L’allégorie polysymbolique de la coupe et du vin…

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Par Camille Loty Malebranche

La coupe fait partie de ces objets à symbolique plurielle où viennent s’imbriquer une floraison sémique et un univers herméneutique multiple et fécond voire un multivers qui embrasse le sacré et le séculier, le transcendant et le profane…

De par son hébergement du vin, cet emblème des ivresses vitales, du goût de vivre et de l’enthousiasme du vivant aimant la vie, la coupe incarne dans le métalangage polysymbolique auquel elle donne lieu, une matrice référentielle dynamique qui outrepasse le champ de la poésie où tout terme peut charrier des repères sémantiques dépassant son sens dénotatif… Et, dans sa liaison usuelle au vin, la coupe est-elle transposée d’un point de vue théologique, au champ mystique sacramentel, lieu paroxystique de l’alliance christique avec les croyants, en tant que la coupe de vin est évocatrice du sang salvifique de Jésus. L’alliance spirituelle que Dieu scelle en le sang versé du Christ est la coupe vivifiante des élus, coupe porteuse de cette onde supramatérielle qui communique le salut éternel.

Ailleurs, au stade profane, prébachique avant tout lien mythologique au flux fermenté de la vigne, la coupe est le symbole de la femme. Par sa morphologie colpoïde (de la forme du vagin), la coupe renvoie à l’éros enivrant qui évoque la beauté vaginale et sa fonction de réceptivité de la fougue mâle, son rôle reproducteur au-delà du déchirant délire extatique partagé en tant qu’espace de fécondation et de procréation. La coupe – en ce sens symbolique du corps féminin – rappelle par les joies incompressibles, insoutenables de l’orgasme qui précède toute fécondation naturelle, que la vie de l’homme a comme destin ontologique d’être jouissance et félicité. La coupe est donc l’un des symboles les plus nobles de la féminité, de la maternité, de la copulation et du sain plaisir pourtant extrême, époustouflant. Là, c’est l’érotisme plénier que la coupe, le calice évoque à nos regards. Et, si nous revenons au vin, force est de remarquer que la coupe y est liée au stade séculier comme au schème sacré; au niveau œnologique comme à la dimension mythologique à travers les traditions où elle porte les nuances des plaisirs charnel et intellectuel que le vin sous-tend respectivement via le bachique et le dionysiaque. La coupe de vin est au centre de l’exaltation festive comme symbole des frénésies érotiques et jouissances somatiques, en même temps qu’elle est une métaphore de la transcendance spirituelle et de l’extase sacrée; preuve que la spiritualité et la sexualité peuvent sinon être en fusion – la fusion n’étant possible qu’entre Dieu et ses fils-esprits assumant leur essence déitaire d’Imago-Dei – à tout le moins vivre en harmonie dans leur congruence couplée au niveau de deux consciences humaines, homme et femme, aptes au véritable amour.

La coupe est promesse symbolique d’étanchement de nos soifs de vie, d’amour, de plaisir. Elle renvoie à notre énergie vitale. L’image insistante de la coupe est comme le refus humain de cuver le vin des justes passions, une sorte d’attestation que nous sommes des consciences en quête de bonheur…

Si la coupe est signe d’abondance chez David le roi psalmiste qui disait à Dieu : « tu oins d’huile ma tête et ma coupe déborde », elle est aussi l’indication soit de la vision conquérante soit du défaitisme selon qu’elle soit perçue à moitié pleine ou vide… Me viennent, à ce stade, deux images négatives de la coupe, celle contenue dans l’expression « vin de la colère » et celle du dicton qui stipule « boire le calice jusqu’à la lie ». Cette dernière occurrence démontre soit la consomption d’un condamné par le mal dont il n’arrive pas à se débarrasser, soit une mise en garde contre l’excès et l’extrémisme qui franchit l’inacceptable pour sa propre perte. Signe que si exaltant voire précellent que soit le symbolisme de la coupe, comme référent culturel et témoin de l’humanité, elle dévoile aussi l’envers des grandeurs humaines, nos faiblesses, notre peccabilité, nos limites à travers sa pluralité imageante et fictive.

Quand elle réfère à la femme, nous ne pouvons que saisir la coupe comme un lieu de colpocentrisme, puisque le vagin y est le centre de la sexualité. C’est là, la revanche féminine sur le prétendu phallocentrisme freudien, car si le phallus est flèche, la coupe devient cible, et donc par nécessité, c’est la cible qui est le centre de l’univers pour toute flèche arc-boutée avant son lancement…

Que soit dans vos vies, la coupe des bonnes délectations où vous connaîtrez l’ivresse spirituelle de la rédemption christique, l’enivrement intellectuel de votre intelligence sans oublier les jouissances bachiques bien orientées de votre chair!

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

Lire l’article sur le blog Intellection

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