Par Claude Henri M. Bastien
Le pragmatisme joue un très grand rôle en démocratie. Quand les normes établies ne peuvent résoudre les crises, les acteurs tirent des suggestions dans l’environnement symbolique et naturel de la société. Ce fut récemment la démarche de la CARICOM et les acteurs politiques locaux pour faciliter l’installation d’un Conseil Présidentiel de Transition de 9 membres (CPT-9). Rien n’est infaillible dans la quête d’une solution pacifique. Ainsi, l’Université d’État d’Haïti (UEH) et son Conseil de l’Université (CU) peut en tirer des leçons pour se passer de ses résolutions caduques en vue des mesures salutaires en faveur de l’Institut d’Études et de Recherches Africaines d’Haïti (IERAH). L’une des résolutions caduques serait la reprise du second tour des élections du 10 aout 2023 à l’IERAH basée sur des prétendues irrégularités.
En revanche, des mesures salutaires dont nous parlons se réfèrent à deux choses : la considération des résultats des élections du 10 aout 2023 jugées crédibles par la majorité des observateurs et à l’installation du Conseil décanal élu. C’est plus logique puisqu’il n’est pas normal qu’une grande institution comme l’UEH patauge dans des crises électorales gratuites et orchestrées par le président de sa Commission Électoral Centrale (CEC-UEH), lequel entend se porter candidat au poste de reteur. Et il le trouve opportun de faire invalider les résultats à l’IERAH suivant de fausses contestations pour garder en poste un ami ou un beau-frère.
Dans une lettre du doyen élu au Rectorat nous avons souligné 4 points justificatifs expliquant le manque de poids des contestations des perdants. Ladite lettre révèle comme dans tous les processus électoraux, il peut y avoir des irrégularités durant les élections à l’IERAH, mais ces prétendues irrégularités n’ont aucun effet sur la journée électorale, le comptage des bulletins et les résultats définitifs à l’IERAH. Sinon, le professeur Dérinx Petit-Jean, président de la Commission Électoral (CE) de l’entité, n’allait pas publier les résultats définitifs de ces élections le18 aout 2023. Il a même invité les perdants à vérifier tous les matériels de vote.
Le doyen élu (Dr Rhodner J. Orisma) a gagné les élections avec 278 voix contre 177 du côté du perdant (Dr Sterlin Ulysse) tandis que le vice-doyen à la Recherche (Prof. Marc H. Renaudin) a collecté 259 voix contre 168 face à son adversaire (Dr Kesler Bien-Aimé). Élu dès le premier tour du 19 juillet 2023, le vice-doyen aux Affaires Académiques (James Pierre) n’est pas mentionné dans ces statistiques. C’est très clair. Voilà pourquoi, en attendant la publication d’une version contradictoire crédible, nous considérons les 4 points justificatifs suivants extraits de la lettre du doyen élu au CU en date du 25 mars 2024. Les justifications portent sur :
1. Inéligibilité du président de la Commission Électorale (CE) de l’entité
Pourtant le président était éligible. Mais que le président soit éligible ou non, celà n’a rien à voir avec le jour du scrutin et les vainqueurs de ces élections. Les électeurs ont voté librement pour leurs candidats favoris et il n’y a pas eu de bourrage des urnes. Le problème de l’inéligibilité est plutôt marqué par la négligence du Secrétariat général et du Décanat qui ont approuvé les membres de la Commission [Electorale] étant constituée il y a plus d’un an et demi avant les élections.
Par ailleurs, de nouveaux professeurs qui ont le même statut que le président ont eu droit de vote. Ils ont voté durant les deux tours, [et le doyen sortant avait gagné le premier tour].
Cependant, (…) une fois qu’il a échoué au second tour a déclaré inéligible le président de la Commission. Quelle manœuvre électorale ? C’est vraiment incroyable !
Plus tard, voyons le même président qui a organisé les deux tours des élections qui ont eu lieu le 19 juillet et 10 août 2023! Alors, le premier tour est validé et le second tour est dit invalidé. Pourquoi cette politique de deux poids et deux mesures ? Celà pourrait s’expliquer par le fait que le doyen et l’un de ses alliés ont remporté le premier tour. Par conséquent, l’idée de mettre à plat tout le processus risquerait d’affecter l’allié du doyen qui est élu dès le premier tour comme Vice-doyen aux Affaires Académiques.
2. Non-participation de la maîtrise Histoire, Mémoires et Patrimoine (HMP) aux élections
La maîtrise n’a pas participé parce qu’elle était considérée comme une entité séparée compte tenu de son insertion tardive à l’Institut. En conséquence, elle n’a pas participé aux deux élections précédentes organisées entre 2013 et 2018. A cet effet, durant la rencontre de la CE en juin 2023 avec les candidats, aucun desdits candidats présents à ladite rencontre n’est arrivé à convaincre la CE pour l’inclusion des étudiants-es de la maîtrise.
Basée sur une question de principe, la CE était claire en ces termes : « Les élections sont revendiquées d’une manière spontanée, il reviendra au Décanat élu et tous les membres de l’IERAH de statuer sur la participation de la maîtrise à travers une résolution. Cette résolution devrait entrer en application au cours des prochaines élections. »
3. Non-autorisation des mandats chez les employés de l’administration pendant le second tour
Près d’un mois avant le second tour des élections du 10 août 2023, le représentant du Rectorat à la CE de l’IERAH a eu à promouvoir l’idée de ne plus permettre aux employés d’utiliser des mandats. Devant être présents tous les jours à l’Institut, les employés n’ont pas droit aux mandats. Cette mesure est prise suite aux rumeurs de faux mandats en circulation du côté des employés durant le premier tour.
4. Des mandats irréguliers
Il n’y a pas eu de faux mandats contrairement à ce que font croire les perdants durant le second tour. Deux mandants qui ont été normalement contactés ont autorisé leur mandat. Pour des raisons personnelles, un mandant n’a pas envoyé de pièce tandis que l’autre a envoyé la pièce tardivement. En conséquence, ces mandats ont été annulés par les bénéficiaires et la CE avant les élections. Il n’est plus question de parler puisqu’ils ont été mandats annulés.
Donc, rappelons que les deux mandats mentionnés dans cette situation ont été déjà annulés avant les élections et n’ont pas été en conséquence votés. Ils n’ont pas été comptabilisés. Suivant toutes ces explications, il n’y a eu rien de mal qui s’était passé aux élections. Comme dans toute élection, il peut avoir des malentendus, des irrégularités négligeables ou incidences. Alors rien de grave n’est à signaler jusqu’à invalider les résultats définitifs du 10 août 2023 relevant de ces élections.
Suite à cette situation, l’IERAH est au point mort. La désolation et le découragement ont couvert les visages. Les professeurs-es et étudiants-es se sentent inconfortables avec la présence d’un décanat de facto. Cependant, la crise sécuritaire du pays vient à masquer depuis février dernier la faillite morale et physique du décanat et la crise électorale de l’Institut. Plusieurs provocations ont été enregistrées sur le campus. Malgré sa discrétion, la communauté de l’Institut ne prend plaisir à aucune dérive. Contacté à ce sujet, le doyen élu était très bref : “Je
ne veux plus parler de ces élections. Je laisse tout à Dieu qui voit qu’ils sont en train de marcher sur la volonté et le « sang » des électeurs. Nous gardons le silence et l’Eternel combattra pour nous.”
Au bout de son rouleau, le régime du recteur sortant Fritz Deshommes se trouve les mains liées dans une situation très complexe. Donc, M. Deshommes est en train d’hésiter sur l’installation d’un conseil provisoire au profit du conseil élu. Le nouveau doyen élu est bien considéré par toutes et tous de l’Institut pour son dynamisme et son sens de compromis. Il peut aider l’UEH, dans la gestion des crises et de conflits dès son installation. Étant des collègues, lui et le doyen sortant, nous souhaitons qu’ils collaborent pour la bonne marche de l’Institut.
Claude Henri M. Bastien