Journal Le Monde | Débats sur Haïti : Comme l’État français, la banque CIC a sciemment privé la première république noire des moyens de s’insérer dans l’économie mondiale

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Haïti : « Comme l’Etat, le CIC a sciemment privé la première république noire des moyens de s’insérer dans l’économie mondiale »

par Jean Michel Bezat

Mardi 31 mai 2022 ((rezonodwes.com))–

Dans sa chronique, Jean-Michel Bezat revient sur la « rançon » payée par l’ancienne colonie à la France de 1825 au début des années 1950 pour indemniser les propriétaires esclavagistes, l’empêchant d’investir dans l’éducation, la santé et les infrastructures porteuses de développement.

L’enquête du New York Times n’est sans doute pas parvenue jusqu’à Cité Soleil et Martissant, ces bidonvilles de Port-au-Prince écrasés de chaleur et de misère. Mais on se demande si l’infortune des centaines de milliers d’hommes et de femmes qui s’entassent dans ces quartiers de la capitale haïtienne ne plonge pas ses racines dans une histoire remontant au XIXe siècle. Reconstituée par le quotidien américain après un an d’enquête, publiée en anglais, en français et en créole, elle a fait la manchette de son édition européenne du 21-22 mai.

Cette histoire, c’est celle de « la rançon de l’indépendance » – expression utilisée par François Hollande en 2015 – payée par Haïti à la France de 1825 au début des années 1950 pour indemniser les propriétaires esclavagistes ; et l’implication, jusqu’à présent méconnue, du Crédit industriel et commercial (CIC), aujourd’hui filiale du Crédit mutuel. Comme l’Etat, la banque a sciemment privé la première république noire de l’histoire des moyens d’investir dans l’éducation, la santé et les infrastructures porteuses de développement, et de s’insérer ainsi dans l’économie mondiale.Lire aussi : Haïti : comment la France a obligé son ancienne colonie à lui verser des indemnités compensatoires

Résumé. En 1875, Haïti a déjà réglé une grande partie de sa « dette », dont le poids a parfois dépassé 40 % de ses recettes annuelles. Elle a plongé sa population dans la mizè, un mot sur toutes les lèvres quand on évoque le pays le plus pauvre de l’hémisphère Nord. Le CIC lui octroie alors un premier prêt pour construire routes, ponts, voies ferrées, et refinancer son reliquat de dette. Mais il en conserve une partie et prélève la moitié des taxes sur les exportations de café pour se rembourser. Le solde finit dans la poche des « gros mangeurs », ces riches profiteurs haïtiens, qui continuent de mettre le pays en coupe réglée.

Payer sa liberté deux fois

Mais ce n’est pas assez. Quelques années plus tard, le CIC fonde la Banque nationale d’Haïti, qui n’a de « nationale » que le nom : elle est installée au siège parisien du CIC, ses actionnaires sont français et elle leur doit verser des commissions à chacune de ses opérations. Des capitaux qui vont, entre autres, financer la tour Eiffel. Wall Street et l’ancêtre de Citigroup prendront le relais au début du XXe siècle, avant une occupation du pays par l’armée américaine (1915-1934), précédée d’une ponction sur les stocks d’or de la Banque nationale.

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