imaginaire collectif haïtien le symbole
d’autorité par excellence. Devant le fait que les haïtiens sont profondément
présidentialistes, les propositions de doter le pays d’un Président les propositions
affluent de toute part, les unes plus absurdes que les autres , la finalité est
concordante : la vacance présidentielle doit être comblée.

Le Senat, comme co-dépositaire de la souveraineté nationale, se trouve dans une
situation d’hémiplégie et dysphasie suite à l’AVC provoqué par le départ de ses deux
tiers. Cependant en matière de légitimité populaire les dix sénateurs restants sont
les seuls à pouvoir s’enorgueillir grâce aux votes obtenus dans leur département. Le
Sénateur Joseph Lambert, comme président de ce Senat jouit doublement de cette
légitimité : Légitimité départementale grâce à son élection dans le Sud-Est comme
Sénateur et Légitimité Nationale, considérant son élection par ses pairs au poste du
Président du Senat. Malgré cette légitimité doublement reconnue, les voies ne sont
pas constitutionnellement pavées vers le Palais National pour le Sénateur Joseph
Lambert qui définitivement a son mot à dire pour une sortie de crise pouvant nous
conduire réellement aux élections.

De nobles citoyens d’une frange de la société civile avec des intentions réalistes ou
superficiels ont de part un accord avec une démonstration élective sectaire ont
proposé un tandem exécutif à la nation ; un Président et un Premier Ministre sorti
des urnes de l’hôtel Kinam. Ce Président de transition de rupture comme on
l’appelle est réclamé par des manifestions, des spots publicitaires, des sit-in et
autres moyens pour démontrer sur un autre ton le coté présidentialiste des haïtiens.
Dans une démarche démocratique c’est une très bonne chose que des haïtiens fils et
filles authentiques de la patrie puissent s’exprimer librement.

Cependant la Constitution qui devrait être la boussole de toute démarche sensée pour combler le vide présidentiel est devenu un outil dysfonctionnel et laisse à la société une unique option : le Consensus.

Un consensus qui doit inévitablement réunir autour de la table le Premier Ministre
Ariel Henry, le tiers du Senat en fonction, les signataires de l’accord de Montana, les
signataires de l’accord de la Louisiane, d’autres et d’autres accords pour trouver
l’accord de tous les accords et installer un Président Provisoire qui saurait
convoquer le peuple en ses comices
en vue d’élire dignement et démocratiquement
leurs prochains dirigeants.

Toutes proportions gardées, l’intérêt supérieur de la nation doit être au centre de
toutes les discutions. On doit accorder le bénéfice du doute à tout citoyen ou
groupement qui souhaite proposer ou participer dans le redressement de cette
situation chaotique dans laquelle se trouve notre cher pays. Un consensus entre les
différents protagonistes inspirera confiance au sein de la population qui a trop
souffert. Un dépassement de soi s’avère nécessaire pour mettre Haïti sur une ère de
renouveau.

7 Février doit être un nouveau leitmotiv pour une véritable transition
pour mettre fin à ce cycle de transitions qui a trop longtemps perduré. Sinon la
démocratie laissera sur les lèvres un goût pire que la dictature, quoique le peuple
haïtien soit présidentialiste mais ça ne veut pas dire pour autant que chaque haïtien
doit devenir président pour le bien de la République. De par leurs agissements, les
politiciens haïtiens donnent raison à Alphonce Karr qui affirme : « Il est facile
d’aimer une république dont on est le président ».

Me Wilfort PASQUET,
Avocat au Barreau de P-au-P
Président
Contact : 3350-4507
pasquetwilfort@gmail.co

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