Jovenel Moïse : Mise en scène pour un scrutin fait sur mesure

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Il n’est un secret pour personne que le chef de l’État, dont le départ a été, plus d’une fois ― mais surtout durant la mobilisation « pays lock » ―, exigé, à cor et à cri, par des millions de manifestants descendus dans les rues de la capitale et des villes de province, n’a plus une once de crédibilité pour rester au pouvoir jusqu’au 7 février 2021.

Editorial de Haïti-Observateur tiré de l’édition du 24juin au 1er juillet 2020.

jimmy barbecue ne fait rien pour se mettre à couvert

New York, mercredi 24 juin 2020 ((rezonodwes.com))–Nonobstant les dénonciations des actes anti constitutionnels qui se multiplient à longueur de journée, ainsi que les mises en garde rappelant ses limites constitutionnelles à Jovenel Moïse, il continue de foncer, tête baissée, dans ses dérives. Mettant le cap sur la tenue des élections, avant la fin de l’année 2020, les événements enregistrés, ces derniers jours, ne laissent aucun doute, quant à son objectif : organiser des élections faites sur mesure, pour lui-même ou son dauphin qu’il reste à identifier. Tout cela en vue de remettre les clés du Palais national à un autre représentant authentique du PHTK.

Jovenel Moise ne jouit d’aucune crédibilité

Il n’est un secret pour personne que le chef de l’État, dont le départ a été, plus d’une fois ― mais surtout durant la mobilisation « pays lock » ―, exigé, à cor et à cri, par des millions de manifestants descendus dans les rues de la capitale et des villes de province, n’a plus une once de crédibilité pour rester au pouvoir jusqu’au 7 février 2021. Ce qui met en évidence l’affrontement qui se profile à l’horizon, au fur et à mesure que s’approche la date constitutionnelle de la remise du pouvoir par Jovenel Moïse. Point n’est besoin de réitérer le sentiment de dégoût ressenti par le peuple haïtien face aux démarches de ce dernier visant à rassurer sa famille politique que tout sera mis en œuvre pour que la date de son départ constitutionnel ne soit le jour de la grande dé – bâcle des PHTKistes et lui-même se bousculant pour esquiver leur rendez- vous avec la justice.

des choses bizarres sont en cours pour garder le pouvoir pendant 50 ans

En effet, des choses bizarres se passent en Haïti. Même à l’heure du coronavirus, le chef de l’État et ses conseillers ne se gênent pas de soumettre le pays tout entier au régime du confinement et de la distanciation sociale, des mesures qui s’appliquent aux autres et non à eux. Car dans le cadre des opérations visant la mise en place des moyens de préparer la tenue d’un scrutin fait sur mesure, le protocole de gestion de la pandémie ne doit nullement concerner les démarches électoralistes. Il importe de surveiller de près les moindres faits et gestes de Jovenel Moïse et de ses alliés politiques, à quelque niveau qu’ils appartiennent dans la hiérarchie PHTKist.

On connaît fort bien les bonnes relations, voire le partenariat criminel qui existe entre le régime dirigé par Jovenel Moïse et les gangs armés, qu’il instrumentalise systématiquement à des fins politiques, histoire de maintenir le PHTK au pouvoir pour les cinquante prochaines années, tel que l’avait révélé l’ex-Premier ministre Jack Guy Lafontant.

les auteurs des massacres restés impunis

À cet égard, prenons à témoin l’avocat André Michel, leader du secteur démocratique et populaire, dénonçant la mise sur pied d’une fédération de bandits armés, qui font la pluie et le beau temps dans les bidonvilles de la capitale. Il s’agit d’une alliance de criminels embrigadés au sein d’un groupe de malfaiteurs, à l’initiative de Jimmy Chérizier, alias Barbecue, l’instigateur du massacre d’État de La Saline, ou encore de celui du Bel-Air et de Carrefour-Feuilles, en sus d’autres carnages du même genre perpétrés ailleurs à la capitale haïtienne, dans les bidonvilles, et même en provinces. 

Rappelons que ce même Chérizier, qui fait l’objet d’un avis de recherche datant de l’année dernière, ajouté aux déclarations du ministre de la Justice et du commissaire du gouvernement relançant l’ordre de son arrestation, il y a à peine un mois, ne fait rien pour se mettre à couvert. D’ailleurs, a-t-il rétorqué, « s’ils en ont l’audace qu’ils viennent m’arrêter » . Au fait, a dénoncé Me Michel, « (…) La rencontre, suivie du déploiement des chefs de gang proches du pouvoir politique en place dans le quartier de Grand Ravine (Martissant), en plein cœur de la capitale, le dimanche 21 juin 2020, au vu et au sus de tous, sans être inquiétés, est la preuve irréfutable qu’aucune élection n’est possible avec Jovenel Moïse au pouvoir ». 

la milice privée de Jovenel Moise

En guise de parade militaire, ces bandits de Gran Ravin ont défilé dans les rues de ce bidonville avec Jimmy Chérizier à leur tête. Quel témoignage plus éloquent pour démontrer que ces criminels sont embrigadés dans la milice privée de Jovenel Moïse, dont la mission consiste à terroriser la population, particulièrement dans le cadre des élections que ce dernier croit pouvoir imposer à la nation ? 

De toute évidence, Chérizier a mené ces dernières activités à Gran Ravin, dimanche dernier, avec la bénédiction du chef de l’État ne s’imposant plus aucune retenue dans ses relations avec les criminels. Les dénonciations dont il est constamment l’objet, tant dans la presse qu’au niveau des secteurs poli- tiques, et même des cris de révulsion soulevés dans les différentes couches de la société, n’ont pas eu la vertu de le porter à changer son fusil d’épaule. Puisque, le cap bien fixé sur des élections frauduleuses, dont il fait son apanage, M. Moïse persiste, sans désemparer, à multiplier les démarches qui, selon lui et ses proches collaborateurs, permettront d’assurer la « victoire » aux urnes du candidat à la présidence du parti présidentiel. Aussi bien d’octroyer à la formation Tèt Kale la majorité des sièges, tant au Parlement que dans les assemblées locales. 

les armes saisies à Lafiteau, un mystère ?

Quand on parle des démarches de Jovenel Moïse pour consolider l’emprise du PHTK sur le pouvoir, un autre fait est encore à signaler. Nous faisons référence à la saisie d’un container rempli d’armes de gros calibres et d’une importante cargaison de munitions au port privé de Lafiteau. Le plus grand mystère continue d’entourer ces marchandises illicites. Si les douaniers se sont bien acquittés de leur tâche en signalant la présence de ces armes aux autorités judiciaires, après les avoir interceptées, ces dernières ne semblent pas vouloir encore afficher la volonté de poursuivre le cas jusqu’à sa conclusion finale. Car, bien que la personne à qui est adressé le container soit connue et son adresse identifiée, le dossier reste encore dans les limbes. 

Selon toute vraisemblance, suite aux informations ayant cours à cette cargaison, les armes n’ont pas été commandées pour le compte de la Police nationale. Dans la mesure où le gouvernement a le monopole de l’importation de tels engins, il faut croire que les propriétaires du container d’armes et de munitions sont des proches du Palais national s’acharnant, lui, à cacher leur identité. Telle est, dans le passé, la manière dont ont été gérés les dossiers relatifs aux commandes d’armes et de munitions effectuées de manière illégale, pour être distribuées aux gangs commandités par le pouvoir en place. 

En attendant que l’affaire des armes et de munitions interceptées au port de Lafiteau soit tirée au clair, il faut insister pour que les autorités disent la vérité, toute la vérité, par rapport aux vrais propriétaires de ces marchandises. Mais plus important encore, à qui elles sont destinées. Car on ne serait pas trop loin de la vérité de dénoncer le Palais national comme étant à l’origine de ces commandes. 

Il faut craindre aussi que, avec ces criminels, au Palais national et ailleurs, au sein de l’administration publique, les personnes identifiées comme étant les importateurs de ces marchandises, notamment Katia Louis, soient de mèche avec les dirigeants. Rappelons que celle-ci était présente, à la Douane, au moment de l’inspection du container, mais elle a pu se dérober sans laisser de traces. Cette crainte se justifie par le fait de l’assassinat du substitut du commissaire du gouvernement Fritz Gérard Cérisier qu’on prétend être lié à l’affaire d’armes interceptées à Lafiteau

Dans ce même ordre d’idées, signalons également un incident survenu le week-end écoulé, à Thomassin, non loin de la résidence privée du président. Une tentative d’assassinat avait eu lieu dans une maison privée par deux hommes armés non identifiés, dont l’un d’entre eux a logé un projectile dans la tête du propriétaire. Mais ce dernier a eu le temps de prendre son courage à deux mains pour riposter, assenant un coup de bâton à la tête d’un des assaillants qui rendit l’âme, dit-on, sur le champ. Des informateurs requérant l’anonymat laissent croire que, au moins un membre de cette famille, se – rait lié à la cargaison d’armes. 

Il est possible que, dans la mesure où se confirme le rôle du gouvernement PHTKiste, dirigé par Jovenel Moïse, dans la commande de ce container d’armes, les dessous de cette affaire restent à jamais inconnues. Mais rien ne devrait éloigner l’attention du peuple haïtien des stratégies mises en place par le chef de l’État et son équipe pour concrétiser son projet d’élections faites sur mesure. Car ce coup ne doit pas passer!

Editorial de Haïti-Observateur

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