Jean Pruvost et la fabrique des dictionnaires, un modèle pour la lexicographie haïtienne

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Robert Berrouet Oriol

Par Robert Berrouët-Oriol
Linguiste-terminologue

Montréal, vendredi 24 septembre 2021 ((rezonodwes.com))–

En Haïti comme ailleurs, le recours aux dictionnaires de la langue usuelle (Le Robert, Le Larousse, Le Littré, etc.) passionne tant les élèves, les étudiants que les enseignants. On prend plaisir à découvrir le sens des mots, on les suit dans leurs trajectoires migratoires et historiques, on voyage avec eux pour appréhender la signification des nouveaux mots, etc. Toutefois, très peu d’usagers des dictionnaires savent comment sont fabriqués ces imposants et indispensables livres de référence, selon quelle méthodologie et procédés ils sont élaborés, et en fonction de quelles qualifications des rédacteurs ils ont vu le jour. Selon nos besoins et nos ressources, nous faisons appel à l’objet-livre, au format papier, ou à l’objet-livre dématérialisé, au format électronique et accessible sur Internet, mais nous ignorons presque tout au chapitre de son élaboration. Règle générale, l’usager ne sait pas qu’il y a en amont du processus de fabrication des dictionnaires des linguites-lexicographes et leurs équipes, tous arrimés à la théorie de la lexicographie et à la modélisation de leur travail lexicographique : Jean Pruvost en est un fort instructif exemple.   

Interpeller le parcours de Jean Pruvost revient donc à effectuer une instructive plongée-arpentage dans la vie même des dictionnaires. Cette plongée-arpentage revient à interroger le dispositif de fabrication de ces ouvrages de référence : la démarche théorisée et mise en pratique par Jean Pruvost pour élaborer des dictionnaires du français contemporain peut-elle constituer un modèle porteur et sûr pour la lexicographie haïtienne ? À travers son enseignement universitaire et ses ouvrages, Jean Pruvost nous fournit-il les instruments d’une approche scientifique de la lexicographie ? Dans cet article, nous proposerons des éléments de réponse à ces questions en situant d’abord le linguiste-lexicologue Jean Pruvost ; ensuite nous fournirons un éclairage abrégé sur les grands chantiers lexicographiques qui, au cours des siècles et au périmètre des grandes zones culturelles et linguistiques, ont précédé la lexicographie moderne. Nous proposerons également, en fin d’article, un condensé de l’état des lieux de la lexicographie haïtienne assorti d’une perspective lexicographique institutionnelle pour les prochaines années.

Jean Pruvost est professeur émérite de lexicologie et de lexicographie à l’Université de Cergy-Pontoise en France. Réputé à l’échelle nationale et internationale pour son enseignement universitaire et ses travaux de recherche en lexicologie, lexicographie et dictionnairique, ce linguiste-lexicologue français est l’auteur d’un nombre considérable d’articles scientifiques et d’ouvrages de référence. Ayant tôt reçu l’enseignement de Bernard Quémada –célèbre lexicologue et historien des dictionnaires, qui a dirigé le monumental dictionnaire « Trésor de la langue française » (TLF) en seize volumes–, Jean Pruvost passe son doctorat en sciences du langage en 1981 et se consacre à l’enseignement et à la recherche. À partir de 2002 il est directeur d’un laboratoire consacré aux dictionnaires et au lexique au CNRS (Conseil national de la recherche scientifique de France). Ses travaux de recherche et son enseignement lui ont valu de prendre la direction, en 2009, de la revue ÉLA (« Études de linguistique appliquée »). Jean Pruvost a reçu le prix international Logos en 2000 pour son ouvrage « Dictionnaires et nouvelles technologies » (PUF, 2000) et en 2006 le prix de l’Académie française pour « Les dictionnaires français, outils d’une langue et d’une culture » (Ophrys, 2006). Auteur, au cours des quarante dernières années, de plus de 350 publications scientifiques, de chroniques à la radio et à la télévision ainsi que d’articles de vulgarisation linguistique, il a notamment publié « Le Nouveau Littré 2005 » (livraison augmentée du « Petit Littré », Éditions Garnier) ; «Dictionnaires et mots voyageurs : les 40 ans du Petit Robert, de Paul Robert à Alain Rey », Éditions des Silves, 2008 ; « Paul Robert : l’aventure du dictionnaire Robert », avec Jérôme Robert (Éditions du Palio, 2017) ; « Les néologismes », avec Jean-François Sablayrolles (PUF, 2017) ; « Pleins feux sur nos dictionnaires » (Éditions Honoré Champion, 2018) ; « Les expressions et proverbes disparus de Pierre Larousse », avec Bernard Cerquiglini (Éditions Larousse, 2019) ; « L’école et ses mots : c’était comment avant le déconfinement ? » (Éditions Honoré Champion, 2020). Jean Pruvost a été directeur scientifique et rédacteur en chef du fameux dictionnaire « Nouveau Littré » (Éditions Garnier, 2003-2005) ; directeur d’une collection « Dictionnaires Bordas » (2007-2010) ; directeur, depuis 2007, de la revue électronique « Dictionnaires, encyclopédies, lexicographie : analyses et comptes rendus » ; puis directeur éditorial, depuis 2009, des Éditions Honoré Champion. Membre, depuis 2000, de l’Editorial Board de l’International Journal of Lexicography (Oxford University Press), il a également dirigé l’élaboration d’une série de dictionnaires Bordas, notamment le « Dictionnaire de citations de la langue française » (Éditions Bordas, 2007).

La lexicographie, une activité multiséculaire

Dans une étude érudite, très fouillée et fort bien documentée –parue dans le International Journal of Lexicography, vol. 4 no. 4, 1991, Oxford University Press–, et intitulée « Aux origines de la lexicographie : les premiers dictionnaires monolingues et bilingues », Claude Boisson, Pablo Kirtchuk et Henri Bejoint (Université Lumière, Lyon) passent en revue les divers chantiers lexicographiques qui ont été conduits au cours des siècles. Ils nous instruisent que « Selon l’opinion massivement répandue dans la littérature, dès 2600 avant notre ère, les Akkadiens produisaient des dictionnaires destinés à donner accès à la langue sumérienne […]. On explique de la même façon l’apparition des dictionnaires en Chine ancienne, chez les Grecs, chez les Romains […], en France ou en Angleterre dès le Moyen-Âge […], et probablement dans d’autres sociétés (Bejoint 1989 : 140). » Poursuivant le traçage des grandes zones culturelles et linguistiques, les auteurs de cette étude notent également qu’au «  14e siècle avant JC (…) c’est donc dans la zone Mésopotamie-Syrie que, sous l’impulsion sumérienne, sont apparus les prototypes de presque toutes les sous-catégories principales du genre « dictionnaire » : les premiers dictionnaires monolingues conceptuels (thématiques), les premiers dictionnaires bilingues inter-langues et inter-dialectes, ainsi que les premiers dictionnaires de prononciation et les premiers dictionnaires d’homophones ; même notre classement alphabétique est très lointainement et obscurément préfiguré par le classement acrographique. Le seul type manquant est le dictionnaire monolingue avec définitions systématiques, dont les premiers exemples se trouveront bien plus tard en Grèce, en Inde et en Chine, et qui caractérise donc un stade postérieur dans le développement général des outils lexicographiques. » Plus loin dans leur étude au long cours les auteurs précisent, pour l’aire européenne, que « Le premier dictionnaire monolingue d’une langue européenne pourrait bien être un dictionnaire allemand de 1509, « Der betler orden », qui est en fait la troisième partie du « Liber vagatorum ». Son classement est alphabétique à partir de la première lettre du mot seulement (Stein 1990 : 32). Le premier dictionnaire monolingue anglais est celui de Cawdrey (1604); c’est le « Table Alphabeticall of hard usuall English Wordes », sans doute basé sur un glossaire datant de 1530 (McArthur 1986 : 84). Le premier dictionnaire monolingue français est le « Thresor de la langue francoyse », de Jean Nicot, paru en 1606 (Quemada 1967). Le « Vocabolario degli Accademici della Crusca »(1612) contient encore des équivalents latins (Marello 1989 : 13). L’histoire lexicographique européenne est donc celle de l’affirmation progressive des langues vernaculaires et de la lente disparition du grec et surtout du latin. » En termes de datation des grands chantiers lexicographiques historiques, les auteurs notent de manière fort pertinente que « Le cas de la civilisation mésopotamienne est d’un intérêt exceptionnel pour l’histoire de la lexicographie, (…) car, précédant de peu l’Élam et l’Égypte, les Sumériens nous ont donné la première écriture connue dans l’état actuel des investigations, et ce sont également les auteurs des premiers dictionnaires, dont la conception a été imitée dans le Proche Orient ancien. » Selon cette tradition scripturale, « les premiers dictionnaires sont donc des exercices scolaires, et non pas, comme on aurait pu s’y attendre, des compilations de gloses de textes anciens (…) » sur le mode de « listes lexicales » qui se complexifièrent, et prirent une forme définitive vers la fin du 12ème siècle (…) », ce qui constitue « la plus étendue des traditions lexicographiques connues, puisqu’elle s’étend sur trois millénaires, depuis la fin du 4eme millénaire. » L’étude retrace également les chantiers de l’Égypte ancienne et ceux des langues sémitiques avec la prise en compte de la lexicographie biblique/hébraïque, la lexicographie arabe, tandis que, comme le montrent les auteurs, « la lexicographie tire ses origines d’une glose des mots et expressions « difficiles », vieillies, dialectales, spécialisées, que l’on trouvait chez Homère, Alcman, ou dans les lois de Solon, dans les inscriptions, etc., et non de la traduction. »

Lexicologie, lexicographie et métalexicographie, une démarche hautement scientifique

Au fil des ans, à travers son enseignement universitaire, ses articles scientifiques, sa participation à l’élaboration de dictionnaires de la langue générale et au creux de ses livres, Jean Pruvost a grandement contribué à l’ancrage de la lexicologie et de la lexicographie en tant que corps de savoirs autonomes de la linguistique et à en faire, aux côtés de Bernard Quémada, des disciplines scientifiques arrimées à une méthodologie rigoureusement modélisée. Il conforte la vision consensuelle selon laquelle la lexicographie est une des disciplines de la linguistique appliquée qui s’occupe de la théorie, des méthodes et de la pratique de constitution des dictionnaires. Autrement dit, la lexicographie est la branche de la linguistique appliquée qui a pour objet d’observer, de recueillir, de choisir et de décrire les unités lexicales d’une langue et les interactions qui s’exercent entre elles. L’objet de son étude est donc le lexique, c’est-à-dire l’ensemble des mots, des locutions en ce qui a trait à leurs formes, à leurs significations et à la façon dont ils se combinent entre eux (De Villers 2007).

De manière plus essentielle, pour la lexicographie haïtienne comme pour la lexicographie générale, Jean Pruvost nous enseigne au plan méthodologique que la lexicographie institue l’inventaire préalable des sources des mots du lexique de la langue et que la démarche lexicographique s’articule autour de l’idée d’un système, de l’organisation et de la classification modélisée des données lexicales observées. Ainsi, il a mis en lumière et explicité la notion de « métalexicographie », axe central de sa démarche, son objet de réflexion et de recherche en lien étroit avec l’histoire des dictionnaires. Franck Neveu, professeur de linguistique française à l’université de Paris-Sorbonne et directeur de l’Institut de linguistique française, fédération de recherche du CNRS, est l’auteur du « Dictionnaire des sciences du langage » (Éditions A. Colin, 2011). Voici en quels termes il situe l’apport théorique et pragmatique de Jean Pruvost au périmètre de la « métalexicographie » :

« Métalexicographie » [lexicographie] / À partir du grec meta [μετά], « ce qui dépasse, englobe ». La métalexicographie est une (sous-) discipline de la science du langage dont l’objectif est l’étude des types de dictionnaires et des méthodes qui président à leur constitution. Elle ne travaille pas à l’élaboration des dictionnaires, mais fait des dictionnaires, de leur histoire, de leur mode de traitement sémantique du lexique, et des problèmes pratiques résultant du travail lexicographique, son objet de réflexion et de recherche. Jean Pruvost présente ainsi cette discipline récente, qui connaît un développement considérable : « Lorsqu’une discipline, la lexicologie, a pris son essor en quittant le domaine pragmatique et artisanal qui lui servit de berceau, en l’occurrence la confection de dictionnaires depuis plus de cinq siècles, de Robert Estienne au TLF [Trésor de la langue française], de Richelet à Paul Robert, de Furetière à P. Larousse, de la première édition de l’Académie française au Dictionnaire français contemporain dirigé par J. Dubois, etc., on perçoit le signe même de sa maturité dans le regard que les spécialistes commencent à porter sur son histoire, sur les courants qui la traversent et les théories qui l’irriguent. Ce souci d’examen, d’évaluation et d’expertise, associé à la volonté de participer à la construction scientifique de la discipline s’est fait sentir en lexicologie et lexicographie depuis 1970 environ, dans le sillage de deux thèses majeures, l’une historique et fondatrice, celle de B. Quemada en 1967 sur les Dictionnaires du français moderne (1539-1863), et l’autre en synchronie et structuraliste, la thèse de Josette Rey-Debove, en 1971, « Étude linguistique et sémiotique des dictionnaires français contemporains ». Alain Rey publiait par ailleurs en 1970 un essai sur Littré, l’humaniste et les mots. C’est ainsi qu’est née dans le cadre d’une progression rapide la métalexicographie, lexicographie critique et théorique, discipline nouvelle dont l’objectif principal est l’étude des types et des méthodes des dictionnaires de langue notamment, appréhendés dans leur double dimension, lexicographique et dictionnairique. (J. Pruvost, « Dictionnaires et nouvelles technologies » PUF, 2000). » Les diverses articulations d’un tel socle méthodologique ayant fait école dans différentes aires de l’espace francophone, y compris au Québec, on les retrouve tout naturellement chez plusieurs chercheurs et lexicologues attelés à l’élaboration de dictionnaires.

Lexicographie et dictionnairique modernes : le socle méthodologique

La linguiste québécoise Marie-Éva de Villers, qui a, comme nous, longtemps travaillé à l’Office québécois de la langue française –institution chargée de la mise en œuvre de l’aménagement linguistique au Québec–, est l’auteure du fameux « Multidictionnaire de la langue française » (7e édition Québec/Amérique, 2021). Elle a parfaitement intégré le modèle méthodologique de Jean Pruvost comme l’atteste l’éclairant chapitre « Quel type de dictionnaire concevoir ? » consigné dans son livre « Profession lexicographe » (Presses de l’Université de Montréal, 2006). Voici en quels termes elle décrit l’ancrage méthodologique du travail lexicographique consécutif aux étapes obligatoires de l’énoncé éditorial (du type « Préface » ciblant le public visé, ainsi que l’exposé de la méthode utilisée), suivi du dépouillement des sources documentaires (le corpus de référence), puis de l’établissement de la nomenclature et du traitement linguistique proprement dit des unités lexicales :

« Le dictionnaire de langue : un livre de mots

« Le dictionnaire de langue a pour objectif de décrire les mots qui nomment le monde. Il doit permettre la compréhension de ces mots, mais il vise aussi à renseigner sur leur utilisation. À cette fin, il indique leur orthographe, leur prononciation, explique leur étymologie. Il recense leurs significations, en précisant la situation dans le temps (sont-ils courants, vieillis, archaïques ou néologiques ?), leur situation dans l’espace (font-ils partie du tronc commun de tous les francophones ou sont-ils propres à un territoire donné ?) et les registres de langue auxquels ils appartiennent. À l’occasion, il signale les cooccurrences, c’est-à-dire les mots qui figurent souvent avec eux. Il définit les locutions figées dont ils font partie, en exposant la façon de les construire dans la phrase, en illustrant leurs emplois par des exemples et des citations littéraires. [En voici un exemple :]

Le traitement du nom « peuplier » dans un dictionnaire de langue/ Éléments constitutifs de l’article [la rubrique dictionnairique traitant d’un terme] :


■ l’orthographe du nom : peuplier ;
■ la catégorie grammaticale : n. m. [abréviation de nom masculin] ;
■ la prononciation notée en alphabet phonétique ;
■ l’étymologie détaillée avec datations : XIVe ; poplier 1275 ; de l’ancien français peuple « peuplier » ; du latin populus ;
 la définition du sens 1 : Arbre élancé, de haute taille, des endroits frais et humides des régions tempérées (salicacées), à petites feuilles ;
■ des exemples d’espèces : peuplier blanc, peuplier de Hollande, peuplier tremble, peuplier noir, peuplier deltoïde, peuplier d’Italie, peuplier pyramidal ;
■ des exemples d’emplois du nom en son sens 1 : Route, rivière bordée de peupliers ;
■ des cooccurrences du nom en son sens 1 : Une haie, un rideau, une allée de peupliers ;
■ des attributs du nom en son sens 1 : Droit, grand, mince, élancé comme un peuplier ;
 une citation littéraire : « Cette brune jeune fille, à la taille de peuplier » (Balzac) ;
■ la définition du sens 2 : Bois de peuplier (bois blanc) ;
■ un exemple d’emploi du nom en son sens 2 : Utilisation du peuplier dans la fabrication des cageots, des allumettes ;
 des renvois analogiques : tremble, ⇨ liard, ⇨ peupleraie. »
(Le Petit Robert, 2006)

La lexicographie haïtienne s’est-elle développée en intégrant au fil des ans les acquis de la méthodologie de la démarche lexicographique ? Qu’est-ce qui la singularise ?

La lexicographie haïtienne : bref état des lieux et grands défis

La vision métalexicographique de Jean Pruvost est d’un apport central pour le champ disciplinaire que nous avons étiqueté « lexicographie haïtienne » : elle permettra aux chercheurs, à l’avenir, d’interroger utilement la production lexicographique haïtienne depuis ses débuts pour en déterminer la nature, les méthodes (lorsqu’il y en a) et les « produits », à savoir les lexiques et/ou les dictionnaires unidirectionnels ou bidirectionnels.

Henry Tourneux, linguiste spécialiste des langues africaines, est l’auteur de l’article « Un quart de siècle de lexicographie du créole haïtien (1975-2000) », paru dans « À l’arpenteur inspiré / Mélanges offerts à Jean Bernabé » dirigé par Raphaël Confiant et Robert Damoiseau, Matoury, Éditions Ibis rouge, 2006. Il y consigne un ample relevé des titres de la lexicographie haïtienne auquel il manque plusieurs titres, entre autres le « Dictionnaire français-créole » de Jules Faine, édition revue préparée par une équipe de spécialistes dirigée par Gilles Lefebvre à l’Université de Montréal, Éditions Leméac, 1974, ainsi que le « Dictionnaire français-créole / Diksyonè kreyòl-franse » de Jocelyne Trouillot, CUC Université Caraïbe, 2007. Il manque également la référence au monumental dictionnaire d’Albert Valdman, le « Haitian  Creole  –  English  Bilingual  Dictionary », Bloomington,  Creole  Institute,  Indiana  University,  2007, qui est certainement le plus rigoureux ouvrage de toute la lexicographie créole. Voici donc la bibliographie de la lexicographie du créole haïtien élaborée par Henry Tourneux :

BENTOLILA, Alain (dir.), 1976, Ti diksyonnè kreyòl-franse / Dictionnaire élémentaire créole haïtien-français, (Équipe de recherche : P. Nougayrol, P. Vernet, C. Alexandre, H. Tourneux), Port-au-Prince, Éditions caraïbes / Paris, Hatier, 511 p. [Format 11,5 x 19 cm]. [Environ 3.500 entrées].

[BRENTON, George], 1985, New English Creole Dictionary, with Creole-English : Dictionary for Instant Communication, [Port-au-Prince], Imprimerie Nouvelle, 218 p. [Format 8 x 15 cm].

COLAS, Nicolas (adapt.), 1980, Mo kontablite pou jesyon koperativ, Port-au-Prince, Conseil national de la coopération, 9 feuillets. [Porte en page de couverture le titre suivant : Diksyonè mo kontablite pou jesyon koperativ]. [Format : 22 cm].

DIDIEZ, Nelson, 1984, Manual breve de lengua creol : diccionario creol-español / español- creol, Santo Domingo [République dominicaine], Editora Taller, 415 p., illustrations. [Format 27 cm].

ETELOU, Mod : cf. Vilsen.


FREEMAN, Bryant C., 1989, Dictionnaire inverse de la langue créole haïtienne / Diksyonè lanvè lang kreyòl ayisyen an, Port-au-Prince, Centre de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti, 97 p.


FREEMAN, Bryant C., 1999 [3rd ed.], Haitian-English English-Haitian Medical Dictionary, with Glossary of Food and Drink, Lawrence, Institute of Haitian Studies, University of Kansas / Port-au-Prince, La Presse évangélique, 188 p. [Format 13,7 x 21,2 cm].

FREEMAN, Bryant & LAGUERRE, Jowel, 1998 [2nd ed.], Haitian-English Dictionary, Lawrence, Institute of Haitian Studies, University of Kansas / Port-au-Prince, La Presse évangélique, XXXVII + 655 p. [Format 13,5 x 21,2 cm]. [Environ 28.000 entrées. Selon les auteurs, il comporte « plus de 38.000 mots et expressions »].


HARDING, Marcus, 1996, Haitian Creole (Kreyol)-English Pocket Medical Translator, International Medical Volunteers Association, 128 p.


HEURTELOU, Maude : cf. Etelou, Mod.


HYPPOLITE, Michel-Ange, 1989, Atlas / leksik zo moun – Leksik an 4 lang, Montréal, Sosyete Koukouy Monreyal, 176 p. [Le lexique thématique qui suit l’atlas est en créole, anglais, espagnol, français].


HYPPOLITE, Michel-Ange & VILSAINT, Féquière, 1998, Atlas kò moun : zo, Coconut Creek (Florida), Educa Vision, 132 p.


JEAN-BAPTISTE, Rozevel, cf. VALDMAN.


JEANTY, Edner A., Diksyonè kreyòl / Dictionary / Anglé-Kréyòl / Creole-English, Port-au- Prince, La Presse évangélique, VI + 349 p. [Format 13,5 x 19,2 cm].

LAGUERRE, Jowel, cf. FREEMAN.

PELEMAN, L[ouis], 1976, Diksyonnè Kréyol-Fransé, Port-au-Prince, Bon nouvèl, XXIII + 209 p. [Format 14,7 x 20 cm].

PELEMAN, L[odewijk] F[rederik], 1986 (2e éd.), Gesproken Taal van Haïti met Verbeteringen en Aanvullingen / Ti diksyonnè kréyòl-nélandè ak yon ti dégi, (éd. revue par Bryant C. Freeman), Port-au-Prince, Bon nouvèl.

POOSER, Charles, cf. VALDMAN.


RINCHER, Deslande, 1994, Diksyonè an twa lang, Kreyòl-Anglè-Fransè : Trilingual dictionary, English-Creole-French : Dictionnaire trilingue, Français-Anglais-Créole, Brooklyn (New York), Rincher & Associates, 138 p. [Format : 24 cm].


TARGÈTE, Jean & URCIOLO, Raphael G., 1993, Haitian Creole – English Dictionary, Kensington (Maryland), Dunwoody Press, VII + 208p. [Contient des références bibliographiques, pp. V-VI]. [Format : 24 cm].


THEODORE, Charmant, 1995, Creole-English: English Creole, (Hippocrene Concise Dictionary), New York, Hippocrene Books, 291 p. [Porte sur la page de couverture le titre de Haitian Creole-English / English-Haitian / Creole Dictionary] [Format 10 x 15,2 cm].

TOURNEUX, Henry, 1986, Petit lexique créole haïtien utilisé dans le domaine de l’électricité (Haïti), Cahiers du Lacito 1, Paris, Lacito, pp. 177-198.

VALDMAN, Albert (dir.), 1981a, Haitian Creole-English-French Dictionary, Volume I, (Editorial assistants : Sarah Yoder, Craige Roberts, Yves Joseph ; Native consultants : Francia Laborde Joseph, Josiane Hudicourt ; Research assistants : Claude Berrouët, Michel Lange, Micheline King, Yanick Augustin, Lydie Brissonnet, Maragaret Bachman), Bloomington (Indiana), Indiana University, Creole Institute, XX + 582 p. [Format 21,5 x 28 cm]. [Environ 9.500 entrées].

VALDMAN, Albert (dir.), 1981b, Haitian Creole-English-French Dictionary, Volume II, [English-Creole Index / French-Creole Index], (Editorial assistants: Sarah Yoder, Craige Roberts, Yves Joseph ; Native consultants : Francia Laborde Joseph, Josiane Hudicourt ; Research assistants : Claude Berrouët, Michel Lange, Micheline King, Yanick Augustin, Lydie Brissonnet, Maragaret Bachman), Bloomington (Indiana), Indiana University, Creole Institute, 156 + 142 p. [+ 2 p. d’errata]. [Format 21,5 x 28 cm].

VALDMAN, Albert, en collaboration avec POOSER, Charles & JEAN-BAPTISTE, Rozevel, 1996, A Learner’s Dictionary of Haitian Creole, Bloomington (Indiana), Indiana University, Creole Institute, XXXVII + 529 p. [Format : 27 cm] [Environ 7.000 entrées ; Haitian Creole-English Index pp. 419-529].

VÉDRINE, Emmanuel W., [199-], Dictionary of Haitian-Creole Verbs, Coconut Creek (Florida), Educavision Inc., 244 p. [Format 20,5 x 27 cm].

VÉDRINE, Emmanuel W., [1992], Dictionary of Haitian-Creole Verbs with Phrases and Idioms, Soup to Nuts Press, 244 p.

VÉDRINE, Emmanuel W., 1996, Petit lexique du créole haïtien, Randolph (Massachusets), Orèsjozèf Publications, 87 p.

VERNET, Pierre (dir.), [sous presse], avec la coll. de Henry Tourneux et de Marcel Diki-Kidiri, Lexique électro-mécanique créole-français-anglais-espagnol, Port-au-Prince, Centre de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti.

VERNET, Pierre (dir.), [sous presse], avec la coll. de Marcel Diki-Kidiri, Dictionnaire agricole créole, Centre de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti.

VERNET, Pierre (dir.), [pro manuscripto], Lexique juridique français-créole, Centre de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti.

VERNET, Pierre & FREEMAN, Bryant C., 1989, Dictionnaire préliminaire des fréquences de la langue créole haïtienne, Port-au-Prince, Centre de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti, 134 p. [Format : 22 cm].

VERNET, Pierre & FREEMAN, Bryant C., 1997 (2e éd.), Diksyonè òtograf kreyòl ayisyen, Pòtoprens [Port-au-Prince], Sant lengwistik aplike Inivèsite Leta Ayiti [Centre de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti], 89 p.

VILSAINT, Féquière : cf. Vilsen, Fekyè.


[VILSAINT, Féquière], s.d., English / Haitian-Creole Haitian-Creole / English Computer accessible Dictionary for IBM compatible, Codes by F. Adolphe ; text by F. Vilsaint, Coconut Creek (Florida), Educa Vision.


VILSAINT, Féquière, 1991, Diksyonè Kreyòl-Anglè, Coconut Creek (Florida), Educa Vision, 208 p. [Format 19,7 x 26,5 cm].


VILSAINT, Féquière, 1991, Diksyonè anglè kreyòl: English Kreyòl Dictionary, Temple Terrace (Florida), Educa Vision, 291 p. [Format 22 cm].


VILSAINT, Féquière, 1992, English-Kreyòl idiomatic expressions, Temple Terrace (Florida), Educa Vision, 78p. [Titre de couverture: English Creole idiomatic expressions] [Format : 28 cm].


VILSAINT, Féquière, 1995, Science Dictionary / Diksyonè Syans, Coconut Creek (Florida), Educa Vision, 134 p. [Contient 3.000 termes anglais des domaines de la science, des mathématiques, de la médecine, etc., avec leurs équivalents créoles].


VILSEN, Fekyè & ETELOU, Mod, 1990, Diksyonè kreyòl Vilsen, Temple Terrace (Florida), Educa Vision, 464 p. [Format 21 x 27,2 cm].

L’un des mérites de l’étude d’Henry Tourneux réside dans l’éclairage qu’elle offre des caractéristiques du corpus dictionnairique haïtien. Les ouvrages répertoriés sont en majorité bilingues anglais-créole, ils sont parfois bilingues français–créole ou trilingues anglais-créole-français, quelques lexiques font partie du lot, et ils sont très rarement élaborés par des linguistes-lexicologues. Un seul dictionnaire est unilingue créole, le « Diksyonè kreyòl Vilsen » et, comme nous l’avons démontré lors de notre évaluation critique, il souffre de lourdes lacunes conceptuelles et méthodologiques et de nombreuses définitions fabriquées en dehors des règles de base de la lexicographie professionnelle sont fausses, lacunaires ou incomplètes (voir notre article « Le traitement lexicographique du créole dans le « Diksyonè kreyòl Vilsen », Le National, 22 juin 2020). La liste relativement longue d’Henry Tourneux ne doit toutefois pas faire illusion : la production lexicographique haïtienne demeure très faible et depuis l’officialisation du créole et du français dans la Constitution de 1987, elle a peu évolué. Et signe évident de ses retards comme de ses difficultés à dépasser dans bien des cas le stade artisanal et amateur du travail lexicographique, elle n’a toujours pas fourni au système éducatif national des ouvrages de référence de qualité (dictionnaires unidirectionnels ou bidirectionnels en particulier) pour l’enseignement en langue maternelle créole. Ainsi, il n’existe toujours pas, en lexicographie créole, un dictionnaire unilingue créole de haute qualité élaboré selon la méthodologie de la lexicographie professionnelle.

Paru en 2006, l’article de Henry Tourneux ne pouvait prendre en compte les publications lexicographiques ultérieures. Ainsi, il n’a pas répertorié deux productions dont nous avons fait l’analyse critique selon les critères de la lexicographie professionnelle, à savoir le « Glossary of STEM terms from the MIT – Haïti Initiative » ainsi que le « Dictionnaire de l’évolution du vocabulaire français en Haïti » d’André Vilaire Chéry (voir nos articles « Le traitement lexicographique du créole dans le « Glossary of STEM terms from the MIT – Haïti Initiative », Le National, 21 juillet 2020, et « À propos du « Dictionnaire de l’évolution du vocabulaire français en Haïti » d’André Vilaire Chéry », Le National, 29 novembre 2019).

L’analyse critique, selon les critères méthodologiques de la lexicographie professionnelle, a permis d’établir que le « Glossary of STEM terms from the MIT – Haïti Initiative » –mis en ligne par la « Platfòm MIT-Ayiti » dans le cadre d’un projet éducatif en cours d’exécution à l’école Matènwa de l’île de La Gonâve–, est une œuvre pré-scientifique et pré-lexicographique fantaisiste, erratique et confuse élaborée dans l’ignorance des règles de base de la lexicographie. Ce « Glossary » comprend 859 faux équivalents prétendument « créoles », non motivés linguistiquement et qui, de surcroît, ne sont pas conformes au système de la langue créole. En raison de ses très lourdes lacunes conceptuelles, méthodologiques et lexicographiques, cet amateur et médiocre « Glossary » de la « Platfòm MIT-Ayiti » ne répond pas aux normes de la lexicographie professionnelle et il ne peut être recommandé par les linguistes comme outil dans l’apprentissage en créole des mathématiques, des sciences et des technologies. En voici un échantillon, qui illustre bien le constat qu’un créolophone, élève ou enseignant, ne peut comprendre les pseudos équivalents « créoles » de ce « Glossary » :

air resistancerezistans lè
air trackpis kout lè
and replica plate onepi plak pou replik sou
at restnan eta repo
circularly polarized lightlimyè ki polarize an sèk
multiple regression analysisanaliz pou yon makonnay regresyon

L’examen attentif du « Glossary of STEM terms from the MIT – Haïti Initiative » permet d’exemplifier l’idée centrale, longuement exposée par Bernard Quémada et Jean Pruvost, que la lexicographie en tant que science au cœur de la linguistique appliquée nécessite un socle méthodologique explicite en dehors duquel il n’est pas possible d’élaborer des « produits » lexicographiques rigoureux dans la langue usuelle ou dans les langues de spécialité, y compris en créole haïtien. Cet examen illustre également le constat de l’absence de contrôle de l’État haïtien, notamment à travers le ministère de l’Éducation nationale, sur les « produits » lexicographiques (et didactiques aussi) en langue créole aveuglément parachutés dans le système éducatif en dehors des qualifications de base indispensables à l’activité lexicographique.  Sous cet angle également, le « Glossary of STEM terms from the MIT – Haïti Initiative » est un éclairant exemple de l’énorme catastrophe didactique que préfigure, dans le champ éducatif national, le parachutage d’outils lexicographiques aussi médiocres qu’amateurs mais tolérés par l’État haïtien en panne de vision linguistique.

À contre-courant du fantaisiste et amphigourique « Glossary of STEM terms from the MIT – Haïti Initiative », le « Dictionnaire de l’évolution du vocabulaire français en Haïti » d’André Vilaire Chéry –tomes 1 et 2, Éditions Édutex, 2000 et 2002, publié avec le concours du Bureau caraïbe de l’AUF–, est un ouvrage rigoureux et il constitue, au plan méthodologique, un modèle pionnier pour la lexicographie haïtienne contemporaine aussi bien en créole qu’en français. Dans ce chantier lexicographique de grande qualité, le lexicographe haïtien André Vilaire Chéry a accordé un soin particulier au corpus de référence qui, précise-il, illustre « l’évolution du discours politique et social haïtien depuis 1986 », et qui a été établi par la consultation de nombreuses sources écrites et orales –étape documentaire qui est à la base de toute entreprise lexicographique rigoureuse. Ainsi, « Le travail de recherche qui a abouti au Dictionnaire s’appuie sur la collecte et l’analyse d’un important corpus de textes (journaux, revues, ouvrages, publications diverses) », corpus auquel s’ajoute le relevé des sources audiovisuelles. L’établissement du corpus de référence a donné lieu à la confection de la nomenclature du « Dictionnaire de l’évolution du vocabulaire français en Haïti », et cette nomenclature a permis le classement des unités lexicales « génériques » et « spécifiques », selon qu’elles appartiennent à la langue générale ou qu’elles sont des créations lexicales propres au français d’Haïti. 

L’une des originalités du « Dictionnaire de l’évolution du vocabulaire français en Haïti » est qu’il tient à la fois, dans ses rubriques, du dictionnaire usuel de la langue et du dictionnaire encyclopédique. Ce double ancrage méthodologique enrichit la démarche et permet à André Vilaire Chery de ratisser large en s’adossant à un corpus de référence varié. Cela vaut à l’auteur d’indiquer « les différents aspects de chaque unité lexicale : orthographe, prononciation, classe grammaticale, sens, mode(s) d’inscription dans la chaîne syntaxique, etc. ». Les unités lexicales ainsi présentées correspondent à une structure lexicographique classique (« amender », « bicaméral », « blocage »), et lorsqu’elles renvoient à des concepts académiques précis, la description lexicographique de départ est enrichie d’un accompagnement encyclopédique plus ou moins étendu. De sorte que les « Notations d’ordre linguistique et [les] développements à caractère non linguistique s’imbriquent, le plus souvent, selon un canevas multiple et varié ». Voici un exemple tiré du « Dictionnaire de l’évolution du vocabulaire français en Haïti », (op. cit., p. 74-75) :

« moto-taxi (nom f.)

[Définition] Néologisme du français d’Haïti : « motocyclette utilisée comme taxi ».

[Note] Le mot est formé sur le modèle de « avion-taxi ».

[Contexte] « Manifestation des chauffeurs de moto-taxi à Gros-Morne ».

[Source] « Les remous de l’actualité », Le Nouvelliste du 2 juillet 2001.

[Note et variante lexicale / Quasi-synonyme] On rencontre aussi « taxi-moto » :

[Contexte de « taxi-moto »] « La veille, un policier a tué de deux balles un motocycliste, conducteur de taxi-moto (…) »

[Source de « taxi-moto »] Haïti en marche, 5 mars 1999.

[Note se rapportant à « taxi-moto »] L’article cité utilise également la forme « moto-taxi ».

Ces données lexicographiques sont suivies d’un développement de type encyclopédique éclairant avec pertinence l’histoire récente de ce néologisme introduit dans le français régional d’Haïti ; l’auteur précise de surcroît ne les avoir pas retrouvés dans Le Larousse et Le Robert (de l’époque) mais il a trouvé une attestation de son emploi au Cambodge dans une dépêche de l’agence Syfia International du 15 février 2002.

Le « Dictionnaire de l’évolution du vocabulaire français en Haïti » d’André Vilaire Chery illustre bien la perspective de l’apport de Jean Pruvost à l’élaboration de chantiers lexicographiques de qualité en Haïti. Cet apport mérite d’être mieux connu et, surtout, intégré à la formation universitaire et à la modélisation de la pratique lexicographique en Haïti. C’est certainement dans un double mouvement qualitatif que se situe l’avenir de la lexicographie haïtienne : son inscription dans la théorie de la lexicographie professionnelle et son arrimage à un socle méthodologique rigoureux en vue de la production d’outils lexicographiques de haute qualité aussi bien en créole qu’en français. Pareil défi est également en lien, sur le volet créole de la lexicographie haïtienne, avec la nécessaire didactisation du créole en vue de la production d’outils didactiques de qualité dans la langue maternelle et usuelle de la majorité des Haïtiens (voir le livre de référence « La didactisation du créole au cœur de l’aménagement du créole en Haïti », par Berrouët-Oriol et al., Éditions Zémès, Port-au-Prince, et Éditions du Cidihca, Montréal, mai 2021, 382 pages). Compte-tenu des réalités du terrain en Haïti, la lexicographie haïtienne doit impérativement quitter le périmètre des initiatives individuelles et de l’amateurisme constaté dans plusieurs cas, pour prendre la voie de son inscription institutionnelle avec l’apport de lexicographes qualifiés travaillant en équipe. L’institutionnalisation de la production lexicographique haïtienne est une condition nécessaire à l’établissement de sa viabilité et de sa crédibilité scientifique, notamment au sein de la Faculté de linguistique appliquée de l’Université d’État d’Haïti, la seule institution nationale dédiée aux sciences du langage et dont l’une des missions majeures est la production d’outils lexicographiques dans les deux langues officielles du pays.

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