Haïti : l’ONU et ses partenaires réclament un couloir humanitaire sur fond de résurgence du choléra

0
824

Les Nations Unies et la communauté humanitaire en Haïti ont réclamé jeudi l’ouverture immédiate d’un couloir humanitaire afin de permettre la sortie du carburant du Terminal de Varreux à Port-au-Prince, pour répondre aux besoins urgents de la population dans un contexte de résurgence du choléra.

Le blocage du Terminal de Varreux, principal point d’entrée du carburant en Haïti, entraîne depuis de nombreuses semaines des fermetures de centres de santé, et provoque l’interruption des services de traitement d’eau de la Direction Nationale de l’Eau Potable et de l’Assainissement d’Haïti (DINEPA) et d’entreprises privées de production et distribution d’eau traitée.

« L’accès à de l’eau potable, à l’assainissement et aux soins de santé s’en trouve gravement perturbé, alors qu’il est essentiel pour prévenir et répondre rapidement au choléra », ont précisé les Nations Unies en Haïti dans un communiqué de presse.

« Nous avons appelé à la mise en place d’un corridor humanitaire pour que le carburant circule dans la ville et dans le reste du pays afin que nous puissions assurer notre réponse. Sans carburant, il n’y a pas d’eau potable. Sans eau potable, il y aura plus de cas et il sera très difficile de contenir cette épidémie », a déclaré Ulrika Richardson, Représentante spéciale adjointe des Nations Unies dans le pays et Coordonnatrice humanitaire et résidente, s’exprimant depuis la capitale haïtienne.

Depuis que les autorités haïtiennes ont confirmé dimanche deux cas positifs de choléra, il y a eu 11 cas, sept décès et quelque 111 cas suspects, bien que les chiffres puissent être plus élevés.

Mme Richardson a dit craindre qu’il puisse y avoir « une augmentation exponentielle, voire explosive, des cas de choléra », compte tenu des conditions actuelles. « On pourrait même dire que les conditions sont peut-être réunies pour une tempête parfaite, malheureusement », a-t-elle déclaré aux journalistes au siège de l’ONU à New York.

Les plus vulnérables sont les premiers à souffrir

La crise que traverse Haïti affecte la population sur l’ensemble du territoire et les personnes les plus vulnérables sont les premières à souffrir du blocage. Avec la détérioration des conditions de fonctionnement de nombreux centres de santé et d’hôpitaux, les patients souffrant de maladie chronique, les femmes enceintes, les enfants et les nouveau-nés sont les premiers touchés par la difficulté d’accéder aux soins de santé de base.

Au cours des trois prochains mois, quelque 28.900 femmes enceintes et plus de 28.000 nouveau-nés risquent de ne pas recevoir de soins de santé, tandis que 9.965 complications obstétriques ne seraient pas prises en charge. Par ailleurs, la crise du carburant pourrait aggraver encore davantage l’insécurité alimentaire dans le pays, qui atteindrait déjà 45% de la population selon les projections réalisées en mars 2022, précise le communiqué de presse.

Les Nations Unies et les partenaires humanitaires s’inquiètent particulièrement de la situation précaire dans les 36 sites spontanés de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, qui comptent quelque 21.600 déplacés par les récentes violences entre gangs. Dans certaines zones, l’accès aux services de base tels que l’eau, l’hygiène et l’assainissement est pratiquement coupé, renforçant les conditions propices à la propagation du choléra.

S’il peut être mortel sans prise en charge médicale immédiate, le choléra est évitable et traitable. Avec plus de 52 cas suspects de choléra et 5 confirmés par les autorités sanitaires, il est encore temps d’enrayer la propagation de la maladie. 

Les Nations Unies et ses partenaires ont rappelé « l’importance du respect des principes humanitaires d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance dans l’établissement et le maintien de l’accès aux populations touchées par une situation d’urgence ».

Combattre l’épidémie

Le Conseil de sécurité de l’ONU tiendra une session plus tard ce mois-ci sur la situation sécuritaire en Haïti. Dans l’intervalle, l’ensemble du système des Nations Unies dans le pays contribue à la réponse à l’épidémie de choléra.

Le bureau des affaires humanitaires des Nations Unies, OCHA, s’occupe de la coordination, et d’autres agences des Nations Unies se joignent à l’effort collectif aux côtés de partenaires locaux et internationaux.

« Jusqu’à présent, ils ont distribué des médicaments et du matériel essentiels, mis en place des centres de traitement du choléra et augmenté la capacité de désinfection, en plus de soutenir certaines des rares possibilités d’accéder réellement à l’eau et aux mesures d’assainissement », a indiqué Mme Richardson.

La sensibilisation communautaire est importante. Aujourd’hui, des millions d’Haïtiens reçoivent quotidiennement des textos décrivant les actions pour se protéger, qui sont complétés par la distribution de tracts en porte-à-porte.

L’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) travaille également avec ses homologues des ministères de la Santé et des Communications pour lutter de toute urgence contre les « tendances inquiétantes » autour de la désinformation.

Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) s’emploie à faire parvenir des vaccins contre le choléra en Haïti, en plus de servir d’agence chef de file pour l’eau, l’assainissement et l’hygiène.

« Nous allons renforcer nos équipes sur le terrain, malgré la situation sécuritaire très difficile et la pénurie de carburant », a déclaré Mme Richardson aux journalistes. « Nos ressources existantes, nous les repositionnerons dans la mesure du possible et nous verrons évidemment si nous avons besoin d’un soutien financier. Mais il y a beaucoup à faire ».

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.