16 juin 2024
Spécial : Document de l’Avant-Projet de Constitution préparé par le Comité Consultatif
Actualités Société

Spécial : Document de l’Avant-Projet de Constitution préparé par le Comité Consultatif

Mercredi 3 février 2021 ((rezonodwes.com))–

AVANT-PROPOS……………………………………………………………………………………………………………….. 5

PRÉAMBULE…………………………………………………………………………………………………………………… 10

TITRE IER.- DISPOSITIONS GÉNÉRALES………………………………………………………………………………….. 12

CHAPITRE IER.- LES CARACTERISTIQUES FONDAMENTALES DE LA REPUBLIQUE D’HAÏTI…………………………………… 12

CHAPITRE II.- LE TERRITOIRE DE LA REPUBLIQUE D’HAÏTI…………………………………………………………………… 12

CHAPITRE III.- LA NATIONALITE HAÏTIENNE…………………………………………………………………………………… 13

CHAPITRE IV.- LA CITOYENNETE……………………………………………………………………………………………….. 13

TITRE II.- DROITS, DEVOIRS ET LIBERTÉS………………………………………………………………………………. 14

CHAPITRE IER.- LE DROIT A LA VIE, A LA SANTE ET AU RESPECT DE LA PERSONNE HUMAINE………………………………. 14

CHAPITRE II.- LE DROIT A UN ENVIRONNEMENT SAIN………………………………………………………………………… 14

CHAPITRE III.- LA LIBERTE INDIVIDUELLE………………………………………………………………………………………. 14

CHAPITRE IV.- LES DROITS ET LIBERTES EN MATIERE PENALE………………………………………………………………… 15

CHAPITRE V.- LA LIBERTE DEXPRESSION ET DE LA PRESSE…………………………………………………………………… 16

CHAPITRE VI.- LE DROIT A LINFORMATION…………………………………………………………………………………… 16

CHAPITRE VII.- LA LIBERTE DE CONSCIENCE…………………………………………………………………………………… 16

CHAPITRE VIII.- LA LIBERTE DE REUNION ET DASSOCIATION………………………………………………………………… 16

CHAPITRE IX.- L’EDUCATION, LENSEIGNEMENT, LA RECHERCHE ET LA CULTURE………………………………………….. 17

CHAPITRE X.- LA LIBERTE DU TRAVAIL…………………………………………………………………………………………. 18

CHAPITRE XI.- LA LIBERTE ECONOMIQUE……………………………………………………………………………………… 18

CHAPITRE XII.- L’IMPOSITION………………………………………………………………………………………………….. 19

CHAPITRE XIII.- LA PROPRIETE…………………………………………………………………………………………………. 19

CHAPITRE XIV.- L’ADMINISTRATION ET LA FONCTION PUBLIQUES………………………………………………………….. 20

CHAPITRE XV.- LES DROITS DES ETRANGERS………………………………………………………………………………….. 21

CHAPITRE XVI.- LES DEVOIRS DU CITOYEN……………………………………………………………………………………. 21

CHAPITRE XVII.- LA PROTECTION DU CITOYEN……………………………………………………………………………….. 22

TITRE III.- SOUVERAINETÉ NATIONALE………………………………………………………………………………… 22

CHAPITRE IER.- DISPOSITIONS GENERALES…………………………………………………………………………………….. 22

CHAPITRE II.- LE POUVOIR LEGISLATIF………………………………………………………………………………………… 23

SECTION 1RE.- L’ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DU POUVOIR LEGISLATIF……………………………………….. 23

SECTION 2.- L’EXERCICE ET LES ATTRIBUTIONS DU POUVOIR LEGISLATIF…………………………………………………….. 26

CHAPITRE III.- LE POUVOIR EXECUTIF…………………………………………………………………………………………. 30

SECTION 1RE.-     DISPOSITIONS GENERALES……………………………………………………………………………………. 30

SECTION 2.-     L’ELECTION ET LE MANDAT DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE………………………………………………. 30

SECTION 3.-     LES ATTRIBUTIONS DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE……………………………………………………….. 32

SECTION 4.-     LES MINISTRES ET LES SECRETAIRES D’ÉTAT…………………………………………………………………… 33

CHAPITRE IV.- LE POUVOIR JUDICIAIRE……………………………………………………………………………………….. 35

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SECTION 1RE.-     DISPOSITIONS GENERALES……………………………………………………………………………………. 35

SECTION 2.-     LES JURIDICTIONS DE L’ORDRE JUDICIAIRE…………………………………………………………………….. 36

SECTION 3.-     LES JURIDICTIONS DE L’ORDRE ADMINISTRATIF……………………………………………………………….. 36

SECTION 4.-     LE CONSEIL SUPERIEUR DU POUVOIR JUDICIAIRE…………………………………………………………….. 36

TITRE IV.- COUR CONSTITUTIONNELLE…………………………………………………………………………………. 37

TITRE V.- COUR DES COMPTES…………………………………………………………………………………………… 39

TITRE VI.- CONSEIL ÉLECTORAL PERMANENT………………………………………………………………………… 40

TITRE VII.- SÉCURITÉ ET DÉFENSE……………………………………………………………………………………….. 42

CHAPITRE IER.- LA FORCE PUBLIQUE……………………………………………………………………………………………. 42

CHAPITRE II.- LES SERVICES DINTELLIGENCE………………………………………………………………………………….. 43

TITRE VIII.- HAUTE COUR DE JUSTICE…………………………………………………………………………………… 44

TITRE IX.- COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DÉCENTRALISATION…………………………………………….. 45

CHAPITRE IER.- DISPOSITIONS GENERALES…………………………………………………………………………………….. 45

CHAPITRE II.- LE DEPARTEMENT……………………………………………………………………………………………….. 46

CHAPITRE III.- LA COMMUNE………………………………………………………………………………………………….. 47

CHAPITRE IV.- LA SECTION COMMUNALE……………………………………………………………………………………… 48

TITRE X.- RÉVISION DE LA CONSTITUTION……………………………………………………………………………. 49

TITRE XI.- DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES……………………………………………………………….. 49

CHAPITRE IER.- DISPOSITIONS TRANSITOIRES…………………………………………………………………………………. 49

CHAPITRE II.- DISPOSITIONS FINALES………………………………………………………………………………………….. 50

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AVANT-PROPOS

Le texte qui suit est un avant-projet de Constitution soumis à la discussion des citoyens, des groupes organisés et des personnalités de la société civile, entre le 2 et le 22 février 2021. Il est préparé par le Comité consultatif indépendant mis en place en vertu du Décret du 28 octobre 2020. Aux termes de l’article 2 dudit Décret, ce Comité a pour mandat de :

  1. préserver les acquis démocratiques aspirations au développement durable du Peuple Haïtien ;
  • garantir solennellement les droits fondamentaux de la personne humaine et exprimer clairement les droits et devoirs du citoyen ;
  • renforcer les mécanismes de l’État de droit ;
  • rationaliser et préciser la nature du régime politique ;
  • clarifier et rééquilibrer les pouvoirs de l’État dans leur organisation et dans leur fonctionnement ;
  • réaffirmer et rééquilibrer le caractère démocratique et républicain de l’État ;
  • harmoniser les compétences des collectivités territoriales et renforcer l’édifice institutionnel à l’échelon local ;
  • prendre en compte l’évolution du contexte institutionnel, politique, économique, social et culturel du pays.

S’agissant de la méthode, le Comité s’est appuyé sur les rapports des diverses consultations réalisées entre 2007 et 2020 concernant la Constitution de 1987. Parmi ces rapports, les principaux sont : le Rapport Moïse/Hector (2007) ; le Rapport du Groupe de travail sur la Constitution (2009) ; le Rapport de la Commission spéciale d’amendement de la Constitution de 1987 de la Chambre des Députés (2018) ; le Rapport des États généraux sectoriels de la nation (2019) ; le Rapport de l’Office de la Protection du Citoyen (2020). Il faut également noter des ouvrages portant sur la Constitution de 1987, tels que : L’amendement de la Constitution de 1987 : Enjeux, limites et perspectives, sous la direction de Fritz Dorvilier(2012) ; Plaidoyer pour une nouvelle Constitution de Mirlande Manigat (1995) ; Une constitution dans la tourmente : Le nouveau régime politique haïtien et la crise nationale, 1987-1993 de Claude Moïse (1994).

  • ces travaux s’ajoutent des dizaines d’articles de journaux et d’ouvrages axés sur des points critiques de la Constitution de 1987. Les principaux sont : la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif1, l’amendement2, le système électoral3, les partis politiques4, la décharge5, les institutions indépendantes6, la nationalité7, le référendum.8

1 Robenson Bernard, 20 février 2020, « Réformer la CSC/CA pour mieux combattre la corruption », in Le Nouvelliste.

  • Mirlande Manigat, 5 mai 2011, « L’amendement de la Constitution de 1987 : les leçons du passé, le poids du présent », in Le Nouvelliste ; Guichard Doré, 2009, « L’heure de l’amendement constitutionnel a sonné », in Le Matin, Port-au-Prince ;Daly Valet, 2009, « Révision Constitutionnelle et Commissions Présidentielles en Trompe-l’œil », in Le Nouvelliste.

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Cette approche documentaire est complétée par l’audition de plus d’une trentaine d’experts nationaux et internationaux dans les trois grands domaines couverts par la Constitution : a) le régime politique ; b) la décentralisation ; c) l’exercice des droits fondamentaux, de la souveraineté et de la citoyenneté. Ces auditions ont lieu en novembre-décembre 20209.

Le constat général est que la Constitution de 1987 constitue une source d’instabilité. En premier lieu, la dépossession du Président de la République, élu au suffrage universel, du pouvoir de conduire la politique de la Nation, au profit du Premier Ministre nommé, crée une tension au sommet de cet Exécutif bicéphale. En second lieu, l’émiettement des partis politiques rend improbable l’existence de majorités au Parlement bicaméral. Les dysfonctionnements qui en découlent génèrent une logique de marchandage des votes des lois, des politiques générales des premiers ministres, de ratification des accords et conventions internationaux. Il en est de même des votes relatifs à la nomination des grands commis de l’État qui doit être approuvée par le Parlement conformément à la Constitution. De cette façon, les fonctions judiciaires, les postes dans la haute administration publique et dans la diplomatie finissent par être transformés en prébendes au bénéfice des parlementaires. En troisième lieu, la décentralisation n’est pas accompagnée de mécanismes de transfert de compétences et de ressources de l’État aux collectivités territoriales : département, commune et section communale. Celles-ci sont ainsi rendues incapables de remplir leur fonction de développement local. Enfin, il faut souligner la désarticulation des mandats du Président de la république (5 ans), des sénateurs (6 ans) renouvelables par tiers tous les deux (2) ans, des députés et des élus des collectivités territoriales

  • Emmanuel Charles, 2020, Haïti : le droit et la réalité électorale. Une étude sur les pratiques du droit électoral haïtien, Paris, Astrinobés Éditions ; Observatoire Citoyen pour l’Institutionnalisation de la Démocratie (OCID),

2018, « Diagnostic et propositions pour la réforme du système électoral haïtien » ; Organisation des États Américains, « Mission d’observation des élections, Haïti : élections législatives, municipales et locales, février – juillet, 2000 » / Unité́pour la Promotion de la Démocratie. Observation des élections, série Amériques, no. 28, Washington, D.C. 20006; Bertrand, Woldson (dir.), 2018, Contribution aux réflexions portant sur l’institutionnalisation du Conseil électoral permanent en Haïti, Institut international pour la démocratie etl’assistance électorale (IDEA).

  • Laënnec Hurbon (direction de) Avec la collaboration de Alain Gilles et Franklin Midy, 2014, Les partis politiques dans la construction de la démocratie en Haïti, International IDEA.
  • Joubert Neptune, 2016, L’épineuse question de la décharge en Haïti, Bibliothèque nationale d’Haïti; voir aussi : Pierre-Raymond Dumas, 2016 « L’épineuse question de la décharge en Haïti », in Le Nouvelliste.
  • Geffrard, Robenson, 2016 (8 janvier), « Institution indépendante et organisme autonome : que dit la loi ? », in Le Nouvelliste.
  • Monferrier Dorval, 2020, Droit constitutionnel de la nationalité : Approches diachronique et synchronique, Port-au-Prince, C3 Éditions ; James Boyard, 11 janvier 2012, « L’amendement constitutionnel relatif à la question de la nationalité. Un crime de haute trahison contre la République », in Le Nouvelliste ; Guichard Doré, 2007, « Faut-il admettre la double nationalité en Haïti ? », in Le Matin ; Gérard Bissainthe, 2008, « La loi du 12 avril 2002. Notre nouveau « Code Noir » », in Le Nouvelliste ; Théodore Achille, 2007, Les Haïtiens et la double nationalité, Montréal (P.Q.), Éditions du Marais ; Raymond Bernardin, 2001, La nationalité haïtienne. Constitutions et lois de 1804 à 1987, Port-au-Prince, L’Imprimeur II.
  • Fritz Dorvilier, 2020, « Sur le projet de référendum constitutionnel », in Le Nouvelliste.
  • Comité consultatif indépendant (CCI), 2020, Éléments pour l’élaboration du Projet de la Nouvelle Constitution, disponible sur : http://www.ambassadehaitivenezuela.org/wp-content/uploads/2020/11/CCI-CONSTITUTION_00-Note-de-cadrage-29-novembre-2020.pdf). [Accessible le 2 février 2021].

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(4 ans). Ce qui nécessite des élections tous les 18 mois en moyenne. La difficulté de respecter cet agenda électoral contraignant plonge le pays dans une crise institutionnelle chronique.

En fin de compte, le type d’échafaudage institutionnel, et des modalités de fonctionnement et d’interaction de ses diverses instances, créent au sommet de l’État des jeux de croisement et d’affrontement d’acteurs liés à des groupes d’intérêts divergents : dynamiques qui façonnent des logiques et des pratiques, donc des cultures d’opposition ou de sabotage vis-à-vis des objectifs gouvernementaux. En conséquence, c’est la faillite de l’État attestée par une insécurité totale.

Il va de soi qu’une telle configuration constitutionnelle ne peut que condamner la nation haïtienne à la violence et au chaos10. Le changement de Constitution n’est donc pas seulement nécessaire à la stabilité, il est le chemin de la paix et du développement11. La dysfonctionnalité du Parlement provoquée par le non-vote de la loi électorale est l’occasion de s’adresser directement au Peuple qui constitue le pouvoir constituant originaire, le pouvoir législatif suprême.

L’avant-projet de Constitution proposé répond à trois grandes préoccupations.

La première concerne la mobilisation optimale de toutes les ressources humaines, financières et économiques pour impulser le développement national. Ce qui a amené àredéfinir les règles de la nationalité et de l’accès aux diverses fonctions politico-administratives prévues dans la Constitution. Une large place est alors faite à la jeunesse, aux femmes, aux handicapés et à la diaspora. Il faut également noter les dispositions tendant à « favoriser un accès égal de tous les citoyens au crédit et aux services financiers » d’une part et, d’autre part, fixer

  • chaque année le taux d’usure applicable sur le territoire national ». C’est dans cette même logique que s’inscrit la création d’une Autorité de la concurrence, « chargée de lutter contre les pratiques anticoncurrentielles, d’étudier le fonctionnement des marchés, d’assurer l’ordre public

économique et la promotion de la concurrence loyale ».

La seconde préoccupation a trait à l’efficacité des pouvoirs de l’État en matière de

gouvernance politique, économique et socioculturelle12. Cet impératif implique l’instaurationd’un régime présidentiel, mieux adapté au contexte d’émiettement des partis politiques ; situation qui ne garantit pas une majorité au Parlement capable de soutenir l’action gouvernementale. Pour parvenir à la constitution de grands partis, garants de la stabilité politique à long terme, des dispositions sont prises à travers le mode de scrutin à un tour, couplé avec le remboursement des campagnes électorales au profit des « partis politiques ayant obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés à l’échelle nationale ».

  1. Marie-Judith Pierre-Lominy, 2007, « La violence en Haïti : permanences et mutations », in Louis Naud Pierre, Haïti, les recherches en Sciences sociales et les mutations sociopolitiques (sous la direction), Paris, L’Harmattan,pp. 115-129.
  1. Arnousse Beaulière, 2016, Haïti. Changer d’ère, Paris, L’Harmattan.
  1. États généraux sectoriels de la nation, 2019, Gouvernance politique, économique et socioculturelle.

Diagnostics et perspectives de réformes, Port-au-Prince. Disponible sur : https://www.haitilibre.com/docs/EGSN-RAPPORT-15-Avril-19-Gouvernance-politique-economique-socioculturelle.pdf. [Accessible le : 2 février 2021].

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Le passage à un Parlement à chambre unique, celle des députés, se veut une simplification des procédures législatives et de contrôle de l’action du Gouvernement. C’est dans cette logique que s’inscrit l’effort de clarification des domaines d’intervention respectifs de l’Exécutif et du Législatif en matière de production et d’application des règles. Le rôle des commissions de contrôle parlementaire est renforcé. La valorisation du rôle du Département dans la vie économique et socioculturelle territoriale offre aux candidats au Sénat une alternative intéressante. Le département est en effet érigé en lieu d’articulation et de mise en œuvre des politiques publiques nationales.

L’harmonisation de tous les mandats électifs à cinq (5) ans et l’instauration d’un poste de Vice-président, appelé à achever le mandat du Président de la République en cas d’empêchement définitif, visent à plus de maîtrise du temps politique. Cette importante innovation doit favoriser chez les dirigeants politico-administratifs un meilleur investissement de l’action structurante en matière de développement économique et social qui s’inscrit dans le temps long.

Enfin, la lutte contre l’impunité des crimes et délits dans les domaines social, économique et financier, aussi bien que le traitement efficace du contentieux administratif et électoral constitue la troisième préoccupation13. Dans cette perspective, le défi majeur est laspécialisation et la garantie d’indépendance des instances juridictionnelles. D’où la création de deux ordres de juridictions au sommet desquels se trouve la Cour de cassation : d’une part, l’ordre judiciaire axé sur les litiges de nature civile, pénale, commerciale et, de façon générale, tous les litiges qui opposent des personnes privées ; d’autre part, l’ordre administratif qui tranche les litiges mettant en cause l’État, les collectivités territoriales, l’Administration publique, les fonctionnaires publics, les services publics et les administrés. Un certain nombre de dispositions vise à renforcer l’indépendance des magistrats de ces deux ordres. Parmi ces dispositions, les principales sont : d’une part, la rationalisation du processus de recrutement des magistrats avec une large place faite à la formation et aux expériences professionnelles dans le domaine juridique ; d’autre part, la dévolution de la fonction disciplinaire au Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire pour tous les magistrats, y compris ceux du Parquet dénommés Procureurs.

C’est encore dans le souci d’une plus grande efficacité qu’une autre innovation très importante est opérée : la séparation du contrôle juridictionnel de la gestion des comptables publics, du contentieux administratif et de la poursuite des actes de corruption ou de concussion. Désormais, dans son activité de contrôle, si des faits de corruption ou de concussion lui apparaissent dans le cadre de ses missions, la Cour supérieure des comptes saisit le Procureur près le Tribunal de première instance du ressort qui diligente des poursuites judiciaires à l’encontre des ordonnateurs et des comptables publics concernés.

Somme toute, cet avant-projet de Constitution répond aux grandes préoccupations qui traversent la société haïtienne contemporaine et qui sont exprimées rapport après rapport, audition après audition d’experts. Les solutions proposées s’efforcent de tenir compte des

  1. Louis Naud Pierre, 2012, « L’Amendement de la Constitution de 1987 : L’apathie de la société civile face aux enjeux de la réforme de la justice » in L’amendement de la Constitution de 1987 : Enjeux, limites et perspectives

(sous la direction de Fritz Dorvilier), Port-au-Prince, Éditions C3 Group, col. Conjonctures ; Louis Naud Pierre, 2007, « La juridicisation de la vie économique et sociale en Haïti », in Droit et Société. Revue Internationale de Théorie du Droit et de Sociologie juridique, LGDJ, No 65, p. 123-151.

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contraintes à l’action publique dans un contexte particulier comme celui d’Haïti. Parmi ces contraintes, les principales sont : la carence des ressources humaines, économiques et financières ; la désarticulation du politique, de l’économique et du social faisant de la recherche de compromis sur des intérêts fondamentaux de la nation un parcours de combattant14 ; la prédominance d’une culture politique d’affrontement et de confrontation, traduite dans le dicton populaire « Konstitisyon se papye, bayonèt se fè » (La constitution est faite de papier, les baïonnettes sont en fer). Cette expression traduit la prédominance d’une certaine croyance qui structure l’imaginaire politique haïtien : celle dans la force comme principe des luttes de pouvoir concrètes. On en a une illustration au XIXe siècle où apparaissent les premières caractéristiques du jeu politique en Haïti ; phénomène qu’Alix Mathon analyse en terme de « société des Baïonnettes »15.La prédominance de cette réalité implique de chercher des modes de configuration des pouvoirs publics capables d’assurer la régulation des rapports politiques et économiques sans verser dans l’autoritarisme et aptes à protéger les citoyens16. Puissent donc cette nouvelle Constitution en cours d’élaboration contribuer à poser les bases institutionnelles solides de la nouvelle Haïti que nous rêvons tous !

Port-au-Prince, janvier 2021.

14 Louis Naud Pierre, 2006, La société haïtienne et le problème du changement politique : permanences et mutations », in Giulia Bonacci, Dimitri Bechacq, Pascale Berloquin-Chassany, (dir.), La Révolution haïtienne au-delà de ses frontières, Paris, Karthala, pp. 213-233.

  1. Mathon, Alix, 1985, Haïti, un cas : la société des Baïonnettes, un regard nouveau, Port-au-Prince, Éditions Le Natal.
  2. Webster Pierre, 2004, Il faut que les choses changent, Montréal, CIDIHCA.

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LIBERTÉ                ÉGALITÉ                 FRATERNITÉ

RÉPUBLIQUE D’HAÏTI

PRÉAMBULE

Le Peuple haïtien proclame la présente Constitution :

  1. pour garantir ses droits inaliénables et imprescriptibles à la vie, à la liberté et à la poursuite du bonheur, conformément à son Acte d’Indépendance de 1804 et à la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 ;
  • pour constituer une Nation haïtienne socialement juste, économiquement libre et politiquement indépendante ;
  • pour maintenir un État stable et fort, capable de protéger les valeurs, les traditions, la souveraineté et l’indépendance nationales ;
  • pour garantir la démocratie qui implique le pluralisme idéologique et l’alternance politique et affirmer les droits inviolables et inaliénables du Peuple haïtien ;
  • pour fortifier l’unité nationale, en éliminant toutes discriminations entre les populations des villes et des campagnes, par l’acceptation de la communauté de langues et de culture et par la reconnaissance du droit au progrès, à l’information, à l’éducation, à la santé, au travail et au loisir pour tous ;
  • pour porter l’État à appliquer des mesures d’aménagement du territoire en vue d’assurer une répartition juste des ressources et des services afin de préserver l’ensemble du territoire national comme lieu de vie et d’activité ;
  • pour assurer la séparation, l’indépendance et la répartition harmonieuse des pouvoirs de l’État au service des intérêts fondamentaux et prioritaires de la Nation ;
  • pour instaurer un gouvernement reposant sur les libertés fondamentales et le respect des droits humains, la justice économique, la paix sociale, l’équité de genre, la concertation et

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la participation de toute la population aux grandes décisions engageant la vie nationale et sur une décentralisation effective ;

  1. pour instaurer une justice républicaine représentant une force morale dans la société fondée sur des principes de droit, de liberté, d’égalité et de fraternité ;
  • pour assurer aux femmes une représentation dans les instances de pouvoir et de décision qui soit conforme à l’égalité des sexes.

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TITRE IER.-

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Chapitre Ier.-

Les caractéristiques fondamentales

de la République d’Haïti

Article 1er.- Haïti est une République souveraine, démocratique, indivisible, laïque et solidaire.

Son organisation est décentralisée.

Article 2.-     La ville de Port-au-Prince est la capitale d’Haïti et le siège de son Gouvernement.

Ce siège peut être déplacé en cas de force majeure.

Article 3.-     Les couleurs nationales sont le bleu et le rouge.

L’emblème de la Nation haïtienne est le drapeau qui répond à la description suivante :

  1. deux (2) bandes d’étoffe d’égales dimensions : l’une bleue en haut, l’autre rouge en bas, placées horizontalement ;
  • au centre, sur un carré d’étoffe blanche, sont disposées les armes de la République.

Les armes de la République sont : le Palmiste surmonté du bonnet de la Liberté et

ombrageant de ses palmes un trophée d’armes avec la légende : l’Union fait la Force.

Article 4.-         La devise nationale est : Liberté – Égalité – Fraternité.

Article 5.-         L’hymne national est : La Dessalinienne.

Le salut du drapeau est obligatoire.

Article 6.-         Tous les Haïtiens sont unis par une langue commune : le créole.

Le créole et le français sont les langues officielles de la République.

Article 7.-         L’unité monétaire est la gourde. Elle est divisée en centimes.

Chapitre II.-

Le territoire de la République d’Haïti

Article 8.-         Le territoire de la République d’Haïti est limité à l’Est par la République Dominicaine, au Nord par l’Océan Atlantique, au Sud et à l’Ouest par la Mer des Caraïbes ou Mer des Antilles. Il comprend :

  1. la partie occidentale de l’île d’Haïti ainsi que les îles adjacentes : La Gonâve, La Tortue, l’Île à Vache, Les Cayemittes, La Navase, La Grande Caye et les autres îles de la mer territoriale ;
  • la mer territoriale et la zone économique exclusive ;

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c)    le milieu aérien surplombant la partie terrestre et maritime.

Article 9.-         Le territoire de la République d’Haïti est inviolable et ne peut être aliéné ni en tout, ni en partie par aucun traité ou convention.

Article 10.-      Le territoire de la République est divisé et subdivisé en départements, arrondissements, communes et sections communales.

La loi détermine le nombre de ces divisions et subdivisions, et en règle l’organisation et le fonctionnement.

Chapitre III.-

La nationalité haïtienne

Article 11.- Possède la nationalité haïtienne de naissance tout individu né en Haïti ou àl’étranger d’un père haïtien ou d’une mère haïtienne.

Tout individu ayant une ascendance haïtienne peut faire valoir ses droits à la nationalité haïtienne, dans les conditions prévues par la loi.

Possède également la nationalité haïtienne de naissance tout individu né sur le sol de la République d’Haïti.

Aucun Haïtien ne peut faire prévaloir sa nationalité étrangère sur le territoire de la République d’Haïti.

Il est possible de renoncer à la nationalité haïtienne, si l’intéressé jouit d’une autre nationalité. Cette renonciation résulte d’une demande solennelle et expresse de l’intéressé auprès du tribunal de première instance haïtien territorialement compétent.

Article 12.- La nationalité haïtienne peut être acquise par la naturalisation après cinq années derésidence continue sur le territoire de la République.

Chapitre IV.-

La citoyenneté

Article 13.- La jouissance, l’exercice des droits civils et politiques constituent la qualité ducitoyen.

Le régime de la citoyenneté est fixé par la loi, qui règle notamment l’octroi, la suspension et la perte des droits civils et politiques.

Article 14.- L’âge de la majorité est fixée à dix-huit (18) ans.

Article 15.- Les Haïtiens, sans distinction de sexe ni d’état civil, âgés de dix-huit ans au moins,jouissent de leurs droits civils et politiques s’ils réunissent les autres conditions prévues par la Constitution et par la loi.

Article 16.- Le principe de parité est reconnu à tous les niveaux de la vie nationale, notammentdans les services publics.

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La loi électorale prévoit des dispositions encourageant les partis politiques à désigner des femmes aux postes électifs.

TITRE II.-

DROITS, DEVOIRS ET LIBERTÉS

Chapitre Ier.-

Le droit à la vie, à la santé

et au respect de la personne humaine

Article 17.- L’État garantit à tous le droit à la vie, à la santé et au respect de la personnehumaine, conformément à la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948.

Article 18.- Pour assurer la protection et le maintien du système de santé, l’État crée deshôpitaux, des dispensaires et des centres de santé.

L’État encourage l’initiative privée dans le domaine de la santé.

Article 19.- L’État garantit le droit de tout individu à un logement décent, à l’éducation, àl’alimentation et à la sécurité sociale.

Article 20.- L’État protège la famille, base fondamentale de la société.

Il doit une égale protection à toutes les familles. Il procure aide et assistance à la maternité, à l’enfance et à la vieillesse.

La violence intrafamiliale et sexuelle, sous toutes ses formes, est condamnée.

L’État prend les mesures nécessaires pour prévenir et sanctionner la violence à l’égard des femmes.

Chapitre II.-

Le droit à un environnement sain

Article 21.- L’environnement naturel étant le cadre privilégié de vie de la population, lescomportements qui risquent de perturber l’équilibre écologique sont interdits.

Article 22.- La loi détermine les conditions de protection de la faune et de la flore. Ellesanctionne les contrevenants.

Article 23.- Nul ne peut introduire dans le pays des déchets ou résidus de provenance étrangèrede quelque nature que ce soit, sous peine de poursuites civiles et pénales.

Chapitre III.- La liberté individuelle

Article 24.- Nul ne peut être poursuivi, arrêté ou détenu que dans les cas déterminés par la loi etselon les formes qu’elle prescrit.

La responsabilité pénale est personnelle. Nul ne peut être arrêté à la place d’un autre.

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Article 25.- L’arrestation et la détention, sauf en cas de flagrant délit, ont lieu sur un mandatécrit d’un juge légalement compétent.

Sauf en cas de flagrant délit, aucune arrestation sur mandat, aucune perquisition ne peut se faire entre six (6) heures du soir et six (6) heures du matin.

Article 26.- Toute rigueur ou contrainte qui n’est pas nécessaire pour appréhender une personneou la maintenir en détention, toute pression morale ou brutalité physique, notamment pendant l’interrogatoire, sont interdites.

Article 27.- Nul ne peut être interrogé en l’absence de son avocat ou d’un témoin de son choix.

Article 28.- Nul ne peut être maintenu en détention s’il n’a comparu dans les quarante-huit (48)heures qui suivent son arrestation devant un juge appelé à statuer sur la légalité de l’arrestation et si ce juge n’a confirmé la détention par une décision motivée.

Si l’arrestation est jugée illégale, le juge ordonne la libération immédiate du détenu et cette décision est exécutoire sur minute nonobstant appel, pourvoi en cassation ou défense d’exécuter.

Article 29.- Toutes violations des dispositions relativesàla liberté individuelle sont des actesarbitraires. Les personnes lésées peuvent, sans autorisation préalable, saisir les tribunaux compétents pour poursuivre les auteurs et les exécutants de ces actes arbitraires quelles que soient leurs qualités et fonctions.

Article 30.– Les fonctionnaires et les employés de l’État sont directement responsables selon leslois pénales, civiles et administratives des actes accomplis en violation de droits. Dans ces cas, la responsabilité civile s’étend aussi à l’État.

Chapitre IV.- Les droits et libertés en matière pénale

Article 31.- Nulle peine ne peut être établie que par la loi, ni infligée que dans les cas que celle-ci détermine.

Article 32.- La peine de mort est abolie en toute matière et en toute circonstance.

Article 33.- La loi ne peut avoir d’effet rétroactif, sauf en matière pénale et uniquement quandelle est favorable à l’accusé.

Article 34.- Nul ne peut être obligé de témoigner contre lui-même en matière criminelle,correctionnelle ou de simple police.

Article 35.- Dans le cadre de la Constitution et de la loi, le jury est établi en matière criminellepour les crimes de sang et en matière de délits politiques.

Article 36.- Aucune perquisition, ni aucune saisie ne peut avoir lieu qu’en vertu de la loi et dansles formes qu’elle prescrit.

Article 37.- Aucun citoyen, quelle que soit sa qualité, civile ou militaire, ne peut être distrait desjuges que la Constitution et la loi lui assignent.

Article 38.- La justice militaire est compétente uniquement pour juger les infractions à ladiscipline militaire commises par des militaires et pour statuer sur les crimes et délits commis en temps de guerre.

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Article 39.- L’organisation et le fonctionnement des prisons doivent respecter le principefondamental de la dignité humaine.

Chapitre V.-

La liberté d’expression et de la presse

Article 40.- Tout Haïtien a le droit d’exprimer librement sesopinions, en toute matière et partout moyen de son choix.

Article 41.- La liberté de la presse est garantie. Le journaliste exerce librement sa professiondans le cadre de la loi. Cet exercice ne peut être soumis à aucune autorisation, ni censure, sauf en cas de guerre.

Le journaliste ne peut être contraint de révéler ses sources. Il a toutefois pour devoir de vérifier l’authenticité et l’exactitude des informations délivrées. Il est également tenu de respecter l’éthique et la déontologie professionnelles.

Article 42.- Tout délit de presse ainsi que les abus du droit d’expression relèvent du code pénal.

Article 43.- La liberté et le secret de la correspondance, et de toutes les autres formes decommunication, sont inviolables. Leur limitation ne peut résulter que d’un acte motivé de l’autorité judiciaire et selon les garanties accordées par la loi.

Chapitre VI.-

Le droit à l’information

Article 44.- Pourl’information des citoyens, l’État assure la publication, dans les languesofficielles de la République, des lois, des traités, conventions et accords internationaux, des ordonnances, des décrets, des arrêtés et de tous autres textes officiels qui touchent à la vie de la Nation, exception faite des informations relevant de la sécurité nationale.

Chapitre VII.-

La liberté de conscience

Article 45.- Toutes les religions et tous les cultes sont libres.

Toute personne a le droit de professer sa religion et son culte, pourvu que l’exercice de ce droit ne trouble pas l’ordre et la paix publics.

Article 46.- La loi établit les conditions de reconnaissance et de fonctionnement des religions etdes cultes.

Chapitre VIII.-

La liberté de réunion et d’association

Article 47.- La liberté d’association et de réunion est garantie. Elle s’exerce de manièrepacifique et sans armes.

16

Les manifestations sur la voie publique sont soumises à une notification préalable aux autorités de police.

Article 48.- Les partis et groupements politiques concourent à l’expression du suffrage. Ils seforment et exercent leur activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie.

La loi détermine leurs conditions de reconnaissance et de fonctionnement, ainsi que les avantages et privilèges qui leur sont réservés.

Chapitre IX.-

L’éducation, l’enseignement, la recherche et la culture

Article 49.- L’État garantit le droit à l’éducation.

L’éducation est libre à tous les niveaux d’enseignement. Cette liberté s’exerce sous le contrôle de l’État.

L’enseignement est obligatoire jusqu’à l’âge de seize (16) ans.

Article 50.- L’éducation publique est à la charge de l’État et des collectivités territoriales.

Ils doivent mettre l’école gratuitement à la portée de tous et veiller au niveau de formation des enseignants des secteurs public et privé.

Article 51.- L’enseignement supérieur est libre. Il est dispensé par l’Université d’État d’Haïti etpar les universités publiques départementales, qui sont autonomes, ainsi que par des universités privées, des écoles supérieures publiques et des écoles supérieures privées agréées par l’État. Leur organisation et leur fonctionnement sont fixés par la loi.

Article 52.- L’État finance le fonctionnement et le développement de l’Université d’État d’Haïti,des universités publiques départementales et des écoles supérieures publiques.

L’État encourage le développement de la recherche, de la science et de la technologie.

Article 53.- Un organisme public indépendant régule et contrôle la qualité de l’enseignementsupérieur et de la recherche scientifique sur l’ensemble du territoire national. Sa mission s’étend aux institutions publiques et privées œuvrant dans ces domaines. Chaque année, il publie un rapport d’évaluation et établit une liste des institutions les plus performantes.

La loi détermine la dénomination, l’organisation et le fonctionnement de cet organisme.

Article 54.- Les richesses archéologiques, historiques, culturelles et folkloriques du pays demême que les richesses architecturales, témoins de la grandeur de notre passé, font partie du patrimoine national. En conséquence, les monuments, les ruines, les sites des grands faits d’armes de nos ancêtres, les centres réputés de nos croyances africaines et tous les vestiges du passé sont placés sous la protection de l’État. La loi détermine pour chaque domaine les conditions spéciales de cette protection.

17

Article 55.-

Une académie haïtienne est instituée en vue de fixer la langue créole et de permettre son développement scientifique et harmonieux.

La loi fixe l’organisation et le fonctionnement de l’académie haïtienne.

Article 56.-

L’État garantit aux personnes handicapées les moyens pour assurer leur éducation et leur autonomie en vue de leur pleine intégration à la société.

Article 57.-

L’État et les collectivités territoriales ont le devoir de prendre toutes les dispositions nécessaires à l’alphabétisation de la population ciblée. Ils encouragent toutes les initiatives privées tendant à cette fin.

Article 58.-

Tout enseignant a droit à un salaire de base juste et équitable.

Article 59.-

Hormis les cas de flagrant délit, l’enceinte des établissements d’enseignement est inviolable. Les forces de l’ordre ne peuvent y pénétrer sans l’accord de la direction de ces établissements.

Chapitre X.-

La liberté du travail

Article 60.-

La liberté du travail est garantie.

Article 61.-

Tout employé d’une institution privée ou publique a droit à un juste salaire, au repos, au congé annuel payé et au boni.

Article 62.-

L’État garantit au travailleur l’égalité des conditions de travail et de salaire quel que soit son sexe, ses croyances, ses opinions et son statut matrimonial.

Article 63.-

La liberté syndicale est garantie. Tout travailleur des secteurs public et privé peut adhérer au syndicat de son choix pour la défense exclusive de ses intérêts de travail.

Les syndicats sont apolitiques, à but non-lucratif et non confessionnel. Nul ne peut être contraint d’y adhérer.

Article 64.-

Le droit de grève est reconnu dans les limites déterminées par la loi. Néanmoins, un service minimum doit être garanti en toute circonstance, sous peine de sanction.

Article 65.-

La loi fixe la limite d’âge pour le travail salarié. Des lois spéciales réglementent le travail des mineurs et des gens de maison.

Article 66.-

L’État garantit à tous la sécurité sociale, suivant les critères et modalités établis par la loi.

Chapitre XI.-

La liberté économique

Article 67.-

La liberté économique est garantie tant qu’elle ne s’oppose pas à l’intérêt social.

L’État encourage l’entreprise privée dans les conditions nécessaires à l’accroissement de la richesse nationale et de manière à assurer la participation du plus grand nombre au bénéfice de cette richesse.

18

L’État prend des mesures pour favoriser un accès égal de tous les citoyens au crédit et aux services financiers.

La Banque centrale fixe chaque année le taux d’usure applicable sur le territoire national.

Article 68.- Aucun monopole ne peut être établi en faveur de l’État et des collectivitésterritoriales que dans l’intérêt exclusif de la société. Ce monopole ne peut être cédé à un particulier.

Article 69.- Il est créé un organisme public indépendant jouissant de la personnalité juridiquedénommé : Autorité de la concurrence.

L’Autorité de la concurrence est chargée de lutter contre les pratiques anticoncurrentielles, d’étudier le fonctionnement des marchés, d’assurer l’ordre public économique et la promotion de la concurrence loyale. Elle prend des sanctions financières et administratives contre les opérateurs qui violent la législation relative à la concurrence loyale.

La loi fixe le mode d’organisation et de fonctionnement de l’Autorité de la concurrence.

Chapitre XII.-

L’imposition

Article 70.- Aucune imposition ne peut être établie que par la loi.

Article 71.- La loi sanctionne les infractions contre le fisc et l’enrichissement illicite.

Les fonctionnaires qui ont connaissance de tels faits ont pour devoir de les signaler à l’autorité compétente.

Chapitre XIII.-

La propriété

Article 72.- La propriété privée légalement acquise est reconnue et garantie par l’État. La loi endétermine les modalités d’acquisition et de jouissance, ainsi que les limites.

Article 73.- La spoliation est interdite et réprimée par la loi. Des circonstances aggravantes sontprévues par la loi pour les spoliateurs en position d’autorité.

L’État prend toutes les dispositions pour rétablir rapidement dans son droit le propriétaire injustement privé de la jouissance de ses biens.

Article 74.- L’expropriation pour cause d’utilité publique peut avoir lieu moyennant le paiementou la consignation ordonnée par justice aux ordres de qui de droit, d’une juste et préalable indemnité fixée à dire d’expert.

Si le projet initial est abandonné, l’expropriation est annulée et l’immeuble ne pouvant être l’objet d’aucune autre spéculation, doit être restitué à son propriétaire originaire, sans aucun remboursement pour le propriétaire modeste.

La mesure d’expropriation est effective à partir de la mise en œuvre du projet.

19

Article 75.- Le droit de propriété ne s’étend pas au littoral, aux sources, rivières, cours d’eau,mines et carrières. Ils font partie du domaine public de l’État.

Article 76.- La propriété intellectuelle, scientifique, littéraire et artistique est protégée par la loi.

Chapitre XIV.-

L’Administration et la fonction publiques

Article 77.- L’Administration publique nationale est impersonnelle.Elle a pour finalité lasatisfaction de l’intérêt général. Elle est l’instrument par lequel l’État réalise ses missions et objectifs. Pour garantir sa performance, elle doit être gérée avec honnêteté, efficacité et rationalité.

L’Administration publique nationale est constituée de l’Administration d’État et de l’Administration des collectivités territoriales.

L’Administration publique nationale garantit l’égalité de traitement et d’accès des citoyens aux services publics, sans considération de sexe, d’origine, de langue, de croyance, d’opinion et de statut matrimonial.

Des objectifs sont fixés à l’Administration publique et celle-ci doit rendre compte de ses résultats.

Article 78.- L’Administration publique repose sur les principes de l’aptitude, du mérite et de ladiscipline.

Article 79.- La fonction publique est une carrière. Aucun fonctionnaire ne peut être engagé quepar voie de concours ou selon d’autres voies prescrites par la Constitution et par la loi, ni être sanctionné que pour des causes déterminées par la loi.

Elle garantit la sécurité à l’emploi.

Le contentieux de l’Administration publique est réservé aux juridictions administratives.

Article 80.- Les fonctionnaires et employés publics sont exclusivement au service de l’Étatoudes collectivités territoriales. Ils sont tenus à l’observation stricte des normes et éthique déterminées par la loi sur la fonction publique.

Le cumul des fonctions publiques salariées dans l’État ou dans les collectivités territoriales est interdit, sauf pour l’enseignement ou les études, et sous réserve des dispositions particulières.

Article 81.- Les fonctionnaires et employés publics peuvent s’associer pour défendre leurs droitsdans les conditions prévues par la Constitution et par la loi.

Article 82.- Les militaires en activité de service ne peuvent être nommés à aucune fonctionpublique de nature civile.

Article 83.- Les membres de la force publique exercent leur droit de vote, conformément à laConstitution et à la loi.

Article 84.- Un militaire ou un policier peut se porter candidat à une fonction élective un (1) anaprès la cessation de ses fonctions au sein de la force publique.

20

Chapitre XV.-

Les droits des étrangers

Article 85.- Les conditions d’admission et de séjour des étrangers en Haïti sont établies par laloi.

Article 86.- L’étranger jouit des droits civils, des droits économiques et sociaux sous la réservedes dispositions légales relatives au droit de propriété immobilière, à l’exercice des professions, au commerce de gros, à la représentation commerciale et aux opérations d’importation et d’exportation.

Article 87.- Le droit d’asile estreconnuà toute personne qui, craignant avec raison d’êtrepersécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner.

Chapitre XVI.-

Les devoirs du citoyen

Article 88.- À la qualité de citoyen se rattache le devoir civique. Tout droit est contrebalancépar le devoir correspondant.

Article 89.- Le devoir civique est l’ensemble des obligations du citoyen dans l’ordre moral,politique, social et économique vis-à-vis de l’État et de la Patrie. Ces obligations sont de :

  1. respecter la Constitution et l’emblème national ;
  • respecter les lois et les règlements ;
  • participer aux élections et référendums en toute liberté ;
  • acquitter les impôts et les taxes ;
  • participer aux jurys en matière pénale ;
  • défendre la Patrie en cas de guerre ;
  • s’instruire et se perfectionner ;
  • respecter et protéger l’environnement ;
  1. respecter les deniers et biens de l’État ;
  • respecter le bien d’autrui ;
  • ne pas faire de la propriété privée un usage contraire à l’intérêt général ;
  • œuvrer pour le maintien de la paix ;

21

  • m)   fournir assistance aux personnes en danger ;
  • respecter les droits et la liberté d’autrui.

Toute dérogation à ces obligations est punie par la loi.

Article 90.- L’État met en place un service militaire obligatoire pour tous lescitoyens âgés dedix-huit ans au moins.

Il peut également établir un service civique mixte obligatoire.

La loi détermine l’organisation et le fonctionnement de ces services.

Chapitre XVII.-

La protection du citoyen

Article 91.- Il est créé un organisme public indépendant dénommé : Office de la protection ducitoyen.

L’Office de la protection du citoyen a pour mission de protéger les individus contre toutes les formes d’abus de l’Administration publique, de promouvoir et de défendre les droits humains.

Dans l’exercice de ses fonctions, l’Office de la protection du citoyen accorde une attention spéciale aux plaintes déposées par les femmes, particulièrement en ce qui a trait aux discriminations et aux agressions dont elles peuvent être victimes notamment dans leur travail.

Article 92.- L’Office de la protection du citoyen est dirigé par un citoyen qui porte le titre deProtecteur du citoyen.

Le Protecteur du citoyen est nommé par le Président de la République avec l’accord de l’Assemblée nationale.

Son mandat est fixé à sept (7) ans pendant lequel il est inamovible, sauf en cas de démission ou de décès. Il n’est pas renouvelable.

Article 93.- L’organisation et le fonctionnement de l’Office dela protection du citoyen sontfixés par une loi organique.

TITRE III.-

SOUVERAINETÉ NATIONALE

Chapitre Ier.-

Dispositions générales

Article 94.- La souveraineté nationale réside dans l’universalité des citoyens.

Les citoyens exercent directement les prérogatives de la souveraineté par :

  1. l’élection du Président de la République ;
  • l’élection des députés ;

22

  • c)      l’élection des membres des collectivités territoriales ;
  • le référendum.

Article 95.- Le suffrage est toujours universel, égal et secret.

Article 96.- Le financement des élections nationales et locales ainsi que des référendums estassumé par l’État conformément à la loi.

Un plafond des dépenses de campagnes électorales est fixé par la loi électorale.

Le dépassement de ce plafond entraîne l’annulation de l’élection du ou des candidats concernés selon les dispositions de la loi électorale.

  • l’occasion des élections nationales, les partis politiques ayant obtenu au moins

10 % des suffrages exprimés à l’échelle nationale ont droit au remboursement des frais engagés.

  • l’occasion des élections locales, les partis politiques ayant obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés à l’échelle de la circonscription territoriale concernée ont droit au remboursement des frais engagés.

Ces remboursements sont proportionnels au nombre de suffrages recueillis.

La loi électorale complète les dispositions du présent article et fixe ses modalités d’application.

Article 97.- Les citoyens délèguent l’exercice de la souveraineténationaleàtrois pouvoirs :

  1. le Pouvoir législatif ;
  • le Pouvoir exécutif ;
  • le Pouvoir judiciaire.

Le principe de la séparation des trois pouvoirs est consacré par la Constitution.

Aucun pouvoir ne peut sortir des limites qui lui sont imparties par la Constitution.

Article 98.- Les trois pouvoirs sont indépendants dansl’exercice de leurs fonctions respectives.

Ils collaborent les uns avec les autres au nom de l’intérêt supérieur de l’État.

Chapitre II.-

Le Pouvoir législatif

Section 1re.- L’organisation et le fonctionnement du Pouvoir législatif

Article 99.- Le Pouvoir législatif s’exerce par une chambre représentativecomposée de députésélus au suffrage universel direct et dénommée : Assemblée nationale.

L’Assemblée nationale constitue le Parlement ou Corps législatif.

Article 100.-Les députés sont élus au scrutin majoritaire uninominal à un tour.

Le territoire national est divisé en circonscriptions de démographie égale qui désignent chacune un député.

23

Les Haïtiens vivant à l’étranger disposent de sièges à l’Assemblée nationale dont le nombre et les circonscriptions sont déterminés par la loi électorale. Ce nombre ne peut être inférieur à cinq pour cent (5 %) du nombre total des sièges.

Article 101.-L’élection des députés a lieu au plus tard le dernier dimanche du deuxième mois quiprécède l’expiration de la législature au moment de l’élection.

Les députés entrent en fonction le deuxième lundi de janvier qui suit leurs élections et siègent en deux (2) sessions annuelles. La durée de leur mandat forme une législature.

Article 102.-Pour être élu député, il faut remplir les conditions suivantes :

  1. jouir de la nationalité haïtienne ;
  • être âgé de vingt-cinq (25) ans au moins ;
  • jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive ou infamante ;
  • être propriétaire d’au moins un immeuble ou exercer une profession ou un métier dans la circonscription ;
  • être en règle avec le fisc, honorer à temps ses obligations fiscales ;
  • avoir sa résidence habituelle en Haïti.

Article 103.-Le mandat de député est incompatible avec toute fonction rétribuée par l’État, saufcelle d’enseignant.

Ne peuvent être élus députés :

  1. les concessionnaires ou cocontractants de l’État pour l’exploitation des services publics ;
  • les ministres, les directeurs généraux de l’Administration publique et les juges dont les fonctions n’ont pas cessé un an avant la date des élections ;
  • toute personne se trouvant dans les autres cas d’inéligibilité prévus par la présente Constitution et par la loi.

Article 104.-Les députés sont élus pour cinq (5) ans et sont indéfiniment rééligibles.

L’Assemblée nationale est renouvelée intégralement tous les cinq (5) ans.

Article 105.-    Les députés prêtent le serment suivant lors de leur prise de fonction :

  • Je jure de m’acquitter loyalement de ma tâche, de maintenir et de sauvegarder les droits du Peuple haïtien et d’être fidèle à la Constitution. »

Article 106.-Chaque député reçoit une indemnité mensuelle à compter de sa prestation deserment.

Article 107.-Durant leur mandat, les députés jouissent de l’immunité dans les conditions etlimites fixées par la Constitution.

L’immunité parlementaire protège les députés dans l’exercice des attributions liées à leur mandat.

24

Aucune action ne peut être engagée contre un député pour des actes liées à ses fonctions et accomplis en qualité de parlementaire, même après la fin son mandat.

Les crimes, délits et contraventions imputés aux députés sont poursuivis devant les juridictions de droit commun.

Les députés peuvent faire l’objet de mesures d’arrestation en cas de flagrant délit et en cas de condamnation définitive. Le Bureau de l’Assemblée nationale en est informé sans délai.

Article 108.-En cas de décès, de démission, de déchéance, de condamnation judiciaire oud’acceptation d’une fonction incompatible avec celle de membre de l’Assemblée nationale, il est pourvu au remplacement du député par une élection partielle. Le député ainsi élu achève le mandat de son prédécesseur.

L’assemblée primaire électorale est convoquée par le Conseil électoral permanent dans le mois qui suit l’enregistrement de la vacance.

L’élection a lieu dans les trente (30) jours qui suivent la convocation du corps électoral de la circonscription concernée.

Il en est de même en cas d’annulation d’une ou de plusieurs élections prononcées par la Cour constitutionnelle dans une ou plusieurs circonscriptions.

Cependant, si la vacance se produit au cours de la dernière session ordinaire de la législature ou après la session, il n’y a pas lieu à élection partielle.

Est déchu de sa qualité de député celui qui, pendant son mandat, est frappé d’une condamnation à une peine afflictive ou infamante prononcée par un tribunal de droit commun ayant acquis l’autorité de la chose jugée.

Article 109.-À l’ouverture de la première session ordinaire, les députés élisent à la majoritéabsolue le Bureau de l’Assemblée nationale pour un mandat d’un (1) an.

Article 110.-Les séances de l’Assemblée nationale sont publiques. Néanmoins, elles peuventavoir lieu à huis clos sur demande de cinq (5) députés au moins.

Article 111.-L’Assemblée nationale ne peut siéger et délibérer sans la présence en son sein d’aumoins un tiers (1/3) des députés.

Article 112.- L’année parlementaire est divisée en deux(2) sessions. La première session va dudeuxième lundi de janvier au deuxième lundi de juillet. La seconde, du deuxième lundi du mois de septembre au deuxième lundi de décembre.

Dans l’intervalle des sessions ordinaires, et en cas d’urgence, le Président de la République peut convoquer l’Assemblée nationale en session extraordinaire. Il rend compte de cette mesure par un message. L’Assemblée nationale ne peut se prononcer sur un objet étranger à l’ordre du jour arrêté par le Président de la République.

Article 113.- L’Assemblée nationale ne peut être dissouteni ajournée.

Le mandat de ses membres ne peut être ni réduit ni prorogé.

Article 114.-L’Assemblée nationale a son siège à Port-au-Prince. Néanmoins, en cas de forcemajeure, ce siège peut être transféré dans une autre partie du territoire national.

25

Article 115.-Le règlement de l’Assemblée nationale détermineles conditions dans lesquelles elleexerce ses attributions constitutionnelles, nomme son personnel et arrête sa discipline.

L’Assemblée nationale est compétente pour prendre des sanctions disciplinaires à l’encontre de ses membres, notamment en cas d’obstruction empêchant la tenue de ses travaux et de ses séances. Elles sont prononcées à la majorité absolue des députés présents.

Section 2.- L’exercice et les attributions du Pouvoir législatif

Article 116.- Le Pouvoir législatif exerce la fonction législative à titre principal, dans lesconditions fixées par la présente Constitution.

Article 117.- Sont du domaine de la loi :

  1. la citoyenneté, les droits civiques et les libertés publiques ;
  • les conditions selon lesquelles un étranger peut acquérir la nationalité haïtienne ;
  • le régime électoral ;
  • l’organisation territoriale ;
  • la création des catégories de collectivités territoriales, leurs compétences et leurs ressources ;
  • la nationalité, l’état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et les libéralités ;
  • la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables, la procédure pénale, la procédure civile et l’amnistie ;
  • la création, l’organisation, le fonctionnement et la suppression de juridictions ;
  1. le statut des magistrats, des officiers ministériels et des auxiliaires de la justice ;
  • la fonction publique d’Etat et la fonction publique territoriale ;
  • l’organisation et le fonctionnement des organismes publics indépendants ;
  • l’état d’urgence et l’état de siège ;
  • l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature et toute autre matière relevant de la fiscalité ;
  • le régime d’émission de la monnaie ;
  • les nationalisations d’entreprises et les transferts de propriété d’entreprises du secteur public au secteur privé ;
  • la recherche, l’exploration et l’exploitation des ressources gazières et pétrolières, des ressources minières, naturelles et énergétiques ;
  • l’organisation de la sécurité publique et de la défense nationale ;

26

  • r)       l’enseignement ;
  • le droit du travail et de la protection sociale ;
  • la protection de l’environnement.

Est du domaine du règlement toute autre matière non prévue au premier alinéa, sauf disposition contraire de la présente Constitution.

Article 118.-L’initiative des lois appartient concurremment au Pouvoir législatif et au Pouvoirexécutif, sauf les cas prévus par la Constitution.

Article 119.-Les projets et propositions de loi sont soumis en séance plénière au vote del’Assemblée nationale dans la rédaction arrêtée par la commission parlementaire compétente.

Tout projet ou proposition de loi est voté article par article, avant lecture intégrale.

Les amendements émanés des députés sont admissibles tant au sein des commissions parlementaires qu’en séance plénière.

Article 120.-La procédure législative ordinaire réclame deux lectures devant l’Assemblée nationale.

La procédure d’urgence demandée par le Président de la République en cas d’urgence contraint l’Assemblée nationale à examiner le projet de loi toutes affaires cessantes.

Si la procédure d’urgence est approuvée par la majorité des députés présents, elle dispense d’une seconde lecture.

Les projets de loi sont inscrits prioritairement à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale dans le mois qui suit leur dépôt.

Un délai minimum de quinze jours sépare la première et la seconde lecture devant l’Assemblée nationale, sauf procédure d’urgence.

Les projets et propositions de loi sont adoptés à la majorité des membres présents, sauf s’il en est autrement prévu par la présente Constitution.

Article 121.-    Des lois organiques sont adoptées pour compléter la Constitution quand celle-ci le prévoit. La procédure législative ordinaire leur est applicable sous réserve des dispositions spéciales prévues par la Constitution.

Les lois organiques exigent un vote à la majorité absolue des membres de l’Assemblée nationale.

Elles sont promulguées après avoir été jugées conformes à la Constitution par la Cour constitutionnelle.

Article 122.-Le budget de la République, en recettes et en dépenses, est adopté par l’Assembléenationale en équilibre sous la forme de loi de finances.

L’initiative des lois de finances appartient au Président de la République, sur proposition du Ministre des Finances.

27

Le budget de la République comprend le budget général de l’État, les budgets des collectivités territoriales, les budgets des services de l’État gérés de manière autonome et les budgets des comptes spéciaux du Trésor.

La départementalisation du budget de la République est consacrée par la Constitution.

La loi budgétaire détermine, pour chaque année fiscale, la nature et le montant des recettes et des dépenses de l’État. Elle fixe la nature et la proportion des revenus publics attribués aux collectivités territoriales. Elle attribue une partie raisonnable du budget de l’État à l’aménagement du territoire.

Les crédits sont alloués par programme relevant d’un ou de plusieurs services administratifs à l’intérieur d’une administration d’État ou d’une administration de collectivité territoriale.

Aucun amendement parlementaire n’est recevable lorsque son adoption diminue les recettes ou augmente les dépenses sans la prévision correspondante des voies et moyens.

Aucun projet ne peut être ajouté à la liste de ceux qui figurent dans les programmes prévus dans le projet de loi de finances déposé au Parlement.

Les comptes généraux et le budget de l’État, accompagnés du rapport de la Cour des comptes sont soumis à l’Assemblée nationale par le Ministre des Finances dans les délais établis par la loi. Il en est de même du bilan annuel et des opérations de la Banque centrale, ainsi que de tous les autres comptes de l’État et des collectivités territoriales.

Article 123.- L’exerciceadministratif commence le 1er octobre de chaque année et finit le 30septembre de l’année suivante.

Si l’Assemblée nationale n’a pas adopté le budget avant le début de l’exercice administratif, le texte initialement déposé au Parlement est mis en vigueur par décret pris en Conseil des ministres.

Sans préjudice des poursuites civiles et pénales engageant leur responsabilité, l’adoption annuelle de la loi de règlement vaut décharge pour l’ensemble des ordonnateurs et des comptables publics.

Article 124.- La politique monétaire est déterminée par la Banque centrale conjointement avec leMinistère des Finances.

La Banque centrale est une institution publique jouissant de la personnalité juridique et de l’autonomie financière. Son statut est fixé par la loi.

La Banque centrale est investie du privilège exclusif d’émettre la monnaie conformément à la loi.

Article 125.-Toute loi adoptée par l’Assemblée nationale est immédiatement adressée auPrésident de la République qui, avant de la promulguer et dans un délai de quinze jours francs à compter de la réception du texte, a le droit d’y faire des objections en tout ou en partie. Dans ce cas, le Président de la République renvoie la loi avec ses objections à l’Assemblée nationale.

28

Si l’Assemblée nationale adopte à nouveau, à la majorité absolue de ses membres, la loi dans sa rédaction initiale, elle est considérée comme définitive. Le Président de la République promulgue cette loi.

Si l’Assemblée nationale ne rejette pas les objections à la majorité absolue de ses membres, la loi est promulguée amputée des dispositions contestées par le Président de la République, à la condition qu’elles soient séparables du reste du texte.

Si l’Assemblée nationale accepte les objections formulées par le Président de la République, la procédure législative ordinaire reprend uniquement sur les parties modifiées de la loi.

Article 126.-Si le Président de la République ne fait aucune objection dans le délai de quinzejours francs, la loi est promulguée, à moins que la session de l’Assemblée nationale n’ait pris fin dans l’intervalle, auquel cas la loi est ajournée.

La loi ainsi ajournée est, à l’ouverture de la session suivante, adressée au Président de la République pour l’exercice de son droit d’objection.

Article 127.-Nul ne peut présenter en personne des pétitions à la tribune de l’Assembléenationale.

Les pétitions sont enregistrées au Bureau de l’Assemblée nationale et il en est donné lecture une fois par mois lors de la session ordinaire.

Article 128.-L’Assemblée nationale exerce une fonction de contrôle sur les politiques publiquesmises en œuvre par les ministres.

La mission de contrôle est notamment assumée par les commissions parlementaires.

Outre les commissions permanentes, des commissions d’enquête sont constituées pour éclairer les dysfonctionnements des politiques publiques et des services publics qui y concourent.

Les commissions d’enquête n’ont pas d’attributions juridictionnelles. Elles ont cependant le pouvoir de convoquer tout citoyen, à l’exception du Président de la République.

Une loi organique fixe l’organisation, le fonctionnement et les compétences des commissions d’enquête.

Article 129.-    Outre  les  autres  fonctions  prévues  par  la  présente  Constitution,  l’Assemblée

Nationale est compétente pour :

  1. ratifier toute décision de déclarer la guerre quand toutes les tentatives de conciliation ont échoué ;
  • ratifier les traités, accords et conventions internationaux qui sont en conformité avec la Constitution sous forme de loi ;
  • participer à la révision de la Constitution selon la procédure qui y est indiquée ;
  • ratifier la décision de l’Exécutif de déplacer le siège du Gouvernement en cas de force majeure ;

29

  • proroger l’état de siège ou l’état d’urgence décrété par le Président de la République quinze jours après son entrée en vigueur, le cas échéant ;
  • arrêter avec l’Exécutif les garanties constitutionnelles à suspendre en cas d’état de siège.

Article 130.-    L’interprétation des lois par voie d’autorité n’appartient qu’à l’Assemblée nationale ; elle est donnée dans la forme d’une loi.

Article 131.-    Les lois et autres actes de l’Assemblée nationale sont rendus exécutoires par leur promulgation et leur publication au journal officiel de la République.

Ils sont numérotés et insérés dans le bulletin imprimé et numéroté ayant pour titre Bulletin des Lois et Actes.

Article 132.-    La loi prend date du jour de son adoption définitive par l’Assemblée nationale.

Chapitre III.-

Le Pouvoir exécutif

Section 1re.-    Dispositions générales

Article 133.-    Le Pouvoir exécutif est exercé par le Président de la République. Il est assisté de ministres et de secrétaires d’État.

Le Président de la République est à la fois le Chef de l’État. Il est également le chef de Gouvernement.

Section 2.-        L’élection et le mandat du Président de la République

Article 134.-    Le Président de la République est élu au suffrage universel direct, en même temps que le Vice-Président qu’il a choisi, à l’issue d’un scrutin majoritaire à un tour.

L’élection présidentielle a lieu au plus tard le dernier dimanche du deuxième mois qui précède l’échéance du mandat présidentiel en cours.

Article 135.-    La durée du mandat présidentiel est de cinq (5) ans. Cette période commence le premier lundi de février, le jour de la prestation de serment du Président de la République, et se termine le premier lundi de février de la dernière année de son quinquennat.

Le mandat présidentiel ne peut être ni réduit ni prorogé.

Article 136.-    Nul ne peut bénéficier de plus de deux (2) mandats présidentiels.

Article 137.-    Pour être élu Président de la République d’Haïti, il faut remplir les conditions suivantes :

  1. jouir de la nationalité haïtienne et ne détenir aucune autre nationalité au moment de l’inscription à la candidature ;
  • être âgé de trente-cinq (35) ans au moins au moment de l’inscription ;
  • jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive ou infamante ;

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  • d)      être en règle avec le fisc, honorer à temps ses obligations fiscales ;
  • être propriétaire d’au moins un immeuble ou exercer une profession ou un métier en Haïti ;
  • avoir sa résidence habituelle en Haïti.

Ces mêmes obligations s’appliquent au Vice-Président.

Article 138.-    Le Vice-Président n’a d’autres fonctions que celles que lui confient le Président de la République.

En cas de décès, de démission ou de destitution du Président de la République, le Vice-Président lui succède immédiatement et achève le mandat présidentiel en cours. Il jouit de la plénitude des attributions du Chef de l’État.

En cas d’empêchement temporaire, constaté par la Cour constitutionnelle à la majorité absolue de ses membres, le Vice-Président assure l’intérim.

En cas d’empêchement définitif, constaté par la Cour constitutionnelle à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres, le Vice-Président succède au Président.

En cas de troubles psychiatriques graves dûment constatés, l’Assemblée nationale sur le rapport motivé de la Cour Constitutionnelle prend acte de l’incapacité du Président de la République à diriger le pays. Dans ce cas, le Vice-Président remplace le Président jusqu’à la fin du mandat présidentiel.

Si le Président et le Vice-Président de la République sont simultanément hors d’état d’assumer leurs fonctions respectives, les pouvoirs présidentiels sont confiés au Président de la Cour de cassation et, s’il en est incapable, au Président de la Cour constitutionnelle. Dans ce cas, le nouveau Président de la République achève le mandat présidentiel en cours. Il jouit de la plénitude des attributions du Chef de l’État.

Article 139.-    Le Président de la République jouit de l’immunité durant son mandat, sous réserve de la procédure de destitution devant la Haute Cour de justice et des limites fixées dans la présente Constitution.

Aucune action ne peut être engagée contre le Chef de l’État pour des actes liés à ses fonctions et accomplis en qualité de Président de la République, même après la fin son mandat.

Les actes du Chef de l’État manifestement incompatibles avec l’exercice de son mandat et qui ne relèvent pas de l’exercice des fonctions présidentielles peuvent être poursuivis devant les juridictions de droit commun deux (2) mois après la fin de son mandat.

Article 140.-    Avant d’entrer en fonction, le Président de la République prête devant la Cour de cassation ou le Doyen du tribunal de première instance le serment suivant :

  • Je jure devant la Nation d’observer et de faire observer fidèlement la Constitution et les Lois de la République, de respecter et de faire respecter les

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droits du Peuple haïtien, de travailler à la grandeur de la Patrie, de maintenir l’indépendance nationale et l’intégrité du territoire ».

Section 3.-        Les attributions du Président de la République

Article 141.-    Le Président de la République veille au respect de la Constitution et à la stabilité des institutions. Il assure le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État. Il est le garant de l’indépendance nationale et de l’intégrité du territoire. Il détermine la politique de la Nation.

Article 142.-    Le Président de la République est le chef des Forces armées d’Haïti. Il est responsable de la défense nationale.

Article 143.-    Le Président de la République décrète l’état d’urgence en Conseil des ministres quand les conditions fixées par la loi sont réunies.

Le régime juridique de l’état d’urgence est fixé par la loi.

Article 144.-    Le Président de la République décrète l’état de siège en Conseil des ministres en cas de guerre civile ou d’invasion d’une portion du territoire nationale par une force armée étrangère.

Le régime juridique de l’état de siège est fixé par la loi.

Article 145.-    Le Président de la République a le pouvoir réglementaire général. Il signe les décrets et ordonnances pris en Conseil des ministres. Les autres textes règlementaires de sa compétence sont des arrêtés. Il dirige l’administration civile et militaire. Il veille à l’exécution des lois.

Il préside le Conseil des ministres. En cas d’empêchement, le Vice-Président le supplée.

Le Président de la République nomme aux fonctions civiles et militaires par arrêté ou par commission présidentielle.

Les Directeurs généraux sont nommés par arrêté pris en Conseil des ministres.

Article 146.-    Les ordonnances sont prises sur le fondement d’une loi d’habilitation adoptée par l’Assemblée nationale ou par référendum.

La loi d’habilitation autorise le Président de la République à prendre des décisions dans le domaine de la loi dans un délai maximum de six mois.

Les ordonnances ont valeur réglementaire tant qu’elles n’ont pas été ratifiées par une nouvelle loi, auquel cas elles acquièrent la valeur législative.

Article 147.-    Le Président de la République nomme par arrêté pris en Conseil des ministres : le Chef d’état-major des Forces armées d’Haïti, le Directeur général de la Police nationale d’Haïti, le Directeur général du Renseignement, les Ambassadeurs et Consuls généraux, le Conseil d’administration de la Banque de la République d’Haïti. Ces choix sont soumis à l’examen de l’Assemblée nationale. Les nominations sont définitives si, dans un délai de quinze (15) jours à partir de la réception de la proposition du Président de la République, elles n’ont pas été examinées ou refusées à la majorité des deux tiers (2/3) des suffrages exprimés par les députés.

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Article 148.-    Le Président de la République, sur la proposition de l’Assemblée nationale statuant à la majorité de ses membres, peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics ou sur des réformes économiques, sociales ou environnementales.

En cas d’adoption, le Président de la République promulgue la loi dans les quinze

  • jours francs qui suivent la proclamation des résultats de la consultation. Une loi organique fixe l’organisation et les modalités du référendum.

Article 149.-    Le Président de la République négocie et signe les traités, conventions et accords internationaux.

Les traités de paix, les traités de commerce, les traités, conventions ou accords relatifs à une organisation internationale, ceux qui ont une incidence financière, qui touchent à l’état des personnes ou aux libertés publiques, ne peuvent être signés qu’après une autorisation expresse donnée par l’Assemblée nationale sous forme de loi ou par référendum.

Article 150.-    Le Président de la République accrédite les Ambassadeurs et les Envoyés extraordinaires auprès des Puissances étrangères, reçoit les lettres de créance des Ambassadeurs des Puissances étrangères et accorde l’exéquatur aux Consuls.

Article 151.-    Le Président de la République s’adresse à l’Assemblée nationale par des messages. Ils sont lus à la tribune par le Président de l’Assemblée nationale.

Article 152.-    Chaque année, à l’ouverture de la première session parlementaire, le Président de la République délivre un discours sur l’état de la Nation. Ce discours n’est suivi d’aucun débat.

Article 153.-    Le Président de la République fait sceller les lois du sceau de la République et les promulgue dans le délai prévu à cet effet par la Constitution. Il peut, avant l’expiration de ce délai, user de son droit d’objection.

Article 154.-  Le Président de la République est le garant de l’indépendance de lajustice. Ilveille à l’exécution des décisions judiciaires, conformément à la loi.

Article 155.-    Le Président de la République a le droit de grâce et de commutation de peine relativement à toute condamnation passée en force de chose jugée, à l’exception de la destitution prononcée par la Haute Cour de justice.

Article 156.-    Le Président de la République reçoit du trésor public une indemnité mensuelle à compter de sa prestation de serment.

Article 157.-    Le Président de la République a sa résidence officielle au Palais national, à Port-au-Prince, sauf en cas de déplacement du siège de la Présidence.

Section 4.-        Les ministres et les secrétaires d’État

Article 158.-    Les ministres sont les collaborateurs du Président de la République. Ils forment un cabinet et, sous la présidence du Président de la République, ils se réunissent en Conseil des ministres avec le Vice-Président.

Article 159.-    Le Conseil des ministres est un organe de délibération et de décisions.

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Son organisation et son fonctionnement sont déterminées par arrêté pris en Conseil des ministres.

Article 160.-    Les ministres et les secrétaires d’État réunis en conseil sous la présidence du Président de la République forment le Gouvernement.

Le Gouvernement formule et conduit la politique de la Nation.

Article 161.-    Le Président de la République nomme et révoque les ministres et les secrétaires d’État.

Article 162.-    Pour être nommé ministre ou secrétaire d’État, il faut remplir les conditions suivantes :

  1. jouir de la nationalité haïtienne ;
  • être âgé de trente (30) ans au moins ;
  • jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive ou infamante ;
  • être propriétaire d’au moins un immeuble ou exercer une profession ou un métier en Haïti ;
  • être en règle avec le fisc, honorer à temps ses obligations fiscales ;
  • avoir sa résidence habituelle en Haïti.

Article 163.-    Les ministres dirigent l’administration de leur ministère et veillent à son organisation. Ils sont chargés de l’exécution des lois dans les matières qui relèvent de leur compétence. Ils nomment aux emplois publics sur délégation du Président de la République et selon les conditions fixées par la loi.

Article 164.-    Les ministres sont responsables des actes du Président de la République qu’ils contresignent.

Les ministres sont solidairement responsables de la politique du Gouvernement.

Article 165.-    Les ministres et secrétaires d’État ont leurs entrées à l’Assemblée nationale. Ils soutiennent les projets de loi au sein des commissions parlementaires et en séance plénière.

Article 166.-    La fonction de ministre ou de secrétaire d’État est incompatible avec tout emploi public ou privé.

Article 167.-    Les ministres et secrétaires d’État perçoivent une indemnité mensuelle à compter de leur prise de fonctions.

Aucune action ne peut être engagé contre un ministre ou un secrétaire d’État pour des actes liés à ses fonctions et accomplis en qualité de ministre ou de secrétaire d’État, même après la fin de sa fonction.

Les ministres et les secrétaires d’État sont poursuivis par devant les juridictions compétentes pour les crimes ou délits commis dans l’exercice de leur fonction, sous réserve des dispositions relatives à la Haute cour de justice.

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Chapitre IV.- Le Pouvoir judiciaire Section 1re.- Dispositions générales

Article 168.-    Le Pouvoir judiciaire est exercé par la Cour de cassation, les cours d’appel, les tribunaux de première instance, les tribunaux de paix, les tribunaux d’exception, la Cour des affaires administratives et les tribunaux administratifs.

Article 169.-    La justice est indépendante. Elle est rendue par les juridictions de l’ordre judiciaire et par les juridictions de l’ordre administratif au sommet desquelles se trouve la Cour de cassation.

Article 170.-    Les juridictions de l’ordre judiciaire sont les cours d’appel, les tribunaux de première instance, les tribunaux de paix et les tribunaux d’exception.

Article 171.-    Les juridictions de l’ordre administratif sont la Cour des affaires administratives et les tribunaux administratifs.

Article 172.-    Les magistrats de l’ordre judiciaire et de l’ordre administratif sont recrutés à l’issue d’un concours public.

Article 173.-    Nulle juridiction ne peut être établie qu’en vertu de la loi.

Il ne peut être créé de tribunal extraordinaire sous quelque dénomination que ce soit.

Le nombre, la composition, l’organisation, le fonctionnement et les compétences des juridictions judiciaires et des juridictions administratives sont fixés par la loi.

Article 174.-  Les audiences des juridictions judiciaires sont publiques. Toutefois, elles peuventêtre tenues à huis clos dans l’intérêt de l’ordre public sur décision de la juridiction.

Article 175.-    Les arrêts et jugements sont motivés. Ils sont rendus au nom de la République.

Article 176.-    Les fonctions de magistrat sont incompatibles avec toutes autres fonctions salariées, sauf celles d’enseignant.

Article 177.-    Les magistrats de la Cour de cassation, des cours d’appel et des tribunaux de première instance sont inamovibles.

Ils ne peuvent faire l’objet d’affectation nouvelle, sans leur consentement, même en cas de promotion.

Ils sont destitués par le Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire pour manquement grave aux devoirs de leur charge ou à la suite d’une condamnation pénale définitive pour crime ou délit.

Article 178.-    Les jugements et arrêts des juridictions judiciaires, administratives ou financières peuvent être déférés à la Cour de cassation dans les conditions prévues par la Constitution et la loi.

Lorsqu’elle est saisie des arrêts rendus par la Cour des affaires administratives ou par la Cour des comptes, elle statue dans une formation spécialisée dans les questions de droit public ou de droit financier.

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La Cour de cassation est juge du droit et ne statue pas au fond, sauf dans les cas expressément prévus par la loi.

La Cour de cassation, en formation solennelle, se prononce sur les conflits de compétence entre les juridictions judiciaires, administratives et financières, d’après le mode réglé par la loi.

Section 2.-        Les juridictions de l’ordre judiciaire

Article 179.-    Les juridictions de l’ordre judiciaire tranchent les litiges de nature civile, pénale, commerciale et, de façon générale, tous les litiges qui opposent des personnes privées. Elles exercent une plénitude de compétence, sous réserve de celles accordées aux juridictions de l’ordre administratif, à la Cour constitutionnelle et à la Cour des comptes.

Article 180.-    Les magistrats du siège sont nommés par le Président de la République sur proposition du Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire.

Les magistrats du parquet sont nommés par le Président de la République sur proposition du Ministre de la Justice.

Section 3.-        Les juridictions de l’ordre administratif

Article 181.-    Les juridictions de l’ordre administratif tranchent les litiges mettant en cause l’État, les collectivités territoriales, l’Administration publique, les fonctionnaires publics, les services publics et les administrés, sauf si la loi en dispose autrement.

Article 182.-    Les magistrats des juridictions administratives sont nommés par le Président de la République sur avis conforme du Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire.

Article 183.-    Le statut des magistrats des juridictions administratives est identique à celui des magistrats des juridictions judiciaires.

Article 184.-    La Cour des affaires administratives statue en fait et en droit.

Ses décisions ne sont susceptibles d’aucun recours, sauf pourvoi par devant la Cour de cassation.

Section 4.-        Le Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire

Article 185.-    Le Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire participe à la composition et à la discipline de la magistrature judiciaire et administrative. Il peut être consulté sur l’état de la justice.

Article 186.-    Le Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire peut être saisi pour avis par le Président de la République et le Président de l’Assemblée nationale. Ces avis portent sur le fonctionnement général de la justice et la déontologie des magistrats.

Article 187.-    Le Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire peut être saisi par le Protecteur du citoyen pour tout manquement aux devoirs et à la déontologie des membres de la magistrature.

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L’organisation, le fonctionnement et les compétences du Conseil supérieur du Pouvoir judiciaire sont fixées par une loi organique.

TITRE IV.-

COUR CONSTITUTIONNELLE

Article 188.-    Il est institué une Cour constitutionnelle chargée d’assurer le respect de la Constitution. Elle vérifie la constitutionnalité des lois, des règlements du Pouvoir exécutif, du règlement de l’Assemblée nationale, des traités, conventions et accords internationaux.

Ses décisions sont définitives et ne sont susceptibles d’aucun recours.

Article 189.-    La Cour constitutionnelle est composée de neuf (9) membres :

  1. trois (3) sont désignés par le Président de l’Assemblée nationale ;
  • trois (3) sont désignés par le Président de la République ;
  • trois (3) sont désignés par le Président de la Cour de cassation.

La Cour constitutionnelle comprend :

  1. trois magistrats ayant une expérience de quinze (15) ans au moins, dont un
  • est désigné par le Président de l’Assemblée nationale, un (1) par le Président de la République, un (1) par le Président de la Cour de cassation ;
  • trois avocats ayant une expérience de quinze (15) ans au moins, dont un
  • est désigné par le Président de l’Assemblée nationale, un (1) par le Président de la République, un (1) par le Président de la Cour de cassation ;
  • trois personnalités de grande réputation professionnelle ayant une expérience de quinze (15) ans au moins, dont un (1) est désigné par le

Président  de  l’Assemblée  nationale,  un  (1)  par  le  Président  de  la

République, un (1) par le Président de la Cour de cassation.

Les membres de la Cour constitutionnelle sont nommés par arrêté du Président de la République.

Article 190.-    Pour être membre de la Cour constitutionnelle, il faut remplir les conditions suivantes :

  1. jouir de la nationalité haïtienne ;
  • être âgé de quarante (40) ans au moins ;
  • jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive ou infamante ;
  • être détenteur au moins d’un diplôme de deuxième cycle de l’enseignement supérieur ;

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  • attester d’une expérience minimale de quinze (15) ans dans le domaine juridique, politique ou universitaire ;
  • être en règle avec le fisc, honorer à temps ses obligations fiscales ;
  • être propriétaire d’au moins un immeuble ou exercer une profession ou un métier en Haïti ;
  • avoir sa résidence habituelle en Haïti.

Article 191.-    Les juges de la Cour constitutionnelle sont nommés pour neuf (9) ans. Leur mandat n’est pas renouvelable.

La Cour constitutionnelle est renouvelée par tiers tous les trois (3) ans, sauf vacance. Dans ce cas, un nouveau membre est désigné par l’autorité compétente : il achève le mandat de son prédécesseur et peut être nommé pour une nouvelle période de neuf (9) ans s’il a succédé dans le dernier tiers du mandat de son prédécesseur.

Article 192.-    Le Président de la Cour constitutionnelle est élu par ses pairs pour un mandat de trois (3) ans renouvelables.

Article 193.-    Les juges de la Cour constitutionnelle sont inamovibles pendant la durée de leur mandat. Toutefois, ils peuvent être démis de leurs fonctions à la majorité absolue des membres de la Cour dans les cas prévus par sa loi organique.

Ils ne peuvent faire l’objet d’affectation nouvelle, sans leur consentement, même en cas de promotion.

Article 194.-    Les lois organiques et le règlement de l’Assemblée nationale font l’objet d’un contrôle obligatoire et antérieur à leur promulgation ou entrée en vigueur.

Les lois ordinaires, avant leur promulgation, les décrets et ordonnances, avant leur publication, peuvent être déférés à la Cour constitutionnelle par le Président de la République, le Président de l’Assemblée nationale ou par un groupe de vingt (20) députés, pour avis.

La saisine de la Cour constitutionnelle suspend la promulgation ou l’entrée en vigueur du texte déféré.

La Cour constitutionnelle statue dans un délai de deux (2) mois. Toutefois, s’il y a urgence, à la demande du Président de la République, du Président de l’Assemblée nationale ou de vingt (20) députés, elle se prononce dans un délai de quinze (15) jours ouvrables.

Article 195.-    Lorsqu’à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative ou règlementaire ou que la stipulation d’un traité, convention ou accord international est contraire à la Constitution, la Cour constitutionnelle peut en être saisie directement par la partie qui a soulevé l’exception.

Les exceptions en inconstitutionnalité à l’occasion d’un litige sont traitées en urgence sans remise ni tour de rôle.

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Article 196.-    La Cour constitutionnelle est seule compétente pour prononcer une mesure de radiation à l’encontre d’un député.

La Cour constitutionnelle est compétente pour examiner et trancher toutes les contestations électorales, depuis l’inscription sur les listes électorales jusqu’aux résultats. Elle est compétente pour donner pleine application à la loi électorale et pour sanctionner toute violation de cette loi.

Les décisions de la Cour constitutionnelle en matière électorale ne sont susceptibles d’aucun recours.

Article 197.-    Une loi organique détermine l’organisation et le fonctionnement de la Cour constitutionnelle. Elle fixe la procédure suivie devant elle.

TITRE V.-

COUR DES COMPTES

Article 198.-     Il est créé un organisme public indépendant dénommé : Cour des comptes chargé du contrôle juridictionnel de la gestion des comptables publics de l’État, des collectivités territoriales et des entreprises publiques.

La Cour des comptes veille à la régularité et à la sincérité des comptes des administrations publiques.

Si des faits de corruption ou de concussion lui apparaissent dans le cadre de ses missions, elle saisit le procureur de la République près le tribunal de première instance du ressort qui diligente des poursuites judiciaires à l’encontre des ordonnateurs et des comptables publics soupçonnés de malversation financière.

Article 199.-    La prescription en matière d’infractions financières varie en fonction de la peine encourue : elle est de cinq (5) ans si la peine encourue est inférieure à trois (3) ans d’emprisonnement ; elle est de dix (10) ans si les peines encourues se situent entre trois (3) et dix (10) ans ; elle est de vingt (20) ans, si la peine encourue est de plus de dix (10) ans.

La loi pénale fixe les modalités d’application du présent article.

Article 200.-    Pour être nommé membre de la Cour des comptes, il faut remplir les conditions suivantes :

  1. jouir de la nationalité haïtienne ;
  • jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive ou infamante ;
  • être détenteur au moins d’un diplôme de deuxième cycle de l’enseignement supérieur, en économie, en finance, en administration ou en Droit ;
  • attester d’une expérience minimale de quinze (15) ans en tant que juriste, comptable, administrateur, économiste ou spécialiste du secteur financier ;
  • être en règle avec le fisc, honorer à temps ses obligations fiscales ;

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  • être propriétaire d’au moins un immeuble ou exercer une profession ou un métier en Haïti ;
  • avoir sa résidence habituelle en Haïti.

La moitié au moins des membres de la Cour des comptes sont issus de l’Administration publique.

Article 201.-    Les décisions de la Cour des comptes sont susceptibles de pourvoi par devant la Cour de cassation.

Article 202.-    La Cour des comptes est composée de neuf (9) :

  1. cinq (5) sont désignés par le Président de l’Assemblée nationale ;
  • quatre (4) sont désignés par le Président de la République.

Article 203.-    Les membres de la Cour des comptes sont nommés par arrêté du Président de la République pris en Conseil des ministres.

Article 204.-    La Cour des comptes assiste l’Exécutif dans l’élaboration et l’exécution des lois budgétaires et apporte son concours à l’Assemblée nationale dans le contrôle de l’exécution de ces lois.

Elle peut être consultée sur toutes les questions relatives aux finances publiques.

Elle a le droit de réaliser des audits dans toutes les administrations publiques.

Elle rédige des rapports sur l’état des finances publiques et sur l’efficacité des politiques publiques. Ces rapports sont adressés à l’Assemblée nationale dans le mois qui suit l’ouverture de la session parlementaire ordinaire.

Article 205.-    Une loi organique fixe l’organisation et le fonctionnement de la Cour des comptes.

TITRE VI.-

CONSEIL ÉLECTORAL PERMANENT

Article 206.-     Il est créé un organisme public indépendant dénommé : Conseil électoral permanent chargé d’organiser et de contrôler toutes les opérations électorales sur le territoire de la République jusqu’à la proclamation des résultats du scrutin.

Article 207.-    Le Conseil électoral permanent s’assure de la régularité et de la mise à jour des listes électorales.

Le Conseil électoral permanent se prononce par un avis public et motivé sur les projets et propositions de loi électorale avant leur dépôt par devant l’Assemblée nationale.

Article 208.-    Le Conseil électoral permanent est composé d’un représentant de chaque département géographique et d’un représentant des Haïtiens vivant à l’étranger. Ces représentants sont nommés par arrêté du Président de la République pris en Conseil des ministres sur la base d’une liste de trois (3) noms proposée par la société civile organisée de chaque département géographique et de la diaspora.

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Article 209.-    Le Président du Conseil électoral permanent est élu par ses pairs pour un mandat de trois (3) ans renouvelables.

Article 210.-    Pour être membre du Conseil électoral permanent, il faut remplir les conditions suivantes :

  1. jouir de la nationalité haïtienne ;
  • être âgé de quarante (40) ans au moins ;
  • jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive ou infamante ;
  • être détenteur au moins d’un diplôme de l’enseignement supérieur ;
  • attester d’une expérience minimale de quinze (15) ans dans le domaine juridique, politique, électoral ou universitaire ;
  • être en règle avec le fisc, honorer à temps et régulièrement ses obligations fiscales ;
  • avoir sa résidence habituelle en Haïti.

Article 211.-    Les membres du Conseil électoral permanent sont nommés pour six (6) ans. Leur mandat n’est pas renouvelable.

Article 212.-    Les membres du Conseil électoral permanent sont inamovibles pendant la durée de leur mandat. Toutefois, ils peuvent être démis de leurs fonctions à la majorité absolue des membres du Conseil dans les cas prévus par sa loi organique.

Article 213.-    Les membres du Conseil électoral permanent ne peuvent faire l’objet d’affectation nouvelle, sans leur consentement.

Ils sont destitués pour manquement grave aux devoirs de leur charge par la majorité des membres du Conseil. Ils sont considérés comme démissionnaires d’office à la suite d’une condamnation pénale définitive pour crime ou délit.

Article 214.-    Avant d’entrer en fonction, les membres du Conseil électoral permanent prêtent le serment suivant par devant la Cour de cassation ou le Doyen du tribunal de première instance :

  • Je jure de respecter la Constitution et les dispositions de la loi électorale et de m’acquitter de ma tâche avec dignité, indépendance, impartialité et patriotisme ».

Article 215.-    Une loi organique détermine les règles d’organisation et de fonctionnement du Conseil électoral permanent.

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TITRE VII.-

SÉCURITÉ ET DÉFENSE

Chapitre Ier.-

La Force publique

Article 216.-    La Force publique se compose de deux (2) corps distincts :

  1. les Forces armées d’Haïti ;
  • la Police nationale d’Haïti.

Aucun autre corps armé ne peut exister sur le territoire national.

Article 217.-    Tout membre de la Force publique prête lors de son engagement, le serment d’allégeance et de respect à la Constitution et au drapeau.

Article 218.-    Les Forces armées d’Haïti comprennent les forces de terre, de mer, de l’air et les services techniques.

Article 219.-    Les Forces armées d’Haïti sont instituées pour :

  1. garantir la sécurité et l’intégrité du territoire de la République ;
  • défendre le pays en cas de guerre ;
  • protéger le pays contre les menaces venant de l’extérieur ;
  • assurer la surveillance des frontières terrestres, maritimes et aériennes ;
  • prêter main forte sur requête motivée de l’Exécutif, à la Police au cas où cette dernière ne peut répondre à sa tâche ; et
  • aider la Nation en cas de désastre naturel.

Outre les attributions qui lui sont propres, les Forces armées d’Haïti peuvent être affectées à des tâches de développement.

Article 220.-    Le Président de la République choisit le Chef d’état-major des Forces armées d’Haïti parmi les officiers généraux en activité de service.

Le président de la République nomme le Chef d’état-major des Forces armées d’Haïti au grade de lieutenant-général qui lui soumet la composition de l’état-major général.

Article 221.-    Les lois et les règlements généraux des Forces Armées d’Haïti déterminent l’organisation et le fonctionnement de l’institution militaire.

Article 222.-    Les Forces armées d’Haïti ont le monopole de la fabrication, de l’importation, de l’exportation, de l’utilisation et de la détention des armes de guerre et de leurs munitions, ainsi que du matériel de guerre.

Toutes armes de guerre, et leurs munitions, ainsi que le matériel de guerre, saisis sur le territoire national par la Force publique, après formalité administrative et judiciaire, rentrent dans le patrimoine des Forces Armées d’Haïti.

Article 223.-    La Police est un corps civil et armé.

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Elle est créée pour garantir l’ordre public et protéger les vies et les biens.

Son organisation et son mode de fonctionnement sont réglés par la loi.

Article 224.-    La Police, en tant qu’auxiliaire de la justice, recherche les contraventions, les délits et les crimes commis en vue de la découverte et de l’arrestation de leurs auteurs, coauteurs et complices.

Article 225.-    Les membres de la Force publique, dans l’exercice de leurs fonctions, sont soumis

  • la responsabilité civile et pénale dans les formes et conditions prévues par la Constitution et par la loi.

Article 226.-    Les membres de la Force publique sont protégés par l’État dans le cadre des attributions liées à leurs fonctions.

Article 227.-    Tout citoyen a droit à l’auto-défense armée, dans les limites de son domicile.

La détention d’une arme à feu doit être déclarée à la Police.

Tout port d’armes à feu doit faire l’objet d’une autorisation expresse et motivée du Chef de la Police.

Chapitre II.-

Les services d’intelligence

Article 228.-    Il est créé un Conseil national de Sécurité et de Défense.

Le Conseil national de Sécurité et de Défense est composé :

  1. du Président de la République ;
  • du Ministre de la Défense ;
  • du Ministre de l’Intérieur ;
  • du Ministre de la Justice ;
  • du Chef d’état-major des Forces Armées d’Haïti ;
  • du Directeur général de la Police nationale d’Haïti ;
  • du Directeur général du Renseignement.

Article 229.-    Le Conseil national de Sécurité et de Défense coordonne la politique de l’État en matière de sécurité, de défense et de renseignement.

Article 230.-    La loi détermine l’organisation et le fonctionnement du Conseil national de Sécurité et de Défense.

Article 231.-    Un organisme central de renseignement est créé. Il est chargé de collecter, d’analyser, de traiter et de gérer les informations intéressant la sécurité nationale et la protection des intérêts fondamentaux de la Nation. La loi en détermine la dénomination, l’organisation et le fonctionnement.

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TITRE VIII.-

HAUTE COUR DE JUSTICE

Article 232.-    La moitié des membres de l’Assemblée nationale a le pouvoir de demander la mise en accusation du Président de la République, du Vice-Président de la République, des ministres et des secrétaires d’État pour crime de haute trahison.

Le crime de haute trahison consiste à porter les armes dans une armée étrangère contre la République, à servir une nation étrangère en conflit avec la République, ou en toute autre violation de la Constitution par ceux chargés de la faire respecter.

Le crime de haute trahison est puni de la peine des travaux forcés à perpétuité sans commutation de peine.

Article 233.-    L’Assemblée nationale statue sur la demande de mise en accusation à la majorité des deux tiers de ses membres.

Si la proposition est adoptée, l’acte d’accusation est transmis à la Haute Cour de Justice, composée des neuf (9) membres de la Cour constitutionnelle et de six (6) membres de la Cour de cassation, dont le Président de celle-ci.

Article 234.-    Trois (3) députés désignés par l’Assemblée nationale assument la fonction d’accusateur. Ils ne participent pas à la formation de jugement.

Article 235.-    La Haute Cour de Justice statue dans un délai de quinze (15) jours après la réception de la mise en accusation.

La Haute Cour de Justice prononce la destitution du Président ou du Vice-Président de la République, des ministres et des secrétaires d’État à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres. Elle peut en outre, à la même majorité, prononcer l’interdiction de toute fonction publique pour une durée maximale de dix (10) ans.

Article 236.-    La Haute Cour de justice est présidée par le président de la Cour constitutionnelle dont la voix est prépondérante.

Article 237.-    La mise en accusation ne peut avoir lieu dans la première année du mandat du Président et du Vice-président de la République.

Une mise en accusation ne peut être adoptée plus de deux fois durant le mandat du Président et du Vice-président de la République.

Article 238.-    La Haute Cour de justice ne siège qu’à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres.

Article 239.-    La Haute Cour de justice, une fois saisie, siège jusqu’au prononcé de la décision, sauf tenir compte de la durée des sessions du parlement.

Article 240.-    Une loi organique fixe la procédure suivie à l’Assemblée nationale et à la Haute Cour de justice.

Article 241.-    En cas de destitution, le condamné est traduit par devant les tribunaux ordinaires, conformément à la loi, pour l’application d’autres peines ou l’exercice de l’action civile, le cas échéant.

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TITRE IX.-

COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DÉCENTRALISATION

Chapitre Ier.-

Dispositions générales

Article 242.-    Les collectivités territoriales sont le département, la commune et la section communale. Elles s’administrent librement par des élus dans les conditions prévues par la Constitution et par la loi. Elles jouissent de la personnalité juridique.

La loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, leurs compétences et leurs ressources.

La loi veille à ce que les recettes fiscales soient réparties harmonieusement entre l’État et les collectivités territoriales.

Article 243.-    La loi peut créer de nouvelles catégories de collectivités territoriales.

Article 244.-    Le département, l’arrondissement et la commune sont des circonscriptions administratives qui servent à relayer l’action de l’État.

D’autres catégories de circonscriptions administratives peuvent être créées par la loi.

Article 245.-    Les plans ou schémas d’action interdépartementale sont de la compétence du pouvoir réglementaire.

Article 246.-    Dans chaque département, le Président de la République nomme, par arrêté pris en Conseil des ministres, un représentant de l’État qui prend le titre de Délégué de la République.

Un Vice-Délégué de la République est nommé dans chaque arrondissement selon la même procédure.

Les Délégués de la République et les Vice-Délégués de la République assurent la direction des services déconcentrés de l’État établis dans les départements et les arrondissements.

Le statut et les attributions des Délégués de la République et des Vice-Délégués de la République sont déterminés par la loi.

Article 247.-    La délimitation spatiale des circonscriptions administratives est de la compétence du pouvoir réglementaire.

Article 248.-    Toute compétence transférée aux collectivités territoriales est accompagnée des voies et moyens correspondants.

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Chapitre II.-

Le département

Article 249.-    Le département est la plus grande division territoriale. Il regroupe les arrondissements.

Le département est une personne morale. Il est autonome.

Les organes du département sont :

  1. le Conseil départemental ;
  • l’Assemblée des Maires.

Article 250.-    Le Conseil départemental est composé de trois (3) membres :

  1. un Président ;
  • deux (2) Vice-Présidents.

Article 251.-    Le Conseil départemental est élu pour cinq (5) ans par l’Assemblée des Maires.

Les membres du Conseil départemental ne peuvent être choisis au sein de l’Assemblée des Maires du département.

Article 252.-    Pour être élu membre du Conseil départemental, il faut remplir les conditions suivantes :

  1. jouir de la nationalité haïtienne ;
  • être âgé de trente-cinq (35) ans au moins ;
  • jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive ou infamante ;
  • être en règle avec le fisc, honorer à temps ses obligations fiscales ;
  • être propriétaire d’au moins un immeuble ou exercer une profession ou un métier dans le département ;
  • résider dans le département depuis cinq (5) ans avant la date de l’élection.

Article 253.-    Le Conseil départemental élabore le plan de développement du département en collaboration avec l’Administration centrale. Il est compétent dans les domaines suivants :

  1. l’éducation et l’alphabétisation ;
  • l’enseignement technique et professionnel ;
  • la santé et l’hygiène publiques ;
  • le développement économique et social du département ;
  • les infrastructures de support à l’activité économique d’intérêt départemental ;
  • la protection de l’environnement ;
  • les routes départementales et communales ;

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  • le développement territorial, l’aménagement territorial, l’urbanisme et l’habitat ;
  1. les marchés nationaux situés dans le département ;
  • les sites historiques et lieux de mémoire, le tourisme, le sport, le loisir et la culture ;
  • les infrastructures socio-éducatives et socio-récréatives et les centres de protection materno-infantiles ;
  • le transport urbain et les modes de transport du département ;
  • la gestion du domaine foncier ;
  • les ressources naturelles et la coopération intercommunale ;
  • l’accompagnement à l’insertion professionnelle, à la réorientation professionnelle et la réadaptation professionnelle ;
  • la protection civile, l’assistance et les secours ;
  • l’assistance sociale aux démunis, l’action sociale au bénéfice des personnes handicapées, la tranquillité publique et la prévention de la délinquance, le suivi et la réinsertion des personnes ayant subi une peine d’emprisonnement.

Article 254.-    L’Assemblée des maires est composée de l’ensemble des maires des communes du département. Elle se réunit au moins une fois par an pour débattre du programme d’action et du rapport d’activité du département. Elle vote le budget du département. Elle formule des avis et des recommandations qui sont transmis au Conseil départemental.

L’Assemblée des maires peut être convoquée à l’extraordinaire par le Président du Conseil départemental qui en est le président de droit.

Elle est consultée sur les principales orientations du département.

Les modalités de fonctionnement de l’Assemblée des maires sont déterminées par la loi.

Article 255.-    L’organisation, le fonctionnement et les autres compétences du département sont fixés par la loi.

Chapitre III.-

La commune

Article 256.-    La commune regroupe les sections communales.

La commune a l’autonomie administrative et financière.

Article 257.-    Chaque commune de la République est administrée par un Maire.

Article 258.-    Le Maire est élu au suffrage universel direct pour cinq (5) ans. Il est indéfiniment rééligible.

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Le Maire est à la fois un agent de la commune et un agent de l’État, chargé de faire appliquer la politique nationale à l’échelon municipal.

Le Maire est assisté dans sa tâche d’une Assemblée municipale composée des Coordonnateurs des sections communales de la commune. L’Assemblée municipale est un organe de délibération portant sur les affaires propres à la commune.

Article 259.- Pour être élu Maire, il faut remplir les conditions suivantes :

  1. jouir de la nationalité haïtienne ;
  • être âgé de vingt-cinq (25) ans au moins ;
  • jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive ou infamante ;
  • être en règle avec le fisc, honorer à temps ses obligations fiscales ;
  • être propriétaire d’au moins un immeuble ou exercer une profession ou un métier dans la commune ;
  • résider dans la commune depuis deux (2) ans avant la date de l’élection.

Article 260.-    L’organisation, le fonctionnement et les compétences de la commune sont fixés par la loi.

Chapitre IV.-

La section communale

Article 261.-    La section communale est la plus petite entité territoriale administrative de la République.

Article 262.-    L’administration de chaque section communale est assurée par un Coordonnateur de la section communale élu au suffrage universel pour une durée de cinq (5) ans. Il est indéfiniment rééligible.

Article 263.-    Le mode d’administration et de fonctionnement de la section communale est réglé par la loi.

Article 264.-    L’État a pour obligation d’établir au niveau de chaque section communale les structures propres à la formation sociale, économique, civique et culturelle de sa population.

Article 265.-    Pour être élu Coordonnateur de la section communale, il faut remplir les conditions suivantes :

  1. jouir de la nationalité haïtienne ;
  • être âgé de vingt-cinq (25) ans au moins ;
  • avoir résidé dans la section communale deux (2) ans avant les élections et continuer à y résider ;
  • jouir de ses droits civils et politiques et n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive et infamante ;

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  • résider dans la section communale depuis cinq (5) ans avant la date de l’élection.

Article 266.-    L’organisation, le fonctionnement et les compétences de la section communale sont fixés par la loi.

TITRE X.-

RÉVISION DE LA CONSTITUTION

Article 267.-    L’initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au Président de la République et à l’Assemblée nationale.

Article 268.-    Le projet ou la proposition de révision est soumis à l’Assemblée nationale en séance plénière.

Le projet ou la proposition de révision est adopté à la majorité des deux tiers (2/3) des membres de l’Assemblée nationale sous forme de loi constitutionnelle.

La loi constitutionnelle est promulguée dans les quinze (15) jours francs par le Président de la République, à partir de son adoption.

Article 269.-    Le Président de la République, s’il reçoit le soutien d’une majorité absolue des députés, peut soumettre le projet de loi de révision constitutionnelle au référendum. Si le projet est adopté, le texte de la révision est promulgué dans les quinze (15) jours francs par le Président de la République, à partir de son adoption.

Article 270.-    Aucun projet ou proposition de loi de révision constitutionnelle ne peut porter atteinte au caractère démocratique et républicain de l’État.

TITRE XI.-

DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES

Chapitre Ier.-

Dispositions transitoires

Article 271.-    Le Président de la République en fonction au moment du référendum est inéligible à la première élection présidentielle organisée selon les dispositions de la présente Constitution. Il reste en fonction jusqu’à la fin de son mandat, le 7 février 2022.

Article 272.-    Dans les quinze (15) jours francs qui suivent l’adoption de la présente Constitution par référendum, l’Exécutif adopte en Conseil des ministres un projet de décret électoral pour organiser les premières élections du Président de la République, des députés, des membres des conseils départementaux, des maires et des conseils d’Administration des sections communales.

Article 273.-    Lors de la première composition de la Cour Constitutionnelle, les trois (3) premiers membres nommés sur la liste du Président de l’Assemblée nationale, du

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Président de la République, du Président de la Cour de cassation le sont pour neuf (9) ans, les deuxièmes pour six (6) ans et les trois (3) autres pour trois (3) ans.

Article 274.-    Les dix (10) Sénateurs de la République encore en fonction bénéficient de tous les avantages et privilèges liés à leur statut jusqu’à la fin de leur mandat.

Article 275.-    Les fonctionnaires en poste au Sénat de la République sont redéployés dans l’Administration centrale et les collectivités territoriales, selon leur compétence.

Article 276.-    La fonction de Premier ministre est supprimée à partir de l’installation du nouveau Président de la République élu.

Les fonctionnaires en poste à la Primature sont redéployés dans l’Administration centrale et les collectivités territoriales, selon leur compétence.

Les entités administratives jusque-là rattachées à la Primature sont réaffectées à d’autres ministères par voie règlementaire.

Article 277.- Dans les quinze jours (15) francs quisuivent l’adoption de la présente Constitutionpar référendum, le Président de la République met en place un Comité pluridisciplinaire chargé de préparer les avant-projets de loi organique complétant la Constitution, l’avant-projet de loi sur les collectivités territoriales, ainsi qu’un plan de réorganisation des services de l’État et de mise en place du nouvel édifice institutionnel des collectivités territoriales pour tenir compte des dispositions de la présente Constitution.

Dans cet intervalle, l’organisme électoral prend les dispositions pour rédiger le projet de décret électoral devant régir l’organisation des élections pour les postes électifs prévus par la Constitution. Il le soumet au Pouvoir exécutif pour les suites nécessaires.

Chapitre II.-

Dispositions finales

Article 278.- Le chômage de l’Administration publique et privée et du commerce est observé àl’occasion des fêtes nationales et des fêtes légales.

Les fêtes nationales sont :

  1. la Fête de l’Indépendance nationale, le premier janvier ;
  • le Jour des Aïeux, le 2 janvier ;
  • la Fête de l’Agriculture et du Travail, le premier mai ;
  • la Fête du Drapeau et de l’Université, le 18 mai ;
  • la Commémoration de la Bataille de Vertières, Jour des Forces armées d’Haïti, le 18 novembre.

Article 279.-    Les fêtes légales sont déterminées par la loi.

Article 280.-    Trente (30) jours après son élection, le Président de la République doit déposer au greffe du tribunal de première instance de son domicile l’inventaire notarié de tous ses biens, meubles et immeubles, il en sera de même à la fin de son mandat.

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Le Vice-Président de la République, les ministres et les secrétaires d’État sont astreints à la même obligation dans les trente (30) jours de leur installation et de leur sortie de fonction.

Article 281.-    Tous les Codes de Lois ou Manuels de justice, tous les Décrets-Lois et tous les Décrets et Arrêtés actuellement en vigueur sont maintenus en tout ce qui n’est pas contraire à la présente Constitution.

Article 282.-    La présente Constitution est promulguée dans les quinze (15) jours francs qui suivent son adoption par référendum. Elle entre en vigueur dès sa publication au Moniteur, journal officiel de la République.

1 Comment

  • Mario Beauliere 3 février 2021

    préserver les acquis démocratiques aspirations au développement durable du Peuple Haïtien ;

    {pouvez vous m`expliquer ce paragraphe?

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